La main de fer du FBI
En nous traçant le portrait de l’homme le plus puissant des USA pendant près de 50 ans : J. Edgar Hoover (1895- 1972), Clint Eastwood se lance dans un biopic finalement de belle facture, même si les amateurs d’émotions fortes restent sur le trottoir. Construit sous la forme traditionnelle de flash-backs (nous verrons dans quelques temps que le biopic sur Margaret Thatcher est construit à l’identique), le légendaire cowboy de notre jeunesse glisse dans son scénario la part intime du premier directeur du FBI. Non seulement il évoque des relations très soumises à sa mère (ici somptueuse Judi Dench, mais est-ce une surprise ?), mais aussi, et presque surtout, l’amitié terriblement ambiguë qui le lie à celui qui fut son second : Clyde Tolson (un magistral comédien de 26 ans dont il faut retenir le nom : Armie Hammer). Même si leur homosexualité réciproque n’est pas prouvée, elle ne faisait alors de doute à personne, leur étroite relation étant particulièrement flagrante. D’ailleurs il fit de son adjoint son légataire universel… Et le FBI dans tout cela ? Eastwood en parle tout de même, au travers de différentes affaires qui l’illustrèrent, telle celle de l’enlèvement dramatique du fils de Charles Lindbergh, les mises sur écoute, le fichage institutionnalisé, les dossiers secrets auxquels même le Président des USA n’avait pas accès. Soit dit en passant, des dossiers qui lui assurèrent une immunité totale sous le règne de huit présidents ! C’est Leonardo DiCaprio qui incarne Hoover. Il tenait absolument à ce rôle et consentit de le tourner pour 10% seulement de son cachet habituel, il est vrai un rôle taillé sur mesure pour les Oscars. Il y est proprement fantastique, dégageant une froideur sibérienne tout en exhalant une tempête intime dont on imagine la puissance. Se pliant à tous les maquillages et prothèses possibles, il eût plus de chance que ce pauvre Armie Hammer dont le dernier maquillage est à hurler de rire… de nos jours ! Alors, même si en 2h15, il était impossible de retracer une vie pareille, reconnaissons à Clint Eastwood le mérite de l’intelligence et d’une recherche forcenée et aboutie de l’authentique (costumes, décors). Saluons également la performance de Naomi Watts dans le rôle ingrat d’Helen Gandy, la seule secrétaire personnelle et secrètement amoureuse d’Hoover. C’est elle qui détruisit les fameux dossiers secrets, à la mort de son patron.
Robert Pénavayre
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