Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Contes cruels de la jeunesse de Nagisa Oshima
C’est par son sens de la transgression et son rejet des tabous que Nagisa Oshima est devenu dans les années 1970 l’un des cinéastes japonais les plus célèbres au monde avec L’Empire des sens en 1976 (censuré dans son pays en raison de scènes sexuelles non simulées) et L’Empire de la passion en 1978. Suivront Furyo en 1983 (avec David Bowie et la célèbre musique de Ryuichi Sakamoto) et Max mon amour, trois ans plus tard, où le personnage interprété par Charlotte Rampling vit une relation adultérine avec un chimpanzé… Eros et Thanatos, représentation crue de la sexualité et de la violence : ces éléments étaient déjà au cœur du deuxième long-métrage du réalisateur, Contes cruels de la jeunesse, sorti en 1960, qui apporta à Oshima une reconnaissance internationale.
A Tokyo, une jeune fille, Makoto, échappe à une tentative de viol, commise par un homme l’ayant prise en stop, grâce à l’intervention musclée de Kiyoshi qui dépouille l’agresseur. Plus tard, cet étudiant en rupture de ban viole Makoto qui tombe néanmoins amoureuse de lui. S’ensuit pour cet étrange couple une dérive faite de rackets au cours desquels la jeune femme sert d’appât.
Rebelles sans cause
Rapports de soumission et de domination, prostitution, avortement clandestin, violence : l’univers dans lequel évolue les personnages d’Oshima (également scénariste) conserve plus de soixante ans après sa dimension sulfureuse. Par ailleurs, c’est par sa forme (caméra à l’épaule, scènes en décors naturels) que le film va être assimilé à la Nouvelle Vague française. Bien qu’ancrée dans des réalités japonaises (notamment avec des références sur les désillusions politiques d’une certaine gauche), cette histoire d’un amour promis à l’échec épouse des thématiques plus universelles autour en particulier d’une jeunesse qui veut s’affranchir du vieux monde et des règles communes. A bout de souffle en France ou La Fureur de vivre aux Etats-Unis (pour ne citer que deux œuvres emblématiques de cette époque) montrent les mêmes rebelles sans cause.
Les jeunes marginaux et criminels d’Oshima sont quant à eux filmés dans un mélangé d’hyper-réalisme et de stylisation qui témoigne de la singularité de Contes cruels de la jeunesse dont la noirceur extrême se fait aussi l’écho d’une angoisse existentielle.
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