Retour très attendu du ténor Torsten Kerl sur la scène du Théâtre du Capitole, à l’occasion de l’entrée au répertoire de l’opéra toulousain de « la Ville morte », de Korngold, dans la mise en scène de Philipp Himmelmann.
Troisième opéra d’Erich Wolfgang Korngold, « la Ville morte » (Die tote Stadt) n’a jamais été représenté au Théâtre du Capitole. Il y est à l’affiche cet automne dans la production de l’Opéra national de Lorraine, signée Philipp Himmelmann, et dirigé par le Britannique Leo Hussain. Créée simultanément à l’Opéra de Cologne et au Stadttheater de Hambourg en 1920, la partition est écrite sur un livret cosigné par le compositeur, alors âgé de 23 ans, et son père Julius, sous l’unique pseudonyme de Paul Schott. Il s’inspire du drame « le Mirage », que Georges Rodenbach transposa de son roman symboliste « Bruges-la-Morte ». Par refus du réalisme, les écrivains, peintres et musiciens symbolistes s’attachent dès la fin du XIXe siècle à redonner une place dans leurs œuvres au silence et aux mythes, aux sentiments les plus éphémères, aux rêves, aux paysages de l’âme.
Dans « la Ville morte », nous sommes à Bruges, à la fin du XIXe, où Paul s’enfonce dans la mélancolie depuis la mort de sa jeune femme Marie et vit dans le passé en refusant d’affronter sa vie sans elle. Il croise la route de Marietta, danseuse et femme de théâtre gorgée de vie, dont les traits sont identiques à ceux de Marie. Paul est alors tiraillé entre ses souvenirs incessants et ses pulsions charnelles. Récit du combat de la vie contre la mort, « la Ville morte » superpose cette dualité à d’autres tensions où s’opère le frottement du passé et du présent, du profane et du sacré, du réel et du théâtre, de Bruges et de Venise, de l’angélisme et du meurtre… Korngold se libère de l’œuvre originale pour organiser l’intrigue de son opéra comme un rêve vécu par le personnage.
Au cœur de ce tourbillon orchestral sombre et incessant, aussi obsédant qu’enivrant, on appréciera de nouveau le magnifique talent de Torsten Kerl qui brilla sur la même scène dans « Rienzi », de Richard Wagner. Le ténor allemand chante le rôle de Paul depuis 2001, date de sa performance à l’Opéra national du Rhin, maison qui mettait cet ouvrage pour la première fois à l’affiche en France. Torsten Kerl s’illustra ensuite dans ce rôle à San Francisco, Hambourg, Tokyo, Amsterdam, Londres, Barcelone, Vienne, Salzbourg. À ses côtés, Evgenia Muraveva fera à Toulouse ses débuts dans le rôle de Marietta. Pour la jeune soprano russe, «l’ouvrage montre la difficulté de Paul à accepter l’idée d’être infidèle à la mémoire de son épouse défunte… Marietta/Marie est une création de l’esprit de Paul. Ce sont ses sentiments qui recréent autour de lui tout ce qu’il lui manque. D’une certaine manière, on pourrait donc aussi penser que cette ressemblance, c’est un peu son désir qui la crée – il voudrait que Marietta soit la réincarnation de Marie. Et si elle ne l’est pas, Paul est prêt à essayer de la changer en ce sens.»
On attend les performances de deux jeunes barytons : Thomas Dolié, dans le rôle de Fritz, et Matthias Winckhler dans le rôle de Franck. Après son Ivette dans « la Rondine » la saison dernière, la soprano Norma Nahoun est de retour sous les traits de la danseuse Juliette, aux côtés de Julie Pasturaud en Lucienne. La mezzo-soprano américaine Katharine Goeldner endossera les habits de la domestique Brigitta, et les ténors Antonio Figueroa et François Almuzara se glisseront respectivement dans ceux de Victorin/Gaston et du Comte Albert.
Billetterie en Ligne du Théâtre du Capitole
« La Ville morte », du 22 novembre au 4 décembre, au Théâtre du Capitole,
place du Capitole, Toulouse. Tél. 05 61 63 13 13.
Rencontre avec T. Kerl, lundi 19 novembre, 18h00, au Goethe Institut,
4 bis rue Clémence-Isaure, Toulouse (entrée libre).
Conférence, mercredi 21 novembre, 18h00, au Théâtre du Capitole (entrée libre).
Journée d’étude, jeudi 29 novembre, de 9h00 à 17h00, au Théâtre du Capitole (entrée libre).