Mauvaises herbes, un film de Kheiron
Pour son deuxième long-métrage, l’Iranien Kheiron hausse nettement le niveau. Tout d’abord il nous cueille à froid avec une séquence liminaire intensément dramatique.
Dans un pays en guerre, la famille du petit Waël est massacrée sous ses yeux. Il ne devra sa survie qu’à sa débrouillardise et l’aide d’une religieuse. Un saut temporel nous amène sur ses pas aujourd’hui. Il a été confié, voilà une vingtaine d’années, à Monique, qui œuvrait alors dans l’Humanitaire.
Ils se sont fatalement attachés l’un à l’autre au point même que, pour arrondir les fins de mois difficiles, ils ont mis en place un système d’arnaque au sac à main assez comique. Arnaque quand même. Jusqu’au jour où la victime, Victor, se trouve être une connaissance de Monique. Victor cherche un animateur pour un groupe d’ados en difficulté. Waël tente sa chance, largement encouragé par Monique. Lui qui a vécu les pires horreurs qu’un enfant peut connaître trouvera les mots pour déverrouiller le silence dans lequel se mure cette poignée de « rebelles ». Un brin de suspense autour d’une intrigue policière et voilà notre comédie qui prend son envol, à la fois douce, amère fatalement et lumineuse aussi. A la réalisation, au scénario et devant la caméra, Kheiron fait feu de tout bois. Il s’est particulièrement bien entouré, rien moins que Catherine Deneuve, Monique éblouissante de virtuosité tragi-comique, et André Dussollier, Victor au cœur immense, paradigme d’engagement en faveur de ces jeunes que l’on qualifie aujourd’hui « d’empêchés ». Une petite musique de tolérance et d’empathie, de rédemption peut-être, plane sur toute cette comédie. Réfugié politique, animateur social, Kheiron sait de quoi il parle. Le ton juste est là. Une réussite.
Robert Pénavayre