Pour cinq représentations au Théâtre du Capitole à partir du 11 mai, ce vaudeville-opérette est enfin programmé sur la scène de notre cher Théâtre. On peut s’étonner de ne pas l’avoir eu à l’affiche plus tôt, comparé à tant d’autres remarqués dans les archives, aux qualités bien moindres !
Opéra-comique, opérette, comédie musicale…on les catalogue, toujours avec plus ou moins de dédain, dans la rubrique « musique légère ». Et pourtant, n’est-il pas de bon aloi que de vouloir marier la comédie et la musique, autrement dit le parlé et le chanté ? Ce fil rouge va unir toutes ces œuvres entre elles et donnera au genre ses lettres de noblesse.
Mais, depuis quand Denise de Flavigny, plus connue sous le sobriquet de Mam’zelle Nitouche, a-t-elle désertée les scènes françaises où naguère, pourtant, elle partageait le succès des autres opérettes populaires si chères au cœur des foules, au point de conquérir par deux fois le grand écran ? Si l’on remonte à 1984, il semble que Paris ne l’ait plus entendue depuis, pourtant, l’opérette la plus connue du sieur Louis-Auguste-Florimond Ronger dit Hervé, créée le 26 janvier 1883 au Théâtre des Variétés. Ouvrage en 3 actes et 4 tableaux sur un livret dû en partie à Albert Millaud, librettiste qui œuvra pour des compositeurs aussi connus que Charles Lecocq ou Jacques Offenbach. Son acolyte est le non moins célèbre, Henri Meilhac, librettiste prolifique que vous retrouvez par exemple, dans le Carmen de Bizet, bien sûr associé à Ludovic Halevy, mais aussi dans Orphée en Enfers, La Belle Hélène…….
Hervé qui fut compositeur, auteur dramatique, acteur, chanteur, metteur en scène et directeur de troupe et …organiste. C’est sous le “pseudo “ d’Hervé qu’il écrit, en 1847, la première « opérette » française, Don Quichotte et Sancho Pança. Il sera ainsi, plus tard, le concurrent direct de Jacques Offenbach. Hervé va composer tout d’abord des petites pièces musicales en un acte, vers 1853, en vue de fournir son premier théâtre, les Folies-Concertantes rebaptisé les Folies-Nouvelles. Ce seront, Le Compositeur toqué, La fine fleur de l’Andalousie……Rien que les intitulés donnent une idée mais, on trouve aussi des sous-titres dans le style : “Asphyxie musicale en un acte“ !! Alfred Jarry n’est pas loin, les Monty Python non plus. En 1855, Hervé monte une des premières opérettes d’Offenbach, Oyayayeou la reine des îles, titre authentique mais oui, laquelle il chante … Il fournira des dizaines de partitions au cours de ces années sous Napoleon III.
L’intrigue ici est relativement plus ordinaire que celle d’autres opérettes mis en musique par Hervé, qualifié en son temps, d’artiste un peu …“allumé “, ce qui est bon signe quand on veut écrire des musiques d’ouvrages de pur divertissement. Intrigue maligne puisque faisant allusion à la vie du musicien qui fut un temps organiste à Saint-Eustache, d’un côté et, de l’autre, compositeur d’opérettes le soir. Il s’ensuit dans l’ouvrage, une série de quiproquos se nouant et se dénouant au gré d’une musique pétulante et entraînante. Un résultat, tout de légèreté, de finesse, d’espièglerie, teinté d’une tendre causticité. En quelques mots, un professeur de musique est épris de sa jeune élève Denise qui, le soir, change d’identité pour chanter des chansons légères sous le pseudonyme de Mam’zelle Nitouche…… Un jeune lieutenant se devra de tomber sous le charme de la belle artiste mais, il doit cacher son trouble étant fiancé à une certaine …Denise !! Il y a beaucoup plus compliqué comme synopsis, n’est-ce pas, ne serait-ce que dans les premiers opéras dont le livret pouvait être basé sur nombre d’événements liés aux mythologies.
Chargé de la mise en scène, des décors et costumes et maquillages, Pierre-André Weitz est un fervent admirateur d’Hervé, le « compositeur toqué ». Sous l’égide du Palazzetto Bru Zane, en 2015, il avait déjà mis en scène Les Chevaliers de la Table ronde qui avait fait le tour de France. Il récidive avec cet ouvrage, coproduit par six structures d’opéras dont notre maison.
Dans cette production, on note les chorégraphies d’Iris Florentiny, et la présence d’un certain Olivier Py qui s’en donne à cœur joie, jouant, chantant. « C’est ma première opérette, c’est même la première fois que je chante avec un orchestre, c’est la première fois que je chante sans micro. C’est très très dur. Il faut une discipline de fer. Il faut être en forme vocalement, comme pour chanter un opéra, mais ce n’est pas un opéra », explique-t-il.
Il s’octroie trois personnages avec son double féminin baptisé Miss Knife, et incarne à la fois une Mère Supérieure aux grosses lunettes et une mini-diva sur le retour, Corinne. Il est aussi le jeune brigadier Loriot, pas très futé, ce qui lui donne en plus, l’opportunité de pousser la chansonnette. De sa participation, il confiera : « On ne voit pas des spectacles comme ça, nulle part, qui sont d’une telle effervescence, d’une légèreté profonde, d’une folie consciente, mais c’est un répertoire qui demande une grande exigence aussi bien musicale que théâtrale, parce que sinon, ça devient vite ringard, superficiel, cul cul. »
Weitz est aussi Piero le Régisseur tandis que Christophe Grapperon, à la tête des musiciens de l’ONT, dirige tout ce petit monde, animé, il le faut, de tout l’humour et la verve nécessaires pour ce type d’ouvrages. L’opérette ne pouvant supporter des distributions de second ordre, le reste de la troupe doit être d’un excellent niveau, suffisant pour se jouer des difficultés musicales mais aussi techniques, le problème principal étant le passage du chanté au parlé et vice versa.
En prime, cette charmante lettre qui nous éclaire sur le quotidien d’un intermittent du spectacle du temps d’Hervé, qui ne risquait pas de vivre avec une indemnité délivrée par le gouvernement de Napoleon III : cliquez ici
Billetterie en ligne du Théâtre du Capitole
Théâtre du Capitole
Mam’zelle Nitouche • du 11 au 19 mai 2019