Sarah Bernhardt, La Divine, un film de Guillaume Nicloux
Les biopics font fureur sur grand écran, à croire que les scénaristes sont à sec ! En voici donc un nouveau, consacré à celle qui fut, à son époque, considérée comme une immense actrice de théâtre : Sarah Bernhardt (1844-1923).
En fait le film de Guillaume Nicloux se concentre sur deux périodes importantes de la vie de celle que Cocteau baptisait « monstre sacré » : la journée de son jubilé et l’amputation de sa jambe. Le film s’ouvre sur la scène finale de La Dame aux camélias, scène assez séduisante dramatiquement et dont il faut bien profiter car, de l’art de La Divine, il n’y sera fait plus aucune allusion. Et d’ailleurs comment pourrait-il en être autrement sinon au risque de faire sourire le public contemporain à l’élocution grandiloquente et emphatique, issue de la déclamation baroque, de Sarah Bernhardt, insupportable plus de deux secondes aujourd’hui. Alors pourquoi cette aura de légende ? D’abord une vie plus que sulfureuse, en cela que, bisexuelle telle que la montre ce film, elle comprit rapidement tout le retour qu’elle pouvait espérer des scandales qu’elle provoquait par ses excentricités. Ensuite un certain génie de la communication. Véritable influenceuse avant l’heure, elle s’organisa des tournées sur les cinq continents qui ne firent que renforcer son image de star internationale. Hystérisant une presse toujours en quête de dérapages incontrôlés, Sarah Bernhardt passera ainsi vivante dans la légende dorée du théâtre.
Se confronter à un tel personnage est un défi redoutable. En limitant son film aux deux épisodes ci-dessus nommés, Guillaume Nicloux évite l’infaisable biopic traditionnel, fait flamboyer des décors et des costumes ahurissants de lourdeurs somptueuses, de préciosités Art déco (toute une époque !) et donne libre cours à une actrice : Sandrine Kiberlain, pour incarner l’icône. Ce qu’elle tente de faire avec force colères, caprices, hurlements, détachements aussi de tout ce qui n’était pas elle, et autres ignominies de diva. Dans un surjeu total et sans aucune nuance, on n’y croit pas un seconde. A ses côtés, des comédiens du « Français » tentent leur chance sans vraiment y parvenir : Laurent Lafitte (Lucien Guitry, l’un de ses amants), Laurent Stocker (Pitou, son secrétaire souffre-douleur), Sébastien Poudroux (Samuel Pozzi, son médecin et amant passager), Clément Hervieu-Léger (Georges Clairin, son peintre officiel). On croise aussi Emile Zola auquel elle aurait soufflé de s’occuper de l’affaire Dreyfus (?), Edmond Rostand et même Sigmund Freud le temps qu’elle lui tourne le dos en deux secondes chrono.
Et à la fin, que sait-on de l’art de cette tragédienne ? Rien ! Souhaitons vivement que le prochain biopic sur nos écrans, consacré à Maria Callas devant la caméra de Pablo Larrain, soit d’un autre intérêt…