Non, ce n’est pas d’Aïda dont je vais vous parler mais d’une jeune cantatrice née aux pieds des plus fabuleux monuments de l’Antiquité, les pyramides du Caire. C’était il y a tout juste trente ans. Aujourd’hui, Fatma Said, après des études en Allemagne, commence une carrière internationale qui lui a déjà ouvert, excusez du peu, les portes de la Scala de Milan ainsi que celles non moins prestigieuses du Royal Opera House Covent Garden de Londres.
Se produisant particulièrement dans un répertoire classique où l’on croise Mozart et Haydn, Fatma Saïd s’est déjà faite une réputation de concertiste hors pair aussi bien dans le répertoire de sa langue natale, qu’en français, en espagnol, en allemand et en italien. Sa voix de soprano lyrique, parfaitement homogène, distillée avec un contrôle et une longueur de souffle phénoménaux, une musicalité étourdissante d’émotion et une prosodie parfaite, se pare bien sûr du soleil chatoyant de ces pays que baigne la Méditerranée.
C’est Warner qui lui offre son premier album en 2020. Elle a voulu en faire une sorte de manifeste musical franco-hispano-arabe. Accompagnée, et de quelle manière, par le pianiste Malcolm Martineau, le guitariste Rafael Aguirre ou encore tout un ensemble de musiciens arabes, Fatma Saïd a réuni sur cet album aussi bien Ravel que Falla, Serrano, Obradors, Berlioz, Gaubert, Bizet, Garcia Lorca et, pour finir, des compositeurs de son pays natal. Dire que l’on tombe immédiatement sous le charme de cette voix sensuelle n’est pas suffisant, même si cela est vrai.
Très rapidement on entend une intelligence du texte et de la musique qui ferait presque oublier des interprétations de référence. Peu importe, l’essentiel n’est encore pas là. Il est dans ce moment sublime, dans le sens premier du terme, en apesanteur si l’on peut dire, que l’on vit à l’écoute de ce disque, un moment pétri de musique et d’émotion qui vous pénètre inexorablement sous la force d’un sortilège irrésistible. Cet album n’est pas intitulé El Nour (La Lumière) par hasard.
Faites-en l’expérience.
Robert Pénavayre
une chronique de ClassicToulouse