Clap de fin de saison au Théâtre du Capitole, avec cet opéra du “divin“ Mozart. Ce sera du 22 juin au dimanche 1er juillet. Théâtre où malgré les aléas des changements de direction, dans son ensemble, le public a vivement apprécié les spectacles prévus, et remaniés pour certains.
La création de la coproduction eut lieu au Festival d’Aix-en-Provence en 2011. L’Opéra de Marseille fut aussi de la partie tandis que le Théâtre du Capitole l’a accueillie une première fois lors de la saison 2011/2012 courant mars. Dans la fosse, on retrouve un habitué de la direction des opéras mozartiens à Toulouse, Attilio Cremonesi qui dirige des musiciens de l’Orchestre national du Capitole et les Chœurs du Capitole placés toujours sous la direction d’Alfonso Caiani. Musiciens et choristes qui ont été acclamés, à juste titre, lors des derniers Macbeth. Mise en scène et scénographie sont toujours signés de l’écossais David McVicar assisté de Marie Lambert.
Créateur infatigable, souvent inattendu, parfois dérangeant, cet écorché vif à l’enfance « incroyablement douloureuse et sombre », met en scène La Clemenza di Tito, Titus Vespasianus, l’incarnation du despote éclairé, cet ultime opéra seria du divin Mozart, mort en septembre1793, quelques jours après la création à Prague. Et si le genre seria est, dit-on, roide, glacial, le chef Attilio Cremonesi saura administrer la preuve que Mozart l’a bien voulu remuant au possible, d’une légèreté et d’une nervosité toutes aristocratiques. La musique rutile d’incendies psychologiques. La hâte avec laquelle ils furent allumés, et le temps qui manque à Mozart pour les dompter, leur donne une résonance toute particulière. C’est une œuvre à la construction parfaite dont tous les airs font progresser l’action vers un point éminemment positif : ou quand l’empereur trahi gracie les parjures, et que les sentiments nobles triomphent.
En despote éclairé, Titus sera Jeremy Ovenden, ténor qui chante ce rôle depuis plusieurs années. Il ne présente pour lui aucune difficulté. Il vient de s’y produire au Teatro Real de Madrid. Petit aperçu avec cette aria parmi les plus connues :
Titus est le fils de Vespasien, empereur, de la dynastie des Flaviens. Ce dernier est connu pour avoir mené des guerres victorieuses. Il a notamment combattu en Germanie, puis en Bretagne, livrant une trentaine de combats. Grâce à ses batailles, l’empire romain s’agrandit de plusieurs villes et nations. On disait de l’empereur Vespasien incapable d’infliger des tortures à ceux qui étaient coupables de lèse-majesté. Son fils, Titus, fut surnommé L’amour et les délices du genre humain, en raison de son attrait pour la belle vie, les spectacles et les plaisirs charnels. Mais, la mort de son père, en 79, aura irrémédiablement changé Titus. Il ne sera plus jamais le même, ayant probablement pris conscience de son nouveau rôle. Ainsi, pour plaire à son peuple et pour lui prouver son respect, le nouvel empereur renvoie Bérénice en Judée. Dans la même continuité, il abandonne ses anciennes habitudes : il n’assiste plus aux représentations, quitte ses favoris et renonce aux plaisirs du libertinage.
Son règne, très court, fut le théâtre d’une épidémie de peste, d’événements comme des catastrophes naturelles, éruption du Vésuve…mais encore l’incendie de Rome. Il se termina avec une nouvelle épidémie de peste qui l’emporta. Deux ans après être monté sur le trône, il plonge ainsi l’empire dans un deuil unanime. L’empereur aura définitivement marqué l’histoire romaine. Grâce à son règne, Titus aura su effacer les cruautés et les débauches dont il était capable.
Brûlante comme la glace, cette production bénéficie d’un superbe plateau. Rachel Frenkel sera Sesto, ou Sextus, l’une de ces admirables figures de travesti, ce rôle dominant aisément tout le paysage de l’opéra seria. Mais il est ici transfiguré, pourvu d’une mobilité émotionnelle, que seul un Mozart pouvait trouver. Amoureux transi de Vitellia, trop passif, trop doux, trop soumis à une femme autoritaire, il vit un dilemme tragique : obtenir l’amour au prix de l’amitié, car il est l’ami intime de Titus. Sa passion le rend hésitant, et Mozart caractérise avec finesse cette fragilité introvertie. Peu consistant dans le texte, c’est la musique qui le fait exister. En adoration devant la femme, mais vite désarmé. Passif, mais si émouvant dans sa jeunesse fébrile et maladroite. Proche de Chérubin aussi, Sesto a gardé une fraîcheur féminine un peu adolescente. Pourtant viril dans ses affirmations d’héroïsme, le rôle fait appel, faute de castrat bien sûr, à un mezzo souple et engagé, voire très engagé.
Sœur d’une Elettra, d’une Reine de la nuit, l’ambitieuse patricienne romaine Vitellia sera incarnée par Keri Alkema. Qui tient à épouser Titus, l’empereur qui a destitué son père Vitellus. Elles sont proches par la même véhémence souffrante et vengeresse à retrouver des droits perdus. Des éléments de situation traduits selon une expression vocale faite de traits plus ou moins périlleux et de brillant trompeur. Ce qu’elles peuvent avoir de touchant est vite occulté par leur rage revendicatrice qui les rend fascinantes mais pas obligatoirement sympathiques.
Enfin, nous avons pour corser le livret, Servilia. Car Sesto a une sœur, Servilia dont Annio ou Annus, ami de Sesto est amoureux. Mais voilà que Titus, obligé de s’éloigner de Bérénice prévue alors en mariage, a décidé d’épouser Servilia. Sesto ne peut plus bénir l’union de son ami avec sa sœur puisque l’empereur a quelque velléité !! Quel nœud ! Le rôle de Servilia sera chanté et joué par Sabina Puertolas, la pétillante et très plaisante interprète de Fiorilla dans Un Turc en Italie de la saison précédente, et qui fait une fort belle carrière. Annio est distribué à une mezzo, ici Julie Boulianne. Quant à la suite de l’opéra, elle ne vous sera pas dévoilée, mais n’oubliez pas le titre……
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Ne pas oublier qu’autour des représentations proprement dites , se greffent, une Conférence, des rencontres avant-spectacle, une conférence pour étudiants, une rencontre intitulée « les Ficelles du spectacle », et un Atelier créatif : chanter en chœur et en famille. Demandez le programme !!
Michel Grialou
Théâtre du Capitole
La clémence de Titus • Mozart
du 22 juin au 1er juillet 2018
La Clémence de Titus © Patrice Nin
David McVicar © KK Dundas
Attilio Cremonesi © Flavio Gallozzi