Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir
Citizen Kane d’Orson Welles
Peut-on trouver mieux que ce film souvent considéré comme le plus important de l’histoire du cinéma pour débuter cette série ? Orson Welles, comédien, homme de théâtre et de radio, a alors vingt-cinq ans lorsqu’il se lance dans la réalisation de son premier long-métrage qui sort aux Etats-Unis en 1941. Il interprète également le rôle principal et coécrit le scénario avec Herman J. Mankiewicz (voir à ce sujet le film Mank de David Fincher sorti en 2020). L’histoire ? A la mort de Charles Foster Kane, un magnat de la presse américain dont la carrière politique se solda par un échec, un journaliste enquête sur lui et sur le dernier mot que prononça Kane sur son lit de mort : « Rosebud ».
Dès ses débuts de cinéaste, Welles révolutionne le langage cinématographique. Il n’invente pas les procédés qui font la signature stylistique et formelle de l’œuvre (flashbacks, plongées et contreplongées, profondeur de champ, longs travellings…), mais les renouvelle totalement. Biopic d’un personnage imaginaire librement de personnages réels, parmi lesquels Randolph Hearst et Howard Hughes, Citizen Kane est une succession d’images inédites, magnifiées par la photographie en noir et blanc de Gregg Toland et le montage du futur cinéaste Robert Wise.
Et « Rosebud » dans tout ça ?
Influencé notamment par l’expressionnisme allemand ou par la littérature pour sa narration éclatée, le film est pourtant totalement singulier, fait fusionner la forme et le fond, se nourrit d’une foi incandescente dans la force du cinéma. L’invention, l’audace, le génie éclabousse chaque plan. On n’oublie pas la qualité exceptionnelle de l’interprétation. Outre sa propre composition dans le rôle-titre, aussi convaincante dans la jeunesse que dans la vieillesse du personnage, Welles a pioché au sein de la troupe de théâtre qu’il avait créée et offre à Joseph Cotten son premier rôle.
D’autres chefs-d’œuvre inoubliables comme La Splendeur des Amberson (1942), La Dame de Shanghai (1947) ou La Soif du mal (1958) accompagneront la carrière de Welles metteur en scène contrariée par les studios hollywoodiens, mais Citizen Kane brille d’un éclat particulier et nous persuade que le cinéma peut tout se permettre. Au fait, que signifiait donc « Rosebud » ? On laisse les chanceux qui n’auraient pas encore vu le film le découvrir…