Au début des années 1980, le jazz ne se mariait plus avec la java comme l’appelait de ses voeux Clôde Nou-ga-ro, mais plutôt avec la pop, notamment dans la Perfide Albion. Les scies du moment s’appelaient notamment Fine Young Cannibals, Carmel, Joe Jackson (Jumpin’ Jive, Body & Soul), les Specials AKA (qui trempaient leur ska dans le jazz) et… Matt Bianco.
Bianco a été d’abord le guitariste des excellents Blue Rondo A La Turk (nom en hommage à Dave Brubeck) qui connurent un petit mais très éphémère succès. Leur pop jazzy virevoltante, mêlée d’exotica et de salsa, donna naissance à un superbe album, Chewing The Fat, qu’ils popularisèrent sur scène avec leurs costards échappés d’un film noir et leurs zoot suits (bientôt portés aussi par Kid Creole & The Coconuts – tiens, encore un groupe jazzy des 80’s).
Après le split de Blue Rondo, d’anciens membres du groupe (Mark Reilly alias Matt Bianco, le pianiste Dany White et le bassiste Kito Poncioni) formèrent, avec la choriste d’origine polonaise Basia Trzetrzelewska, le groupe Matt Bianco. Le premier album sortit chez WEA en août 1984 et fut un véritable carton dans de nombreux pays (des pays scandinaves à la France, de l’Italie aux USA, de la Suisse à la Nouvelle-Zélande).
« Get Out Of Your Lazy Bed », « Who Side Are You On ? », « Half A Minute », « More Than I Can Bear » furent autant de tubes, mérités, tant leur pop jazzy reposait sur de très bonnes compositions, aux harmonies réussies et étonnantes (la magnifique voix de Basia y était pour beaucoup), avec tour à tour une mélancolie diffuse et une langueur latino (qu’on retrouvera aussi dans les débuts de Sade) mêlés à des chansons taillées pour les clubs (« Get Out Of Your Lazy Bed » en est le parfait exemple).
Hélas, le deuxième album, Matt Bianco, sera moins bon, et Danny White et Basia quitteront le groupe après la tournée (qui passa d’ailleurs par le Palais des Sports de Toulouse le 20 mars 1986 – pas le concert du siècle dans ma mémoire…).
Le vénérable label londonien Cherry Red a réédité le premier album (à avoir dans sa discothèque !) et sort également ces jours-ci des remixes et inédits courant sur toute la carrière du groupe, y compris la période dispensable post-Basia et White. Il y a de belles versions allongées pour les clubs qui feront les délices des aficionados du groupe et autres nostalgiques à barbe blanche…
Basia, quant à elle, poursuivit une carrière solo, accompagné de son boyfriend Danny White, avec notamment un très bon premier album, Time And Tide. Les trois compères se retrouveront en 2004 pour l’excellent Matt’s Mood qui renouait miraculeusement avec la magie des débuts.
Matt Bianco illustre cette époque où l’industrie du disque était florissante, et pouvait parfois allier talent et succès commercial.
Albums disponibles ici : https://www.cherryred.co.uk