André Dussolier nous a donc ouvert sa bibliothèque hier soir. Les textes sont tellement aimés que très peu finalement seront lus. Le poème du vicaire d’André Frédérique débute cette rencontre, et donne le ton de la soirée : seul en scène, debout, sans jeu de lumière, sans accompagnement musical, mais avec l’envie de partager l’amour du bon mot, que ce soit avec l’Abbé de Lattaignant, quand le Mot et la Chose se répondent, et avec la poésie de Victor Hugo Les Mots. Jongler avec les mots, il en sera aussi question avec L’autoportrait du descendeur de Paul Fournel, qui sera décliné en séducteur et en fonctionnaire après que les Oulipiens Hervé Le Tellier et Frédéric Forté l’aient respectivement revisité. En donnant vie aux situations de Guitry, Allais, Dubillard et d’autres encore, André Dussolier déclenche le rire avec une vieille actrice, un mari trompé ou un abbé qui reçoit les confessions de Rose, davantage encore quand il confesse avoir changé le Guy suspendu au balcon dans le vide par une Monique, pour rendre l’Ultime bataille de Ribbes malicieusement misogyne. Dans cette soirée irrésistiblement joyeuse, l’acteur réussit aussi à glisser les lectures des très beaux poèmes Le crapaud (Victor Hugo) et La mort du loup (Alfred de Vigny). Avant de partir habilement avec un texte sur la recette du soir, un clin d’œil au Cinéma de Nougaro, avant de se faire chaleureusement applaudir.
Représentation à venir : dimanche 15 Décembre, 16h, théâtre Sorano
Le mois dernier, cette même salle accueillait Jane Birkin. Au lendemain d’Arabesque. cinquante-huit textes de Serge furent mis à l’honneur durant une lecture à trois voix intitulée Gainsbourg, textes sans musiques avec ses amis. Hervé Pierre, sociétaire de la Comédie Française, prêta sa voix successivement à l’homme amoureux, tourmenté, éconduit avec Comment te dire adieu ?, qui sans sa musique devint ce soir-là une tragédie. Il nous amusa avec un Talkie-Walkie, comme Michel Piccoli avec Les Sucettes, 69 année érotique, Trois millions de Joconde décorant le papier toilette personnel de l’auteur : des moments savoureux. Les touches parcimonieuses et décalées de Fred Maggi au piano n’ont trahi en rien le titre de cette soirée. Jane lut avec la même alliance de force et de fragilité, qu’elle avait chanté la vieille. « Cette soirée, j’en ai longtemps rêvé, et je remercie Ghislaine Gouby de m’avoir permis de réaliser mon rêve » déclara-t-elle en cours de la soirée. Que le sourire de Jane est beau. Qu’il lui soit vite rendu.