» Le spectacle vivant, c’est celui où l’acte scénique est vierge, même répété «
René Char Avignon 1947
Depuis quelques années, chaque fin de saison (printemps, été, automne, hiver), je vous fais partager mes coups de coeur pour la suivante.
En raison de la crise sanitaire que nous traversons, ceux du printemps ont été annulés, comme la totalité des concerts et des représentations théâtrales ou chorégraphiques, (sans parler des accès aux Musées et aux cinémas) jusqu’à nouvel ordre, conformément aux directives gouvernementales.
Comme vient de le déclarer le philosophe André Comte-Sponville: « Vivement que cette pandémie trouve son terme, mais j’ai peur que l’amnésie, et le rebond consumériste (que je redoute) ne tirent aucune leçon de tout ce qui a été subi et de ce qui était un signal d’alarme ».
Restent en effet de grandes inquiétudes pour l’avenir des spectacles vivants, au delà de celles économiques légitimes au premier chef. Ils ne devraient pas être les laissés pour compte de cette « guerre » ainsi que l’a qualifié le président français.
Certes, il faut que les économies repartent, mais elles repartent toujours après les guerres, ce qui enrichit les uns et appauvrit les autres (bien plus nombreux) ; il n’y a pas besoin d’être historien pour le savoir.
Mais le prix à payer, par la Culture en général, risque d’être exorbitant ; et les spectacles vivants d’en faire les frais.
D’abord les petites compagnies sans feu ni lieu, celles qui prenaient le risque, par exemple, de se brûler les ailes dans le Festival off d’Avignon pour trouver des dates de diffusion. Ensuite les petits groupes de musique sans subventions.
Même les structures qui ont « pignon sur rue » mais ne fonctionnent qu’en accueillant du public ne pourront continuer sans les régisseurs de l’ombre, souvent intermittents.
Le président a promis que les indemnités de ceux-ci seraient prolongés (pour ceux qui avaient fait leur quota de 507 heures) d’un an: espérons qu’il tiendra parole; « verba volant, scripta manent », disaient les Romains, « les paroles s’envolent, les écrits restent »…
J’ai déjà vécu plus de quarante années, à titre personnel mais aussi en tant qu’amateur passionné, la grande aventure des spectacles vivants, et j’espère qu’elle va repartir ; mais je souhaite que ce ne soit pas au prix d’un retour en arrière, d’une régression.
Quand je me suis passionné pour la musique et le théâtre au milieu des années 60, il n’existait pas un statut d’intermittent (1) comme celui d’aujourd’hui pour les artistes des spectacles vivants; les comédiens et les musiciens avec qui j’ai travaillé à cette époque fonctionnaient à la recette, avec un minimum garanti partagé avec les organisateurs suivant un pourcentage de 60/40% ou 80/20%, couvrant, si possible, les frais engagés. Nombreux étaient les artistes qui vivaient encore la bohême, se contentant de pates et de riz à de nombreux repas.
Ce qui dure un temps, comme la superbe chanson d’Aznavour, mais ne permet pas d’envisager un avenir…
Je me souviens aussi qu’une majorité de l’opinion publique n’était pas choquée outre mesure par cet état de fait : « après tout, ils s’amusent, ils n’ont qu’à faire un métier sérieux ». Nous étions encore considérés comme des saltimbanques…
L’embellie est venue au début des années 80 ; il était temps (malgré les abus qu’attire toujours une pluie de subventions après des décennies de disette).
De même que nous devons être vigilants pour que l’état d’exception actuel ne devienne pas la norme et ne justifie pas des dérives autoritaires, nous devons l’être aussi pour que l’on n’en revienne pas à ce moyen âge de la Culture : ce serait inadmissible dans un état civilisé.
Le grand Jean Vilar, chantre du Théâtre populaire, victime collatérale des extrémistes de Mai 68, affirmait haut et fort que « la Culture, c’est comme l’eau, le gaz, l’électricité (j’ajouterai la santé), un service public ».
Nous sommes nombreux à penser que ce n’est pas une utopie.
Une fois les blessures de la pandémie pansées, il faudra veiller à ce que les spectacles vivants n’en soient pas les victimes collatérales.
« Parce qu’il a conscience, l’homme est un animal malade » écrivait Miguel de Unamuno (grand philosophe espagnol victime du Franquisme (2), mais la politique de l’autruche est toujours criminelle pour les générations à venir.
Avec l’annonce du déconfinement (relatif), quelques messages nous font cependant un peu chaud au cœur à Toulouse.
Odyssud
Emmanuel Gaillard, Directeur d’Odyssud, fermé depuis un mois et demi, au nom de toute son équipe, a envoyé sur les réseaux sociaux un message d’espoir :
« A ce jour, et c’est une très bonne nouvelle pour vous comme pour les artistes, nous avons réussi à reporter la quasi-totalité de ces spectacles sur la saison 20-21, (en particulier ceux dont je me réjouissais, Via Lusitana par Scandicus, Le Messie de Haendel par l’Ensemble Baroque de Toulouse, Mediterraneo par la Cappella Mediterraneo etc., et bien d’autres) qui seront donc reprogrammés à la fin de l’année 2020 ou bien au début de l’année 2021…
Nous vous demandons de conserver précieusement vos billets : ils resteront valables pour ces dates de report. Si toutefois ces nouvelles dates ne vous convenaient pas, vous pourrez demander à les changer à partir de septembre, ou bien à en demander le remboursement…
Et il ajoute :
Comme beaucoup d’autres secteurs, le monde du spectacle vivant est durement impacté par la crise sanitaire et économique. Si vous souhaitez être solidaire de notre secteur, et si vous en avez la possibilité, vous pouvez décider de soutenir Odyssud en renonçant au remboursement d’un ou de plusieurs de vos billets. Ce don permettra notamment de soutenir l’emploi des professionnels du spectacle vivant ; c’est ainsi que la ville de Blagnac a décidé de rémunérer normalement les techniciens intermittents programmés sur les spectacles annulés de mars et d’avril 2020…
La Pause Musicale
La Pause Musicale ne reprendra pas en mai et juin à la Salle du Sénéchal ; les organisateurs vous y donnent rendez-vous dès le premier jeudi de septembre et, afin de pouvoir écouter les artistes qui n’ont pu y venir du 15 mars à fin juin, ils vous proposerons des concerts en plus en octobre et novembre, certains vendredis.
Le Vélo musical, la balade cyclo musicale entre Montech-Finhan-Montech, entre devrait avoir lieu le dimanche 16 juin, avec en particulier Serge Lopez et Jean-Luc Amestoy ; qui seront aussi des Pianos à Pompignan devant reprendre les 1e et 2 août prochain.
Le jeudi 1erseptembre à 18h, le Jardin musical de Bouloc accueillera une Festa colombiana. Et le Jardin musical de Toulouse aura lieu au Jardin du Musée Georges Labit (un havre de paix et de rêverie à visiter de toute urgence si vous ne l’avez déjà fait) les 12 et 13 septembre..
Toutes les conditions d’hygiène et de sécurité étant bien sûr respectées;
Acceptons-en l’augure: ces concerts nous feront chaud au coeur comme d’habitude, mais nous en avons encore plus besoin…
https://lecatalogue.jimdofree.com/contact/
Les Passions
Les Passions ont du annuler en particulier la création de l’Opéra occitan Daphnis et Alcimadure, une pastorale de Mondonville, prévue cet été au festival Radio France de Montpellier… Un grand regret : je m’en faisais une fête après leur Noël occitan, Cantem Nadal, de belle mémoire.
A ce jour, voici les seuls reports prévus :
Le concert Mozart du 23 avril est reporté au 29 septembre à St-Pierre des Cuisines à Toulouse, dans le cadre de la saison des Arts Renaissants.
Le concert solidaire du 27 mars aura lieu le 20 novembre à La Muse à Bressols dans le cadre de la soirée « SOS Méditerranée ».
Salle Nougaro
La Salle Nougaro a réussi à reporter la majorité des spectacles annulés, dont Sarah McCoy, reporté au 17 septembre 2020, et Melissa Laveaux, reporté au 10 octobre 2020, qui faisaient partie de mes coups de cœur.
Les billets achetés pour une des dates reportées restent valables et pourront être remboursés si la date ne vous convient pas, Dans ce cas, merci d’en faire la demande dans les deux mois.
Musique en Dialogue aux Carmélites
Samedi 29 et dimanche 30 août, dimanches 13 et 27 septembre 2020
Chapelle des Carmélites, 1 rue du Périgord. Toulouse
« LES BMAJEURS » – Bach, Beethoven,Berlioz, Bach
En la ravissante Chapelle des Carmélites, joyau du patrimoine toulousain, trois des plus riches époques de la musique -baroque, classique, romantique- sont déclinées à travers le portrait de leurs grands représentants réunis ici par la lettre B.
Ce ne sont pas des illustrations littéraires mais bien des pages de l’existence de ces musiciens où les notes mariées aux mots donnent un sens particulier à cette édition qui offre trois créations et un succès déjà reconnu.
Et, pour la première fois ici, un spectacle où le langage n’est pas vocal mais corporel, où les danseurs dialoguent avec le violoncelle, le Hip Hop en harmonie avec les Suites de Bach, danses brillantes et intenses.
Samedi 29 août à 16h : BACHen famille– Tempéraments Bach –CRÉATION
Musique : JSB et ses fils : Johann Sebastian (1685-1750),
Wilhelm Friedemann (1710-1784), 1erfils, (sur 20 enfants),
Carl Philipp Emanuel (1714-1788), 2èmefils,
Johann Christoph Friedrich (1732-1795), 3èmefils (16èmeenfant)
Johann Christian (1735-1782), 18èmefils (et dernier)
Ensemble FILIGRANE
Étienne Mangot,violoncelle & viole de gambe
Franck Marcon, clavecin
Laurent Montel,comédien
Dimanche 30 août à 16h : BERLIOZ Hector– Eternelle Estelle – CRÉATION
Musique : Hector Berlioz (1803-1869)
Transcription :Julien Costa
Textes : Philippe Hussenot à partir d’extraits des Mémoires d’Hector Berlioz, Édition Michel Austin
Sarah Laulan, contralto
Sandrine Tilly, flûte
Sébastien Llinarès, guitare et transcription
Philippe Tribot, violoncelle
François Castang, récitant
PROGRAMME :extraits de la Symphonie fantastique, Les nuits d’été, Rêveries et Passions,
La Romance d’Estelle, Les Troyens (mort de Didon)
Dimanche 13 septembre à 16h30 : vanBEETHOVENLudwig
Looking for Beethoven – ÉVÉNEMENT
Musique : Ludwig van Beethoven (1770-1827), Bach, Mozart, Haendel
Textes : Pascal Amoyel et Beethoven
Pascal Amoyel, piano et voix parlée
Christian Fromont, mise en scène
PROGRAMME : Bach, Variations Goldberg – Aria, Mozart, Fantaisie en ré mineur – Haendel, Menuet en la mineur, andantino- Beethoven, extraits de diverses Sonates dont la Pathétique, Clair de lune, La Tempête, Appassionata, Les Adieux, Hammerklavier …
Spectacle en partenariat avec le Goethe Institut de Toulouse dans le cadre de la Quinzaine Franco-Allemande
Dimanche 27 septembre à 16h : BACH Jean-Sébastien :Suites et danses
CRÉATION
Musique : Jean-Sébastien Bach (1685-1750)
Trois Suites pour violoncelle seul
Maitane Sebastian, violoncelle
Laure Thouault, chorégraphie et danse
Fanny Léon, Joss Thao, danse Hip Hop
Réservations :
Festik:https://musiquendialogue.festik.net
AVEC LE SOUTIEN DE LA MAIRIE DE TOULOUSE
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Les Sacqueboutiers
La plupart des concerts sont reporté en 2021, dont Entre Borgia et Médicis, Josquin des Près en Italie en Mars 2021 Odyssud.
Dommage que ceux prévus au Théâtre du Capitole, Les Sacqueboutiers invitent Jordi Savall et Le roman de Jaufré aient été annulés… Mais tous les efforts sont faits pour qu’ils soient reprogrammés dans une saison future.
Pour en savoir plus :
1) En1936, sous l’impulsion de Jean Zay, ministre de la Culture du Front Poûlaire (assassiné par la Milice) est créé le régime salarié intermittent à employeurs multiples pour les techniciens et cadres du cinéma… Avec ce régime particulier, ils pouvaient travailler pour des films quelques mois et le reste du temps une caisse leur donnait une indemnité pour continuer à vivre et surtout à être disponibles. Le nombre de personnes concernées était à l’époque très modeste…
En 1965 est mise en place l’annexe 8 au régime général d’assurance chômage qui s’applique au secteur cinématographique. Elle est ensuite étendue aux techniciens du disque et de l’audio-visuel.
Le 1er janvier 1968, l’annexe 10, qui ouvre l’assurance chômage aux entreprises du spectacle, entre en vigueur, comme prévu par l’ordonnance du 13/07/67.
En 1969, les artistes interprètes sont intégrés au régime d’intermittent, puis les techniciens du spectacle vivant…
2) voir ma chronique sur un film récent à ce sujet dans mes coups de cœur du printemps 2020 (quand nul ne pouvait prévoir le cauchemar actuel)