D’origine bretonne, Delphine Josse est depuis plus de 10 ans créatrice de robes minimalistes, simples et élégantes à Toulouse. Robes de mariée, robes de cocktail et petites robes noires sont à l’honneur au 9 Place Saintes Scarbes et sur son e-shop. Artisane et artiste, Delphine aime écrire, crayonner l’élégance d’une ligne d’une robe qui évince tout superflu en grignotant du chocolat, créer, créer, créer …
Confinée chez elle, elle guette l’heure où elle pourra réintégrer sa jolie boutique-écrin et se laisser inspirer sur le chemin par la ville et ses propres pensées. Poétique et heureuse de se laisser dévorer par les affres de la création, Delphine se raconte avec de jolis mots qui seront peut-être à l’origine d’une nouvelle collection aussi élégante qu’audacieuse : « Je suis cyborg manga et wonderwoman. Je plonge dans le “noir-lumière” de Soulages. Je contemple la beauté d’Ophélie. J’arpente les jungles du Douanier Rousseau. Je crée pour les mille femmes que nous incarnons. Vous, mes princesses, mes amazones, mes héroïnes ! »
C’était comment la vie avant le COVID ?
A mille à l’heure ! Je travaillais tout le temps, même le soir et le week-end, tout en m’occupant de ma petite famille. Alors, c’est sûr que de travailler 60 heures par semaine pour lancer sa marque ça finit par payer, mais le premier confinement à été l’occasion de ralentir et s’était vraiment nécessaire !
Une journée avec vous ça ressemble à quoi ?
Heureusement, pour notre équilibre, mon fils va à l’école, il s’amuse, voit ses copains et apprend pleins de chose, nous faisons aussi beaucoup de loisirs créatifs, des costumes, de l’aquarelle et des châteaux forts et camions de pompiers ! C’est fou ce qu’on peut faire avec du carton et un pistolet à colle !!
Du coup, j’ai du temps pour travailler sur la communication de ma marque, améliorer mon site internet, booster l’e-shop DELPHINEJOSSE.COM, créer de nouveaux produits pour Noël et me plonger dans la création des collections futures, ma partie préférée ! Je passe régulièrement à la boutique pour arroser les plantes, réfléchir à la décoration de Noël avec mon mari, rencontrer un journaliste, livrer mes clientes… J’ai la chance d’être très soutenue par ma communauté et mon réseau ! C’est grâce à eux, à vous, que je sais que ma petite entreprise va rebondir encore une fois ! Nous avons aussi adopté une petite chienne, YUMI, toute noire, toute mignonne. On en avait très envie mais on s’en privait en se disant qu’on n’avait pas le temps. Finalement le temps, on le prend et ça fait un bien fou !!! J’essaie de cuisiner de bons petits plats avec des produits de préférence locaux et aussi de commander du bon vin à mes amis cavistes qui viennent d’ouvrir leur boutique non loin de la mienne, c’est important de se faire plaisir et de les soutenir !
Comment vivez-vous le confinement ?
Ça dépend des jours, lorsque je passe à la boutique, j’ai à chaque fois le cœur serré de refermer et de repartir. Et puis dès que j’ai des mots doux et des commandes de mes clientes, ça me booste. J’ai mis beaucoup d’énergie dans le développement de ma marque, ça influe beaucoup sur mon humeur. Après j’aime bien être chez moi avec ma famille, on est très fusionnel et on aime passer du temps ensemble même si voir les amis et les autres membres de ma famille me manquent terriblement. Et puis, n’oubliez pas, il y a le chocolat !
Comment expliqueriez-vous le COVID à un enfant ?
Et bien notre fils à 5 ans et demi et on lui a expliqué que le covid était une sorte de gros rhume qui peut rendre très malade. Chacun prend soin de soi et des autres . Après nous avons déjà, à cause des épreuves de la vie, parlé de la mort et de la maladie, il sait que parfois si on est très malade, on peut mourir, mais c’est plus rare quand on est jeune. Donc il a compris qu’il faut faire attention. Il accepte très bien de porter le masque lorsque je lui demande, si on est obligé d’aller ensemble dans un magasin. Dès le début de l’épidémie, il m’a vu coudre beaucoup de masques et il a joué les modèles pour le format enfant. Il me dit qu’il en a marre du Covid , que c’est nul, surtout au premier confinement qui était très strict et très pénalisant pour les enfants. Ce deuxième confinement ne change pas grand chose pour lui, nous avons décidé de garder le même rythme comme si nous travaillions à l’extérieur.
Et à un adulte ?
Je pense que chacun s’informe via les médias de son choix et fait ses propres choix qui je l’espère seront les bons et dans l’intérêt collectif.
Qu’est-ce qui vous manque le plus ?
Ma boutique. Voir ma famille et mes amis. Être libre de me balader où je veux quand je veux ! Porter du rouge à lèvres !!!
Qu’est-ce qui ne vous manque pas ?
Le rythme de travail que j’avais mis en place avant le confinement, ralentir et profiter c’est bien aussi, même si je travaille toujours beaucoup, j’ai arrêté les soirs et je bosse un peu moins le week-end ou je les réserve à la création.
De quoi avez-vous peur aujourd’hui ?
D’être reconfinée régulièrement, deux mois par ci , trois mois par là pendant plusieurs années….et que mes proches meurent. J’ai peur aussi qu’au lieu d’être solidaires, cette épreuve ne nous divise encore plus. La peur fait apparaître la nature profonde des gens et c’est pas toujours joli joli. J’ai peur de plus d’individualité, plus d’égoïsme…
Comment voyez-vous votre avenir ? Et celui de l’humanité ?
Après la colère, l’incompréhension , viendra la résilience comme dans toute épreuve. J’espère qu’il y aura une belle prise de conscience : la nécessité de consommer plus local, de valoriser et conserver nos beaux savoirs faire français, de soutenir son prochain, d’être solidaire, de vivre juste ensemble. Pour tous ceux dont la réflexion penchait dans ce sens , cette épreuve sera un accélérateur. Et puis il y a ceux qui s’en moquent et qui s’en moqueront encore plus… J’aime à croire que nous pouvons avoir une action, un pouvoir en local. Acheter lorsque c’est possible, aux commerçants de notre quartier, aux producteurs de notre région, faire travailler notre voisin, c’est plus malin. Et pour cela nous n’avons pas attendu la pandémie pour être solidaire avec la création en 2018 de notre association les ESPACES de la mode toulousaine et occitane qui fédère des entrepreneurs de la mode de notre région. Notre association relève de l’économie sociale et solidaire. Grâce à la somme des expériences de nos adhérents, nous avons une vision de ce que peut être le marché du secteur créateur de mode à Toulouse et en Occitanie. Notre association permet plus d’échange, d’entraide, elle est apporteuse d’affaires, de bons plans, elle à aussi une mission de conseils et ressources pour les porteurs de projet et les autres associations. Alors, il y a encore de l’espoir ? Eh bien je l’espère… J’espère vraiment que nous serons à la hauteur du défi. Cela ne sera pas parfait, mais nous grandirons ensemble.
Un livre : « Madeleine Vionnet, ma mère et moi » de Madeleine Chapsal.
Un morceau de musique : « Wait a minute » de Willow Smith, mon son du moment.
Un film : « Le cinquième élément » de Luc Besson, 23 ans après, je suis toujours aussi fan !
Une série: «Drop dead diva»
Un mantra : « le mieux est l’ennemi du bien »
Retrouvez les robes minimalistes de Delphine JOSSE et l’association EMTO ESPACE N°9 Place Saintes-Scarbes 31000 TOULOUSE
Entretien réalisé par Karine Satragno