L’Orchestre national du Capitole de Toulouse poursuit sa saison à la Halle aux Grains, avec la retransmission en ligne d’un concert dirigé par Fabien Gabel qui met à l’honneur le répertoire français et invite le pianiste Bertrand Chamayou.
Fabien Gabel © Stéphane Bourgeois
Malgré l’absence de public en raison du confinement, la saison de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse se poursuit à la Halle aux Grains, avec la retransmission en ligne de certains concerts qui se tiendront comme prévus. Ainsi, le concert dirigé par Fabien Gabel (photo), avec le pianiste Bertrand Chamayou, sera diffusé en direct de la Halle aux Grains sur les pages Facebook et Youtube de l’ONCT, notamment. Né à Paris en 1975 et directeur musical de l’Orchestre symphonique de Québec depuis 2012, Fabien Gabel brille particulièrement dans l’interprétation du répertoire français. Le programme qu’il dirigera à Toulouse est constitué de trois œuvres de musique française traversées par une vigoureuse énergie, celle de la danse: le Deuxième concerto pour piano de Saint-Saëns, « la Valse » de Ravel, la deuxième Suite pour orchestre tirée du ballet « Bacchus et Ariane » de Roussel.
On entendra le Deuxième concerto de Camille Saint-Saëns dans l’interprétation du pianiste toulousain Bertrand Chamayou. La partition fut écrite en 1868, en dix-sept jours, à la demande d’Anton Rubinstein qui souhaitait diriger à Paris une œuvre nouvelle dont le compositeur serait le soliste. Créé le 13 mai de la même année, à la salle Pleyel, ce Deuxième concerto reçut alors un accueil mitigé: «Sauf le Scherzo, qui plut du premier coup, [le concerto] réussit peu ; on s’accorda à trouver la première partie incohérente et le final tout à fait manqué», raconta Saint-Saëns. L’œuvre connut pourtant rapidement le succès, jusqu’à devenir un temps le concerto le plus célèbre avec celui d’Edvard Grieg. Il se caractérise par un lyrisme soutenu et une dynamique constante, un matériau thématique séduisant et contrasté, et une écriture soliste virtuose sans être clinquante. Sa grande originalité est d’être dépourvu de mouvement lent: évoluant du modéré au rapide, de la gravité à la légèreté, il débute par un «Andante sostenuto» qui s’ouvre et se clôt par une cadence pianistique, fausse improvisation dans le style de Johann Sebastian Bach ; ce premier mouvement est enchaîné à un bref «Allegro scherzando» rappelant le Scherzo tout en staccato du « Songe d’une nuit d’été » de Felix Mendelssohn ; le concerto s’achève sur un «Presto» effréné et étincelant en forme de tarentelle.
Bertrand Chamayou © Marco Borggreve
Fabien Gabel dirigera également « la Valse », de Maurice Ravel, lequel était fasciné par le genre de la valse. Débutée en 1906, la composition de cette pièce ne sera achevée qu’en 1919. Entre ces deux dates, il écrit pour le piano, en 1911, les sept « Valses nobles et sentimentales » tissées de contrastes fulgurants et dotées d’un langage à la subtilité extrême. Considérée par Ravel comme «la plus caractéristique», la septième annonce « la Valse » à venir. En guise d’argument, le compositeur a inscrit en tête de la partition de « la Valse »: «Des nuées tourbillonnantes laissent entrevoir, par éclaircies, des couples de valseurs. Elles se dissipent peu à peu: on distingue une immense salle peuplée d’une foule tournoyante. La scène s’éclaire progressivement. La lumière des lustres éclate. Une cour impériale vers 1855». Il rejetait toute interprétation en lien avec la Grande Guerre et la chute de l’Empire austro-hongrois, précisant: «J’ai conçu cette œuvre, comme une espèce d’apothéose de la valse viennoise, à laquelle se mêle, dans mon esprit, l’impression d’un tournoiement fantastique et fatal.» Commanditaire de ce poème chorégraphique pour orchestre, Serge de Diaghilev refusa cette musique pour les Ballets Russes de Paris: «C’est un chef-d’œuvre, mais ce n’est pas un ballet. C’est la peinture d’un ballet», lança-t-il à Ravel.
On entendra enfin la deuxième Suite tirée du ballet « Bacchus et Ariane », composé en 1930 par Albert Roussel pour une chorégraphie de Serge Lifar. Musique d’une grande sensualité, aussi vivante que raffinée, cette œuvre de la maturité du compositeur fut créée par l’Orchestre de l’Opéra de Paris en 1931. Signé Abel Hermant, l’argument puise dans la mythologie romaine: Bacchus, dieu du vin et de la fête, s’éprend et enlève Ariane, princesse de Crète – dont le fil permit à Thésée de s’échapper du labyrinthe. Les deux suites pour orchestre conçues par Roussel découlent chacune d’un acte du ballet. Elles ont été créées par l’Orchestre symphonique de Paris, la première sous la direction de Charles Munch en 1933, la seconde l’année suivante, sous la direction de Pierre Monteux.
La deuxième suite est la plus spectaculaire des deux. Elle est découpée en sept mouvements : Ariane dort puis se réveille (Andante) ; Pantomime où Ariane après la surprise tombe dans le désespoir, elle veut se précipiter dans la mer mais Bacchus surgit et la rattrape dans ses bras (Adagio) ; Scherzo où Bacchus danse seul (Allegro) ; Le baiser de Bacchus qui génère la vie sur l’île de Naxos, suit l’enchantement dionysiaque, le Thiase défile sur un allegro deciso, une faune et une ménade tendent une coupe de jus de vigne à Bacchus et Ariane (Andante) ; Ariane boit le breuvage puis danse et attire Bacchus (Andante) ; Danse d’Ariane et de Bacchus entrainant avec eux le Thiase (Moderato pesante) ; Bacchanale finale, Bacchus couronne Ariane d’astres dérobés aux constellations (Allegro brillante).
Concert retransmis sur les pages Facebook et Youtube de l’ONCT,
en direct de la Halle aux Grains, samedi 14 novembre, 18h00.