Yuli, un film de Iciar Bollain
Il se rêvait footballeur et rejetait la danse, par peur d’être pris pour une tarlouze (sic). Carlos Acosta est aujourd’hui entré dans la légende du ballet aux côtés de Rudolf Noureev et de Mikhaïl Barychnikov.
Nous voici en pleine épidémie de biopic. Après Freddie Mercury (Bohemian Rhapsodie) et Elton John (Rocketman), Maradona va bientôt s’inviter. Mais avant le footeux, c’est un artiste d’un autre monde que la Madrilène Iciar Bollain nous invite à découvrir avec beaucoup de pudeur, d’émotion et de profondeur. Cet artiste n’est rien moins qu’une légende vivante de la danse, le Cubain Carlos Acosta (né en 1973), surnommé Yuli par son père, en référence à un fameux guerrier. Au travers de flashbacks savamment articulés, la réalisatrice nous met dans les pas de ce jeune garçon (Edilson Manuel Olvera, stupéfiant de présence) dont le destin au cœur d’un quartier défavorisé de La Havane semble des plus compromis. Mais Pedro, son camionneur de père (Santiago Alfonso, hallucinant d’intensité) veille au grain, quitte à avoir la main lourde… Pour cadrer ce fiston un brin turbulent mais déjà virtuose de breakdance, il va lui faire intégrer, contre son gré, une école de danse. Il n’est rien de dire que Yuli traîne des pieds car il ne veut pas être traité d’homo par ses copains. Son destin va faire fi de tout cela et l’entraîner au plus haut sommet de la hiérarchie mondiale des Etoiles. Nous suivons ainsi son ascension fulgurante parmi les plus grandes Compagnies de ballet du monde jusqu’au Royal Ballet de Londres, la Mecque de la danse avec l’Opéra de Paris. Mais le scénario ne s’arrête pas là. D’autant que son signataire n’est autre que Paul Laverty, époux de la réalisatrice et complice de toujours de Ken Loach…
Les avanies du régime cubain sont passées en revue, tout comme l’ingérence des USA dans de nombreuses manœuvres économiques au niveau mondial, le racisme, l’homophobie, l’immigration, le poids du passé et celui de l’esclavage en particulier. Et tout cela avec une fluidité dans le discours d’une époustouflante subtilité. Carlos Acosta joue son propre rôle aujourd’hui. Il est juste précédé dans celui de Yuli par Kevyin Martinez (un jeune acteur cubain qui crève l’écran !) dans la peau de Carlos Acosta glanant de par le monde les prix les plus prestigieux.
Entre scènes dramatiques et séquences dansées (somptueusement), ce film se révèle puissant, juste, émouvant, destiné au plus grand nombre car c’est aussi une ode au courage.
Carlos Acosta – « Le métis d’or »
De mère espagnole et de père africain, Carlos Acosta naît à La Havane en 1973 dans un quartier défavorisé. Appelé à devenir un mauvais garçon, il va cependant « subir » la loi paternelle et, contre son gré, entamer des études de danse qui l’amèneront au plus haut sommet mondial et historique, côtoyant sur ces cimes Rudolf Noureev et Mikhaïl Barychnikov.
Celui qui se veut footballeur est en fait un danseur doublé d’un artiste prodigieux qui deviendra une Etoile. Marié et papa d’une petite fille, il est Commandeur de l’Ordre de l’Empire britannique.