Le jeudi 28 mars, à la Halle à 20h, ce seront donc deux grands compositeurs de cette musique qui seront à l’affiche, Gabriel Fauré et César Frank. Du premier, on ouvre le concert avec Pelléas et Mélisande, suite d’orchestre, op. 80. Suivront cinq mélodies interprétées par la soprano Florie Valiquette, le ténor Julien Behr et le baryton Jean-Sébastien Bou.
En deuxième partie, une œuvre du second, disons, ressuscitée, Les Sept Paroles du Seigneur Jésus-Christ sur la Croix pour chœur et orchestre, interprétée par l’Orfeón Donostiarra dont le chef de chœur est José Antonio Sainz Alfaro. Les musiciens de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse et tous les interprètes sont placés sous la direction d’Ariane Matiakh.
Quelques mots concernant Ariane Matiakh, cheffe d’orchestre française
Née en 1990, polyvalence, musicalité, précision technique, mais surtout aussi naturel et passion contagieuse, tels sont les points mis en avant caractérisant son travail et sa personnalité. Fille de deux chanteurs d’opéra, elle grandit dans un environnement disons très favorable, et apprend toute jeune à jouer du piano. Elle étudie la direction d’orchestre à Vienne, où elle a notamment chanté sous la direction de Nikolaus Harnoncourt et Adam Fischer dans le célèbre Chœur Arnold-Schönberg. Sa formation par la suite auprès de Seiji Ozawa a forgé ses impulsions artistiques.
2005, elle acquiert ses premières expériences dans le domaine de l’opéra en tant que chef assistante à l’Opéra Orchestre de Montpellier auprès de quelques grands. Puis, ce sera Berlin, Stockholm, Amsterdam, Göteborg, Graz, Nice, Strasbourg et Halle. En 2009, elle est nommée “Révélation de l’année” aux Victoires de la musique, prestigieux prix français.
Le répertoire d’Ariane Matiakh s’étend aujourd’hui de nombreux opéras à un large éventail d’œuvres symphoniques et de ballets en passant par des créations modernes ou baroques. Elle est invitée pour diriger des formations musicales dites de premier plan. Pour une production de La Bohème elle est invitée au Royal Opera House de Londres. Depuis 2018, elle enseigne la direction d’orchestre au Conservatoire National de Paris. Ariane Matiakh est nommée Directrice musicale de l’Orchestre Philharmonique de Reutlingen (en Bade-Wurtemberg) à compter de la saison 2022/2023.
On ne détaillera pas de trop la vie de Gabriel Fauré que les mélomanes de la région connaissent peut-être un peu mieux que les gens du Nord ! puisque le compositeur est né à Pamiers, ville proche de Toulouse, et qu’il fut en son temps, récent, remis davantage en lumière grâce à une Association très efficace. Voilà plus de 25 ans en effet que sous l’impulsion alors de Jean Dardigna, président de l’association Les Amis de Gabriel Fauré, naissait le Festival dédié au célèbre pianiste et compositeur. Elle a démontré que, Gabriel Fauré, c’était le fameux Requiem d’accord, mais pas que. Et dans le panorama de la musique française XIXème, ce nom est bien en haut de l’affiche.
La mélodie orchestrée est un produit rare, et on comprend pourquoi. Accompagnée par un piano revient moins cher que par un orchestre, quel que soit le nombre de musiciens. D’où l’intérêt de retrouver ici cette rareté en concert, les mélodies orchestrées par Fauré pour quatre d’entre elles : Les Roses d’Ispahan, La Chanson du pêcheur ou Lamento, En prière et Clair de lune. La cinquième, Tarentelle est orchestrée par une autre figure réputée, André Messager. Très prolixe en ce domaine, sachons que Fauré a mis en musique trois recueils de Vingt mélodies chacun dans lesquels ont été puisées les cinq retenues pour leur orchestration, au-delà de leur accompagnement au piano.
L’ouverture du concert se fera avec Pelléas et Mélisande, suite d’orchestre op. 80 d’environ vingt minutes. La pièce débute par un Prélude, quasi adagio suivi de Fileuse, un andantino quasi allegretto. Viendra une Sicilienne, un allegro molto moderato qui implique une flûte solo. Puis Mélisande’s song, un lento et enfin Mort de Mélisande, un molto adagio. La conception d’ensemble de cette suite, sorte de musique de scène pour la pièce de Maurice Maeterlink, fut d’une telle extrême complexité avec rebondissements, plus le travail écarté puis repris par son élève Charles Koechlin, sans parler du passage formation “de chambre“ à la la grande formation symphonique, que nous n’en dirons pas davantage. Il y eut au tout début une version anglaise avec création au Théâtre Prince de Galles le 21 janvier 1898. Création à Paris le 3 février 1901 avec Prélude, Fileuse et Mort de Mélisande. Silicienne se rajoutera en 1909. Et La Chanson de Mélisande attendra 1936.
De César Frank, le surnommé familièrement Pater seraphicus, on a laissé souvent dans l’ombre des pans entiers de sa vie et de sa personnalité : né en 1822, l’enfance en Wallonie, l’installation difficile à Paris, le Paris des années 1840, la tyrannie paternelle du genre : Tu seras un pianiste virtuose mon fils !, les recherches incertaines de ses premières et nombreuses compositions faisant appel à la voix et à l’orgue, les plusieurs postes successifs occupés en tant qu’organiste dans les églises avant d’être nommé en 1858, organiste à Sainte-Clotilde dotée d’un orgue Cavaillé-Coll. Enfin, un poste de professeur d’orgue au conservatoire. Excellent pédagogue, il va réunir autour de lui la “bande à Frank“ où l’on retrouve, Duparc, d’Indy, Lekeu, Ropartz, Chausson, Pierné…De tempérament modeste et effacé, il n’est pas du genre à imposer ses œuvres et sera un compositeur dit tardif car il écrira des chefs-d’œuvre dans plusieurs domaines passés à la postérité alors qu’il approche la soixantaine, et au-delà jusqu’à sa mort à 68 ans. L’œuvre interprétée ici fait partie d’un pan conséquent de sa production en musique religieuse.
La méditation sur Les Sept Paroles de Notre Seigneur Jésus Christ sur la Croix a inspiré à travers les siècles jusqu’à aujourd’hui nombre de compositeurs : Schütz, Haydn, Gounod, César Franck, Tournemire… En effet, dès le Moyen Âge, l’Église passait commande aux musiciens pour l’Office du Vendredi saint.
Par exemple, quatre années seulement séparent deux compositions, mais un monde de style : celle de Charles Gounod (1855) est d’allure archaïque, sobre et sévère, alternant homophonie et imitation sur un type original de récitatif ininterrompu d’où surgissent occasionnellement quelques mesures d’arioso. César Franck, quatre ans plus tard, dans une œuvre de 42 minutes, plus de deux fois plus longue que celle de Gounod, passe du contrepoint palestrinien au grand opéra français. L’œuvre n’a jamais été jouée de son vivant. Elle a été redécouverte par l’Université de Liège en 1955 (le compositeur était belge et né à Liège). Au lieu de considérer l’histoire de la crucifixion, Franck a choisi d’interpréter musicalement les sept dernières paroles, ou thèmes, du Christ : Le pardon, le salut, la compassion, le dénuement, la détresse, la rédemption et l’obéissance à Dieu.
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Orchestre national du Capitole