Le grand pianiste polonais Krystian Zimerman est un perfectionniste qui ne laisse jamais rien au hasard. Econome de ses apparitions, il ne donne qu’une cinquantaine de concerts chaque année. Depuis quelques temps, il tient à régler lui-même son piano, un instrument avec lequel il voyage afin de ne pas se laisser surprendre par les moindres conditions locales. A l’invitation des Grands Interprètes il ouvrira à la Halle-aux-Grains de Toulouse la nouvelle saison musicale le 9 octobre prochain.
La carrière internationale de cet artiste exigeant démarre brillamment lorsqu’il remporte, en 1975 à l’âge de 18 ans, le premier prix du prestigieux Concours Chopin de Varsovie. Cette victoire précoce ne le précipite pas dans le grand circuit des concerts. Bien au contraire, il entame alors une sorte de retraite intérieure afin d’enrichir son répertoire. Même s’il construit ce répertoire autour de l’œuvre de Chopin, Krystian Zimerman possède une connaissance approfondie de toutes les musiques. Outre le grand répertoire romantique, il s’intéresse à la musique américaine et aux productions contemporaines. Witold Lutoslawski lui a dédicacé un concerto, qu’il a créé au festival d’automne de Varsovie, sous la direction même du compositeur. Le récital, le concert avec orchestre, mais aussi la musique de chambre suscitent également son intérêt. En tant que chef d’orchestre lui-même, il a notamment enregistré les deux concertos de Chopin, en dirigeant l’orchestre depuis le piano.
Krystian Zimerman a choisi pour son récital toulousain un programme ouvert sur les grands compositeurs qu’il affectionne. De Bach à Brahms en passant par Chopin, il parcourt trois étapes musicales fondamentales.
La Partita n° 1 en si bémol majeur, de Johann Sebastian Bach, ouvrira le concert. Les Partitas pour clavier sont un des trois groupes de six suites pour le clavecin (à côté des Suites anglaises et des Suites françaises). Cette première partita, parue en 1726, est considérée comme un exercice pour le clavier. Les mouvements qui la composent (Praeludium, Allemande, Corrente, Sarabande, Menuet I, Menuet II, Gigue) évoquent également le monde de la danse.
De Johannes Brahms, Krystian Zimerman jouera ensuite les Trois Intermezzi op. 117, composés en 1892 et qualifiés par le critique de l’époque Eduard Hanslick comme des « monologues ». Bien qu’il considérât les trois Intermezzi comme des « berceuses », Brahms en refusa officiellement le titre : « Il faudrait alors mettre ‘Berceuse d’une mère malheureuse’ ou d’un célibataire inconsolable ».
La Sonate n° 3 de Frédéric Chopin conclura le concert. Elle a été écrite près de 5 ans après la sonate précédente, durant l’été 1844, alors qu’il était en villégiature à Nohant-Vic, avec George Sand. Elle apparaît à la fois comme la plus aboutie, la plus monumentale, et celle qui représente le mieux le « style » Chopin.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse