6e édition les 30 novembre et 1er décembre
Organisé par l’Institut Toulousain d’Études Maçonniques (ITEM), le Salon Maçonnique de Toulouse connaîtra sa 6e édition les 30 novembre et 1er décembre aux Espaces Vanel de la médiathèque José-Cabanis. Un événement ouvert à tous, maçons et non-maçons, dont la programmation très variée aborde autant les thèmes propres à la franc-maçonnerie que les débats et les questions d’actualité qui agitent notre société.
Pour en savoir plus, entretien avec Gérard Soulier, secrétaire de l’ITEM et commissaire général du Salon Maçonnique de Toulouse.
Pour ceux qui ignorent tout de cet événement et de la franc-maçonnerie, quelle est la raison d’être du Salon Maçonnique de Toulouse et que propose-t-il à ses visiteurs ?
Le Salon Maçonnique de Toulouse a été créé en 2009. Nous n’en sommes qu’à la 6e édition puisqu’il n’a lieu que tous les deux ans. C’est avant tout une manifestation d’extériorisation de la franc-maçonnerie, grand public, et à caractère culturel. Le salon est organisé par l’Institut Toulousain d’Études Maçonniques (ITEM), une association loi 1901. La vocation de l’ITEM est de travailler sur des recherches historiques et d’autres aspects de la franc-maçonnerie. Cet événement est à la fois un salon du livre, dans la mesure où des libraires y participent, et un espace de discussion et de partage de la connaissance qui s’articule autour de tables rondes et de conférences dédiées à des thèmes très divers.
C’est aussi pour nous l’occasion de montrer la franc-maçonnerie sous un autre jour que celui présenté par les magazines de presse. Nombre d’entre eux lui consacrent des dossiers en caricaturant, en dénigrant souvent ce que sont les francs-maçons. Nous souhaitons montrer que francs-maçons et francs-maçonnes sont des individus comme les autres, mais qui se posent certaines questions et réfléchissent à des sujets qui intéressent la société et la cité. Nous proposons donc à nos visiteurs, de manière libre et gratuite, de pouvoir nous rencontrer et de participer à des conférences plénières et des tables rondes autour des différents thèmes abordés lors de cette édition 2019.
Est-ce une manifestation uniquement toulousaine ou des salons équivalents, basés sur le même concept, ont lieu également dans d’autres villes françaises ?
Il existe des salons quasi identiques dans d’autres villes françaises, plus ou moins sur le même modèle. Chaque organisation locale a sa particularité, la nôtre étant de monter une exposition d’oeuvres d’art maçonniques et d’offrir au public quelques intermèdes musicaux, en plus des tables rondes, des conférences, de la vente de livres et des signatures d’auteurs présents au salon. En dehors de celui de Toulouse, on peut citer un salon annuel à Paris dont la dix-septième édition se déroule ce mois de novembre, un autre à Lyon dont la 11e édition a eu lieu en octobre, et enfin le Salon Maçonnique du Livre et de la Culture de Lille. Depuis peu il en est organisé un à Nantes et il existe, en alternance avec Toulouse, une biennale à Bordeaux.
Qui sont les organisateurs du Salon Maçonnique de Toulouse ou plutôt qui sont les membres de l’ITEM ?
L’Institut Toulousain d’Études Maçonniques a été créé par des maçons du Grand Orient de France, lesquels se sont rapprochés de membres d’autres obédiences maçonniques : le Droit Humain, la Grande Loge Féminine de France, la Grande Loge Nationale Française, et quelques obédiences de création plus récente. Nous comptons 930 adhérents à l’ITEM, ce qui en fait une association importante par le nombre mais modeste par les activités publiques, organiser un salon tous les deux ans n’ayant rien d’exceptionnel. En revanche, nous avons un certain nombre d’activités en interne, tous les deux ou trois mois, avec des conférences présentées et animées par des intervenants de toutes origines maçonniques. Nous organisons aussi dans nos locaux beaucoup d’expositions d’oeuvres d’art réalisées par des soeurs ou des frères maçons, avec des vernissages et des conférences de présentation.
C’est la 6e édition du salon, comment ont évolué la fréquentation et la composition du public depuis la première ? La manifestation étant ouverte gratuitement à tous, y voit-on de plus en plus de non-maçons ?
La première édition avait eu lieu en 2009 à l’Espace Duranti, une petite salle que la mairie de Toulouse prête aux associations ; nous y étions donc assez à l’étroit. Les éditions suivantes se sont tenues aux Espaces Vanel de la médiathèque José-Cabanis qui offrent une surface bien plus grande et plus pratique pour organiser le salon. Il y a trois espaces, modulables grâce à des cloisons amovibles. Notre capacité d’accueil s’est donc considérablement accrue dès la deuxième édition. Cependant, nous avons commencé avec un public déjà nombreux en 2009 et la fréquentation n’a cessé d’augmenter depuis.
En 2017, nous avions comptabilisé plus de 2 200 passages durant le week-end, sachant que ceux qui viennent le samedi et le dimanche sont comptés deux fois. Les tables rondes affichent régulièrement complet dans un espace pouvant accueillir 250 personnes et je peux annoncer que nous avons porté cette année la jauge à 500 places pour nos deux conférences plénières d’ouverture : L’intelligence artificielle, un antihumanisme ? et Le nazisme, la face sombre de l’ésotérisme ; ce qui montre que nous sommes plutôt confiants en notre capacité à attirer un nombreux public. Nous attendons donc une nouvelle augmentation de la fréquentation cette année.
Quant à la proportion de non-maçons, ceux que nous appelons des profanes, elle est estimée à 3 personnes sur 10 d’après les indicateurs que nous avons mis en place dans un questionnaire rempli par une frange représentative de nos visiteurs. Ce pourcentage est confirmé par les maçons qui fréquentent le salon ou participent à son organisation. D’une part ils y identifient et dénombrent les frères et sœurs qu’ils connaissent, et d’autre part ils arrivent à reconnaître les profanes au travers des questions qu’ils posent lors d’une conférence ou table ronde, certaines trahissant leur méconnaissance de la franc-maçonnerie. Cette proportion de 30% de non-maçons fréquentant notre salon nous satisfait pleinement.
Y a-t-il une thématique générale ou des thématiques particulières abordées cette année lors du salon ?
Il n’y a pas de thématique générale pour l’ensemble du salon. Nous essayons d’offrir aux visiteurs un large choix de thèmes de manière à ce que maçons et non-maçons puissent y trouver matière à intérêt. Il y a des sujets sociétaux, des questions qui peuvent être abordées dans d’autres lieux ou assemblées qu’un salon maçonnique, par exemple l’intelligence artificielle. Il est bien évident que nous essayons de donner aux thèmes des tables rondes un angle qui va d’abord intéresser nos membres, à savoir la question de l’humanisme : est-ce que l’intelligence artificielle remet en cause l’humanisme ? L’humanisme est une valeur que les franc-maçons cultivent et sur laquelle ils travaillent, réfléchissent, elle est donc fondamentale.
Nous traiterons d’autres questions très actuelles telles que la PMA et la GPA sous l’angle de l’éthique, ainsi que la démocratie, la liberté de conscience… Nous avons choisi de traiter ce dernier sujet par le biais de l’Affaire Vanini : Vanini 400 ans, liberté de conscience et conscience de la liberté en faisant un petit jeu de mots certes un peu facile, mais qui n’est pas complètement déplacé. Pour en parler, nous recevons parmi les intervenants de cette table ronde Henri Peña-Ruiz, un philosophe qui a une actualité importante en ce moment, et Didier Foucault, professeur à l’université Toulouse-Jean Jaurès et auteur d’une biographie de Vanini.
Ces thèmes peuvent à l’évidence intéresser aussi bien les maçons que les non-maçons. A contrario, le thème Rites et spiritualités, noces du geste et de la parole intéresse en priorité les initiés, donc les maçons. Encore qu’y assister, pour un profane, permet de s’affranchir de bien des préjugés et idées reçues sur la franc-maçonnerie du genre « qu’est-ce donc que cette société secrète ? » alors qu’il s’agit d’une société discrète, ce qui n’est pas la même chose. La franc-maçonnerie est un ordre, différent bien sûr des ordres monastiques, mais où il y a des règles, un rituel et une dimension de spiritualité importante.
Quels sont la programmation et les intervenants de ce salon 2019 ?
Pas de fil rouge à cette programmation parce qu’il est très difficile d’en concevoir un compte tenu d’un nombre aussi élevé de tables rondes. Il y a néanmoins quelques dominantes. Plusieurs tables rondes ont ainsi été dédiées à la question de la république, de la démocratie, de l’utopie aujourd’hui, ces trois notions étant peu ou prou liées entre elles. Ensuite, dans le domaine du sociétal, nous traitons donc de la PMA et de la GPA, sujets d’actualité qui posent des questions d’éthique. De la même façon, l’intelligence artificielle et ses développements suscitent de nombreuses interrogations. Il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas pour nous de vendre une position mais de faire réfléchir à ces questions qui concernent là encore autant les maçons que les non-maçons.
Reprenons l’exemple de l’intelligence artificielle : Éric Sadin, philosophe et essayiste de renom, a écrit un livre à succès sur ce thème, L’Intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle (éditions L’Échappée), très critique puisqu’il va jusqu’à dire que l’intelligence artificielle est un antihumanisme radical. Il fonde son raisonnement et ses conclusions sur une analyse philosophique et non sur un point de vue arbitraire. Nous le confrontons à Jean-François Bonnefon, chercheur et docteur en psychologie cognitive à la Toulouse School of Economics, qui vient de faire paraître La voiture qui en savait trop (éditions humenSciences), un livre sur le véhicule autonome. Face à un penseur, un homme du concept, nous plaçons un praticien qui a travaillé sur un projet très ciblé consacré au véhicule autonome, à ses avantages et ses inconvénients. Après les avoir écouté débattre, chacun aura des éléments qui l’aideront à se faire sa propre idée sur le sujet.
Pour revenir à la programmation du salon, les journées vont commencer par les conférences plénières dont j’ai évoqué les thèmes précédemment et pour lesquelles nous avons donc alloué une jauge de 500 places. Celle-ci sera ensuite partagée en deux pour les tables rondes. Le troisième espace disponible est dédié aux libraires. Nous en accueillons deux : DETRAD, un libraire venu de Paris, et Ombres Blanches, libraire toulousain indépendant bien connu qui va proposer des ouvrages d’auteurs maçonniques non référencés dans les librairies spécialisées, et d’autres traitant de sujets et de domaines que les maçons aiment aborder (philosophie, histoire, sociologie, psychanalyse, etc.)
En marge de ces propositions tournant autour de sujets très sérieux, parfois graves, il y en a de plus légères si l’on peut dire, notamment des intermèdes musicaux ou consacrés à la musique.
Oui, nous allons terminer la journée du samedi avec du jazz pour offrir un temps de détente bien mérité à nos visiteurs, après des heures de réflexion et de discussion lors des conférences et tables rondes. Le dimanche, toujours dans le domaine musical, une intervention sera consacrée à Bernard-Aymable Dupuy, compositeur toulousain peu connu du XVIIIe siècle qui se trouve avoir été franc-maçon. Michel Brun, directeur artistique de l’Ensemble Baroque de Toulouse et du festival Passe ton Bach d’abord, sera l’intervenant de cette conférence. Il ne fait pas partie de notre association mais il connaît très bien l’oeuvre de Dupuy. Didier Descouens, qui possède aussi une très bonne connaissance de la musique française du XVIIIe, lui donnera la réplique et animera la discussion avec le public. C’est une des autres particularités du Salon Maçonnique de Toulouse, celle consistant à faire appel autant que possible aux compétences et aux experts locaux.
Que diriez-vous à des non-maçons qui hésiteraient à se rendre au salon ?
Je leur dirais ceci : parfois vous entendez parler de la franc-maçonnerie et des francs-maçons, dans des revues ou des émissions, de manière surprenante, inexacte ou erronée, ce qui vous en donne une fausse idée ou pour le moins vous amène à vous questionner sur eux. Ces interrogations devraient vous conduire à les rencontrer et à vous faire votre propre opinion en discutant avec eux. Vous vous rendrez compte alors que les francs-maçons sont des hommes et des femmes comme les autres, qui cherchent à comprendre le monde qui les entoure, à continuer de se construire en tant qu’être humain par les travaux qu’ils mènent en loge et dont quelques exemples seront dévoilés durant le salon.
Je rappelle ce que je disais au début de cet entretien, il s’agit vraiment d’une manifestation d’extériorisation de la franc-maçonnerie, destinée à offrir la possibilité à tout un chacun de la découvrir et de mieux la connaître par lui-même. C’est l’objectif premier du Salon Maçonnique de Toulouse et j’encourage chaleureusement tous ceux qui le souhaitent à venir à notre rencontre, sans crainte et en toute simplicité, les 30 novembre et 1er décembre.
Entrée Libre et Gratuite
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Entretien réalisé par Éric Duprix
Salon Maçonnique de Toulouse