Jusqu’au 20 février, le Musée départemental de la Résistance et de la Déportation organise l’exposition « Combattre l’oubli : les objets en héritage ». L’objectif : rendre hommage aux objets, outils de l’Histoire, et aux donateurs, sans qui la Mémoire de la Seconde Guerre mondiale s’effacerait face à la disparition des témoins.
13 000, c’est le nombre d’objets conservés dans le fond patrimonial du musée. L’exposition prend pour mission de leur rendre hommage, plus que de suivre une problématique historique définie. Chacun d’entre eux renferment des histoires et rendent compte d’une société en guerre. Du papillon, en passant par l’uniforme, au journal ou à l’arme, chacun, en dehors d’un musée comme celui-ci, n’aurait pas d’intérêt particulier. C’est ce qu’Antoine Grande, directeur du musée, et ses collègues conservateurs, ont voulu mettre en avant dans cette exposition. Ces objets, par ce qu’ils renferment, ont une histoire à raconter.
Les motivations des donateurs : du souvenir familial au devoir patriotique
Mais avant d’arriver entre les mains des conservateurs du musée, les donateurs doivent trouver les raisons de donner ces héritages qui leur sont si chers. Ils sont conscients de leur devoir patrimoniale et entendent qu’ils ne sauraient conserver indéfiniment ces objets. Ils ont également peur de l’oubli, car les générations se succèdent et les souvenirs sont de moins en moins précis. La conscience d’un devoir collectif apparait, ils savent que s’ils conservent ces objets, la Mémoire disparaîtra avec eux. Car en faisant dialoguer ces fonds patrimoniaux entre eux, les organisateurs entendent sauver ces histoires, qui risquent de s’effacer avec la perte progressive des témoignages.
Les objets, alternatives des témoins disparus
Pour Antoine Grande, le sens de l’exposition est tout trouver : « montrer la mission de préserver le fragile, l’urgence et l’immatériel ». Alors que le temps des témoins touche à sa fin, et avec eux la prévention de ce que l’humanité peut faire de pire, il est nécessaire de trouver d’autres façons d’écrire l’Histoire. Pour le directeur du musée, les objets viennent emboiter le pas des témoins pour raconter une société en guerre. L’idée est alors de montrer un processus. Concernant la résistance, c’est celui qui débute dans la conviction intime avant d’arriver à un combat collectif. Ces motivations et organisations sont rendues tangibles, parce que les objets ont cette « fragilité, sensibilité et la force de s’inscrire dans le temps par leur matérialité ». Ainsi, derrière des tenues d’anciens déportés, il y a l’histoire de ceux qui ont souffert d’un régime totalitaire et qui en sont morts.
Contrer la falsification de l’Histoire et le négationnisme
L’objectif de l’exposition est aussi de contrer le négationnisme et la falsification, qui détruisent les histoires qui se cachent derrière ces objets. Pour Antoine Grande, le musée a pour mission de faire des liens entre passé et présent, tout en luttant contre les raccourcis historiques. L’exposition montre ainsi un processus, celui de l’organisation de la résistance, du refus des obscurantismes et du totalitarisme. Processus similaire aux mouvements que l’on pourrait retrouver dans notre siècle. Pour autant il précise que « chaque évènement s’inscrit dans son temps ». Même si la comparaison est pertinente selon-lui, il est indispensable de ne pas tomber dans des excès, jusqu’à la falsification de l’Histoire. Selon le directeur, le travail du musée n’est donc pas tant d’établir un discours scientifique, mais d’amener des preuves pour délégitimer de potentielles réappropriations et erreurs volontaires.
Les organisateurs de l’exposition tiennent donc à mettre au cœur de l’évènement une prise de conscience, celle d’une évolution entre l’ère des témoins et l’ère de la nouveauté. Pour ne pas oublier l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, ils montrent ces objets sans intérêt à première vue, mais si fondateurs pour l’écriture de l’Histoire. Car la discipline n’est pas à l’abris de la falsification et du remaniement volontaire, il est cher à Antoine Grande et aux conservateurs de mettre à disposition les preuves nécessaires pour rendre compte de l’histoire de ces visages rendus anonymes par le temps.