Le troisième concert de la saison des Clefs de Saint-Pierre associe la sonorité des cordes d’un quatuor à celle, charmeuse, de la clarinette. D’où le titre de cette soirée, « D’âmes et d’anche », dont un astucieux jeu de mots traduit aussi la seule présence féminine au sein de ce groupe de musiciennes issues, comme il se doit, des rangs de l’Orchestre national du Capitole. Les romantismes spécifiques, celui de Weber, plus virtuose, et celui de Brahms, plus nostalgique, se trouvent harmonieusement confrontés dans ce programme prometteur.
L’âme des cordes se trouve cette fois incarnée par Chiu-Jan Ying et Estelle Bartolucci, violons, Laura Ensminger, alto et Léa Birnbaum, violoncelle. L’anche de la clarinette est celle de Floriane Tardy, clarinette.
Le programme de cette soirée réunit deux quintettes pour clarinette et cordes, celui en si bémol majeur de Carl Maria von Weber et celui en si mineur de Johannes Brahms. Accueillis inégalement lors de leur création, ces deux quintettes sont incontestablement des partitions majeures dans le répertoire pour cette formation à laquelle Mozart avait donné ses lettres de noblesse.
Composé entre 1811 et 1815 pour le clarinettiste Heinrich Bärmann, le quintette de Weber est divisé en quatre mouvements, tour à tour virtuoses pour la clarinette ou malicieux aux cordes. Un critique de l’époque, John Warrack, émit cependant un avis lapidaire sur cette œuvre, qualifiée de pièce de circonstance, écrite à seule fin de mettre en valeur la virtuosité de son dédicataire : « Cette œuvre tient moins de l’œuvre de musique de chambre […] que du concertino ». Dans ce quintette l’instrument soliste « …chante comme un oiseau dans la forêt : gazouillis chromatiques, bavardages en trilles, autant de chants joyeux pour une promenade enchanteresse. »
Au contraire, Le Quintette pour clarinette et cordes en si mineur opus 115 de Johannes Brahms, composé presque 80 ans plus tard, a été accueilli avec un succès qui ne s’est jamais démenti. Il fut composé rapidement, dans le même temps que le Trio op. 114, au cours du printemps et de l’été 1891 à Bad Ischl où le compositeur séjournait comme l’année précédente. Créée à titre privé, sur manuscrit, dès le 24 novembre suivant à la cour ducale de Meiningen (avec Richard Mühlfeld, pour la partie de clarinette, ainsi que le célèbre violoniste Joseph Joachim et des membres de l’orchestre). Les premières auditions publiques eurent lieu, avec les mêmes interprètes, à Berlin les 10 et 12 décembre. Dès le 10 décembre, l‘accueil fut si enthousiaste qu’on refusa du monde le 12. C’est le 5 janvier 1892, enfin, que l’œuvre fut présentée à Vienne, avec le clarinettiste Steiner et le Quatuor Rosé. Puis, quinze jours plus tard, Mühlfeld et le Quatuor Joachim le donnèrent à nouveau : mêmes triomphes, la critique ayant déjà manifesté son approbation sans réticences. La partition est structurée selon les quatre mouvements d’architecture classique (Allegretto, Adagio, Andantino, Finale – Con moto). Son caractère automnal mais lumineux, s’apparente à une forme appelée « Notturno », proche des « hymnes à la nuit » du grand poète Novalis. Elle place très souvent la clarinette en majesté, soit en soliste, soit en dialogue.
Rendez-vous est pris pour ce lundi 16 janvier à l’auditorium Saint-Pierre des Cuisines.
Serge Chauzy
Une chronique de ClassicToulouse
Les Clefs de Saint-Pierre
D’âmes et d’anche
Floriane TARDY, clarinette Chiu-Jan YING, violon Estelle BARTOLUCCI, violon Laura ENSMINGNER, alto Léa BIRNBAUM, violoncelle
Saint-Pierre des Cuisines
lundi 16 janvier 2017 à 20h00
Renseignements détaillés et réservations au : 06 63 36 02 86.
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