Premières Ondes #2 à l’église du Gésu, vendredi 3 mai
Fondé en 1976 par Jean-Pierre Mathieu et Jean-Pierre Canihac, l’ensemble de cuivres anciens de Toulouse Les Sacqueboutiers est aujourd’hui une référence dans le monde de la musique ancienne, comme en témoignent les nombreuses collaborations avec des formations aussi prestigieuses qu’Hespèrion XXI, les Arts Florissants, la Chapelle Royale, la Grande Écurie et la Chambre du Roy ou l’ensemble vocal Clément Janequin. Après bientôt un demi-siècle d’existence, la nécessité de transmettre leur savoir et leur expérience, de préparer la relève, s’est imposée aux actuels directeurs de l’ensemble. L’événement Premières Ondes, dont la 2e édition se conclut par un concert public le 3 mai à 20 h à l’église du Gésu, illustre cette volonté de soutenir les jeunes talents dans le lancement de leur carrière. Entretien avec le tromboniste et joueur de sacqueboute Daniel Lassalle, co-directeur artistique des Sacqueboutiers.
L’ensemble de cuivres anciens de Toulouse les Sacqueboutiers organise début mai prochain à l’église du Gésu la 2e édition de Premières Ondes. À l’origine de cet événement, il y a l’Atelier des Sacqueboutiers : quelle est sa vocation ?
L’Atelier des Sacqueboutiers a été créé en 2007. Jean-Pierre Canihac et moi-même pensions qu’il fallait donner à de jeunes musiciens la possibilité d’évoluer au sein d’un ensemble tel que le nôtre, en participant à des concerts, à des tournées, afin qu’ils puissent acquérir de l’expérience et se faire connaître. Dans la musique ancienne, être repéré et identifié n’est pas chose facile pour un jeune qui débute. Contrairement à la musique classique, il n’y existe pas de concours d’orchestre. Il faut donc se faire une réputation et un nom pour y trouver sa place. L’Atelier des Sacqueboutiers offre aux talents en devenir un cadre professionnel, dans un ensemble reconnu, où ils peuvent évoluer soit seuls, soit à nos côtés, pour acquérir de l’expérience et une compétence spécifique dans le répertoire ancien, tout en se faisant mieux connaître.
Est-ce vous et Jean-Pierre Canihac qui assurez la direction de cet atelier ?
Au départ, oui, mais j’ai récemment pris les rênes de cette structure parce qu’elle est liée aux départements de musique ancienne du CRR de Toulouse et du CNSMD de Lyon, deux établissements où je suis toujours professeur alors que Jean-Pierre Canihac a pris sa retraite d’enseignant. C’est pour cette raison que j’ai pris seul la direction de l’Atelier des Sacqueboutiers.
Premières Ondes est une sorte de prolongement de l’Atelier des Sacqueboutiers : quelle est sa nature et quels sont ses objectifs ?
Premières Ondes est une forme de résidence à l’église du Gésu, le siège de notre association. C’est une porte ouverte, un tremplin et une mise en lumière pour de jeunes artistes talentueux qui sont l’avenir des Sacqueboutiers et de la musique ancienne en France. Durant cette résidence, les musiciens que l’on accueille travaillent ensemble pendant quatre jours. Nous les laissons d’abord travailler en groupe sur la définition de leur programme le premier jour, puis nous intervenons à partir du deuxième pour les coacher et les conseiller.
Même chose le troisième jour, le quatrième étant consacré aux ultimes répétitions, à une séance en présence de scolaires l’après-midi, pour finir par un concert public en soirée à l’église du Gésu. Ce concert de « sortie de résidence » est gratuit et ouvert à tous dans la limite des places disponibles. L’an dernier, lors de la première édition de Premières Ondes, nous avions reçu des élèves du CNSM de Lyon : la flûtiste à bec, joueuse de sacqueboute et tromboniste Claire-Ombeline Muhlmeyer et l’ensemble Tumbleweeds. Ils avaient proposé un programme de musique italienne, essentiellement vénitienne.
Les conseils que vous prodiguez aux musiciens accueillis à Premières Ondes concernent uniquement l’aspect musical ou vous leur apportez aussi l’expertise des Sacqueboutiers dans les domaines de la diffusion, de la production et de la communication ?
Notre apport dépasse en effet le seul aspect musical. Nous avons la chance d’avoir à l’église du Gésu notre équipe administrative et nous donnons aux musiciens en résidence la possibilité de travailler avec elle le premier jour pour apprendre à concevoir un programme, gérer des dossiers, faire une demande de subvention, appréhender le côté financier d’un projet et les démarches auprès des collectivités et des institutions culturelles comme la DRAC. Cela inclut bien sûr les domaines de la production et de la communication, indispensables à toute structure artistique, quelle qu’elle soit. Enfin, nous leur ouvrons aussi notre réseau de relations et notre carnet d’adresses qui se sont évidemment beaucoup étoffés depuis les près de cinquante ans qu’existe l’ensemble Les Sacqueboutiers.
Quels sont la jeune musicienne soliste et l’ensemble que vous avez invités cette année à Premières Ondes ?
Pour cette édition 2024, nous recevons Solveig Rousse, une de mes élèves au CNSM de Lyon. Elle joue de la sacqueboute et du cornet à bouquin, une double compétence instrumentale qui n’est pas commune. Solveig a créé une formation il y a quelques années, l‘Ensemble Transatlantique, très attachée aux musiques sud-américaines. Pendant la résidence, ils vont travailler sur un programme de musique espagnole et du Nouveau Monde qu’ils donneront en concert vendredi 3 mai à 20 h à l’église du Gésu.
La musique occidentale, à l’époque de la découverte des Amériques, y est mise en regard avec celle qui a été écrite en Amérique du Sud à partir de là, mélangeant tradition autochtone et contrepoint européen. Le programme de ce concert est conçu comme un périple en bateau, entre la péninsule ibérique et l’Amérique à travers l’Atlantique, ses grandes profondeurs et ses dangers. On y entend des œuvres d’Antonio de Cabezón, l’organiste du roi Philippe II, Francisco Guerrero, compositeur très connu de la Renaissance espagnole, ainsi que des pièces issues des archives de la cathédrale de Guatemala et du Codex Trujillo del Peru.
Qui sont les musiciens de l’Ensemble Transatlantique ?
Outre Solveig Rousse à la sacqueboute, l’ensemble est constitué de Teddy Danjean au cornet à bouquin, Rose Dehors à la sacqueboute et aux percussions, Marguerite Dehors au violon et Edurne Molina à l’orgue positif. Pour les besoins de l’événement, nous avons demandé à notre percussionniste Florent Tisseyre de les accompagner. Ce programme a également donné lieu à un partenariat avec la classe de sacqueboute du CRR de Toulouse, trois de ses élèves se joignant aux musiciens de l’Ensemble Transatlantique. La transmission est vraiment au coeur du projet Premières Ondes, c’est sa principale raison d’être.
Entretien réalisé par Éric Duprix
L’ Atelier des Sacqueboutiers • Premières Ondes