« Grace de Monaco » , un film d’Olivier Dahan
Rarement pareil buzz a précédé et accompagné un film. Il faut dire que l’héroïne de celui-ci est une véritable icône, fauchée en pleine gloire, rien moins que l’actrice Grace Kelly (1929-1982) devenue Princesse de Monaco en épousant le descendant des Grimaldi en 1956. Le moins que l’on puisse dire est que l’histoire récente de cette principauté est loin de représenter un parangon en exemple de vertus cardinales (blanchiment d’argent, mariages à répétitions, enfants illégitimes, etc.). Organisant avec professionnalisme la peoplisation de sa vie privée, la famille princière est devenue le marronnier de tous les medias de la planète. Bien que les choses se soient un peu calmées depuis quelques temps. Calmées au point que le Rocher a décliné l’invitation d’assister à la projection du film qui ouvrait le présent festival de Cannes, trouvant ce pseudo biopic un rien décalé par rapport à la réalité. Soit. En fait ils ont bien fait de s’abstenir car l’accueil du public a été pour le moins mitigé…
Que nous propose le réalisateur français Olivier Dahan, celui-là même qui a signé en 2007 La Môme avec le succès, le seul d’ailleurs, que l’on sait ? Tout d’abord, un écran liminaire annonçant : « Ce film est une fiction s’inspirant de faits réels ». Difficile de faire plus ambigu. La suite se situe au début des années 60 du siècle dernier. Grace et Rainier ont déjà deux enfants, Aristote Onassis et La Callas font partie de leurs proches et le Général de Gaulle, empêtré dans la Guerre d’Algérie, commence à tousser en voyant des ressources fiscales prendre la tangente vers le protectorat monégasque. C’est le moment que choisit Alfred Hitchcock pour proposer à Grace de revenir à Hollywood pour tourner Marnie. Après avoir dit oui, Rainier refuse à son épouse l’autorisation de faire ce film. Il y a, ou du moins il y avait donc là une vraie mise en perspective du métier de comédien et de l’équilibre forcément fragile entre sa carrière et sa vie privée. Olivier Dahan se réfugie aujourd’hui derrière cette thématique, vue la volée de bois vert que prend son film. On n’y croit pas une seconde car, si cela avait été le cas à l’origine, comment alors justifier ce véritable défilé de mode permanent qu’il nous inflige et toutes les diversions politico-familiales qu’il nous assène. La réflexion est tout sauf approfondie et dérape carrément avec l’intrusion du religieux. Tirant à hue et à dia, le réalisateur semble n’être conduit que par le souci de filmer au mieux sa vedette (Nicole Kidman) sous tous les angles possibles et plus particulièrement plein cadre. Clôturant un film, parsemé d’extraits de La Valse triste de Sibelius (tout un programme…), avec un salmigondis sans fin sur l’Amour, il achève définitivement le public le mieux intentionné.
Robert Pénavayre