Les formes de Véronique Matteudi sont tressées dans la clématite sauvage, quant à Annie Lauras, elle sculpte des peaux, des membranes. Les œuvres des deux artistes communiquent autour de l’idée de la gestation, de la maternité, du mouvement de la vie.
Les sculptures de Véronique Matteudi attirent particulièrement le regard par le choix du matériau et le travail formel effectué au-delà de l’aspect figuratif. Les œuvres non-figuratives sont d’ailleurs d’autant plus intéressantes qu’elles concentrent la réflexion sur cet effet produit par la forme.
Circulation végétale
Il n’y a pas de structure interne dans les œuvres de Véronique Matteudi, elles reposent sur elles-mêmes. Toute l’attention du spectateur est portée à la surface. Et le type de tressage, comme les mailles d’une nasse, impose une circulation du regard.
On suit en effet malgré nous les dédales des lignes enchevêtrées, enroulées sur elles-mêmes en petits cercles. A ce jeu, le regard prend de la vitesse autour de la forme.
Ce dynamisme du regard guidé par toutes ces jolies lignes arrondies génère une impression de mouvement. L’oeuvre ne semble pas figée, elle semble prête à se déployer, à se transformer tel un Barbapapa. Elle nous emmène dans son évolution comme une plante en développement, comme un organisme en gestation. L’aspect maternel de ces formes arrondies, sorte de gros ventres, renvoie pour l’artiste au mythe de la Déesse-Mère*.
La fibre symbolique
La trouvaille du matériau est géniale. Véronique Matteudi s’est prise de passion pour la clématite sauvage.
On trouve cette plante ultra envahissante dans les lieux délaissés par la main de l’homme. Elle donne des fleurs assez quelconques mais produit de très longues lianes filandreuses qui s’accrochent un peu partout dans des architectures imposantes et totalement désordonnées. Symbole de l’exubérance de la nature, ce matériau apporte toute une poésie autour de la croissance, du mouvement ininterrompu de la vie.
L’artiste s’est plu à démêler ces longs cheveux de Dame Nature pour en faire son matériau brut. Ses œuvres s’enrichissent de ses fibres souples et sans fin qui s’effilochent en fils secondaires qu’on croirait capables de s’enrouler à leur tour en une sous-structure fractale.
Le corps, l’organique est le point central du travail d’Annie Lauras. Elle fixe des peaux dans la colle, comme si elle cherchait à conserver l’empreinte de la chair, matière destinée à disparaître. La maternité est aussi très présente avec les photographies des tissus mouillés teintés de rouge qui évoquent des parois utérines.
Anne Dargenton
* Marija Gimbutas, Le langage de la déesse, Éditions des Femmes, 2005.
Un article à retrouver sur JARDINS MENTAUX