Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Heat de Michael Mann
Un peu plus de vingt-cinq ans après sa sortie, Heat possède déjà la patine d’un classique. Avec son cinquième long-métrage, Michael Mann a réécrit les codes du film noir et livré une œuvre-maîtresse souvent copiée, jamais égalée ni dépassée. Heat sort donc en 1995 et réunit pour la première fois deux acteurs de légende : Robert De Niro et Al Pacino, qui avaient certes tourné dans Le Parrain II de Coppola, mais sans avoir de scène ensemble. On ne peut pourtant réduire ce polar de deux heures cinquante au désormais mythique face à face de sept minutes entre le duo iconique dans une cafétéria. Car Heat n’est pas un simple « film de stars ». En témoigne notamment le soin apporté par Mann à son casting à travers une kyrielle de seconds ou troisièmes rôles remarquables : Val Kilmer, Tom Sizemore, Jon Voight, Ashley Judd, Natalie Portman, Diane Venora, Amy Brenneman, William Fichtner, Danny Trejo…
Et la nuit seule entendit leurs paroles
L’histoire est simple, presque banale. A Los Angeles, une bande braqueurs de haut vol est prise en chasse par un flic obsessionnel, Vincent Hanna (Al Pacino) dont la vie personnelle part à vau-l’eau. A la tête des gangsters : Neil McCauley (De Niro). Sa présence féline et minérale évoque un héros de Jean-Pierre Melville, en particulier par la phrase « Je suis seul, pas solitaire » faisant écho au « Je ne perds jamais, jamais vraiment » de Jef Costello / Alain Delon dans Le Samouraï. L’inspecteur, quant à lui, est hanté par la présence des morts. Il n’a plus d’illusions sur la nature humaine même s’il peut respecter certains de ceux qu’il traque.
Heat est l’œuvre d’une vie pour Michael Mann qui s’attela au scénario des années durant avant d’en réaliser une première version avec le téléfilm L.A. Takedown en 1989. Film d’action et poème mélancolique, Heat mêle une tension extrême à la latence de scènes intimistes et familiales. Le cinéaste filme la beauté nocturne et magnétique des villes, une solitude très contemporaine ou la tentation de la fuite avec une grâce égale. Les ressorts d’une tragédie antique se mettent en place. Les protagonistes – déchirés entre la rationalité froide du professionnel et leurs passions – se retrouveront pour un ultime face à face. Rendez-vous attendu et pourtant bouleversant qui aurait pu donner un autre titre à ce chef-d’œuvre : Et la nuit seule entendit leurs paroles.
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