Pour un récent Bal masqué au Théâtre du Capitole, un critique parisien de stature internationale avait écrit que Daniel Oren, chef d’orchestre, se délectait « des infinies beautés prodiguées par l’orchestre maison ». Le directeur musical en oubliait alors de rester branché sur le 220 et se retrouvait fort dépourvu, disait notre éminent journaliste spécialiste, de toute « électricité toscaninienne » !!! Pour ma part, j’avais été plus enthousiaste louant, lyrisme et sensibilité, dramatisme et tension. Eh bien, ce vendredi soir 24 octobre, on loue toujours les « infinies beautés…… », et si les qualités au rendez-vous ne sont pas les mêmes, car pas nécessaires ici, d’autres sont bien là.
Merci au chef Tugan Sokhiev de nous avoir permis de respirer tout au long des trois œuvres. Oui, nous avons respiré. Assez de toutes ces symphonies de Beethoven, survitaminées, les “paires“ comme les “impaires“ menées à la cravache par des chefs parcourant la partition à l’allure d’un TGV, des orchestres dirigés par des baroqueux cocaïnés en pleine apnée. Avec pour résultat, une écoute tellement oppressante. A la trappe, les fulgurances “mravinskiennes, kleiberriennes père et fils, harnoncourtiennes, et autres“. Et vive l’ampleur illustrée de cette manière, le souci continu du cantabile, l’adagio rayonnant…
Merci, de nous avoir permis d’apprécier toutes les qualités de nos musiciens aux bois, bassons, clarinettes, flûte, hautbois, d’avoir pu si bien les entendre, un peu trop souvent couverts qu’ils sont, à mon goût, par les cuivres qui ont le tort d’être, …… remarquables. Mais abondance de biens, ne peut nuire.
Merci de nous avoir rendu ces cordes si présentes dans leur diversité, les quatre contrebasses comprises. Oui, une Quatrième féline jusqu’au coup de patte, mais pas pour griffer, des ronronnements des basses réconfortants, des articulations toutes en souplesse, de félin, vous dis-je, et des étirements, mais on n’écrit pas alanguissements. Une bonne idée, pris sous cet angle d’exécution, que d’avoir mis au programme la N°35 de Mozart. Les deux allaient fort bien ensemble, et les motifs de satisfactions ne peuvent que s’associer. Oui, une symphonie de Mozart peut s’écouter à la Halle, avec son chef à l’estrade.
Enfin, la facilité déconcertante avec laquelle David Gluzman nous administre son Concerto pour violon n°2 de Prokofiev nous conforte absolument dans l’idée qu’il n’est pas nécessaire d’écouter les plus vieilles cires, ni les violonistes les plus médiatisés du moment. Brillant sans être démonstratif, du son sans agressivité, un archet d’une précision confondante, une maîtrise totale de l’œuvre dans son écriture et son esprit, un accompagnement, idéal d’équilibre à l’écoute, que pouvait bien demander de plus un public conquis et ravi.
Michel Grialou
Orchestre National du Capitole