Relatant la vie de Robert Oppenheimer, le nouveau film de Christopher Nolan est une réussite universelle et une piqure de rappel pour tous.
Etre Robert Oppenheimer n’a pas dû être facile tous les jours. Un film de Christopher Nolan n’est jamais linéaire d’un point A au B. Il y a plusieurs éléments de cinéma sur lesquels on pourrait débattre durant des heures : la vie de l’homme, la fabrication de la bombe, sa perception dans son propre pays et les conséquences qui en découlent.
Avec ce film, Christopher Nolan nous permet de comprendre la tension et l’urgence qui a été celle de Robert Oppenheimer. Fabriquer une arme dévastatrice avec les remords que cela implique, ou laisser l’Allemagne nazie le faire en premier. Le physicien comprend parfaitement les enjeux même si avec nos yeux contemporains, nous avons une longueur d’avance sur lui et connaissons l’horreur, les chiffres et les conséquences qu’ont eu ces bombes atomiques.
Le cinéma comme la littérature sont faits pour refléter une époque, des hommes et des paradigmes : ce film en est un bon exemple. Le cas selon lequel l’humanité aurait pu s’éteindre y est évoqué cliniquement : sans inquiétude profonde, avec un « risque zéro » qui n’existe pas, allons-y au petit bonheur la chance et tant pis si s’ouvrent les portes de l’enfer.
1945 n’est pas si loin et l’on a parfois peine à croire les réjouissances d’une telle arme qui, si elle a permis de « sauver des vies en arrêtant la guerre » en a pris tellement d’autres. Chacun se fera sa propre idée sur les motivations de l’époque, notre époque contemporaine trahissant une nouvelle fois notre jugement.
Comme souvent dans les films de Nolan, la musique est un élément essentiel, pour ne pas dire un personnage de l’histoire. La tension se ressent dans les moments clés, l’image et les couleurs n’y sont pas étrangères. On ne ressort pas indemne d’Oppenheimer, ce film nous ramène à notre condition d’humains, c’est à dire pas grand-chose en comparaison des atomes, de l’univers, de la physique quantique et de ce que nous sommes.
Pendant la guerre froide avait été instaurée l’horloge de l’apocalypse qui, souvent placée sur minuit moins 5, décidait symboliquement du moment où l’humanité allait s’embraser dans un déluge de feu. Le bouton nucléaire n’est pas un souvenir et Christopher Nolan met en avant un triste et amer constat : l’homme n’a pas son pareil pour détruire sa planète et ses semblables.