Le Musée des Abattoirs présente du 29 juin au 2 septembre prochain l’exposition La Vie des Formes, un parcours didactique qui semble avoir conquis le grand public si on en juge par son affluence.
Phrase de lumière
Dans la première salle est présentée une oeuvre majeure : « Light Sentence » (1992) de Mona Hatoum, prêtée par le Centre National d’art et de culture George Pompidou.
Caverne de Platon et cages d’acier
La simplicité du principe de cette installation et sa sobriété tranchent avec les autres oeuvres exposées, plus techniques ou aux couleurs chatoyantes.
Une ampoule suspendue à son fil électrique descend au milieu d’un ensemble de cages en acier brut disposées en « u », jusqu’à rencontrer le sol avant de remonter lentement. L’ombre des cages est projetée sur les murs de la salle.
Deux mondes de formes et de mouvements
Quand on fixe son attention sur les cages et la progression de la lampe à l’intérieur, il ne se passe pas grand’chose. Le mouvement vertical du va-et-vient de l’ampoule fait écho à la verticalité du parallélépipède d’acier sans interaction possible.
Mais en dehors de l’ensemble des cages, le contraste est saisissant : ombre et lumière sont étroitement liées. L’ombre portée, quand l’ampoule descend entre les cages, envahit la salle recouvrant peu à peu les murs jusqu’au plafond comme une marée montante. Les moindres oscillations de la lampe sont amplifiées par la projection : au mouvement vertical s’ajoute ainsi un mouvement horizontal de balancement qui donnent une impression de flottement ; les portes ouvertes des cages semblent battre. A l’amplitude maximale, la forme semble se tasser, s’écraser sur elle-même. La salle est ensuite libérée de cette envahissante forme organique qui disparaît à mesure que l’ampoule remonte.
Transcendance de la vérité
On peut voir là une belle métaphore. La lumière, symbole de la connaissance et de la vérité, progresse au sein de cette structure d’acier représentant la société et les schémas mentaux individuels.
Si la vérité ne semble pas affecter le quotidien ou les apparences (la structure fixe, immuable), elle affecte les structures profondes des individus (l’ombre portée). On comprend que si la vérité n’éclaire pas les peuples, les forces inconscientes semblent se déchaîner, source d’enfermement, d’angoisse pour des êtres privés d’espoir.
Anne Dargenton
Un article à retrouver sur le blog Jardins Mentaux.