Odyssud présente sur le 12 et le 13 novembre 2018, à 20h 30, deux concerts au programme identique donnés par Le Chœur de chambre Les Eléments et Les Passions – Orchestre baroque de Montauban, véritable temps fort des commémorations du Centenaire. Ils interprèteront le Requiem de Mozart suivi du Berliner Requiem de Kurt Weill.
Le concert nous présente le Requiem de Mozart, « le plus grand Requiem du monde » comme Joël Suhubiette se plaît à le souligner, le plus connu sûrement et le plus interprété en tout point de la planète. C’est pourquoi nous ferons fi de toute présentation et nous vous donnerons juste quelques “infos“ sur l’histoire des derniers jours ou semaines du “divin“ compositeur qui ont vu la naissance de cette œuvre inachevé après deux opéras, eux, terminés.
Suivra, de Kurt Weill (1900-1950), Berliner Requiem, une œuvre donc plus récente sur laquelle nous pourrons nous étendre davantage car bien plus confidentielle dans les salles de concert. Kurt Weill, cosmopolite dans sa vie comme dans ses œuvres, s’adaptant au fil de ses voyages et de ses exils, à des langues et à des genres musicaux totalement différents, le compositeur est entré dans l’histoire, avant tout grâce aux fruits de sa collaboration avec Bertolt Brecht, L’Opéra de Quat’sous et Les Sept péchés capitaux notamment sans oublier Grandeur et Décadence de la ville de Mahagonny.
La cantate du Requiem berlinois est dédiée à la radio de Francfort et s’inscrit au sein de la production de son compositeur, dans une série de travaux qui étaient en quelque sorte des études pour l’opéra, alors achevé, Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny. Dédiée à une radio car en effet, Kurt Weill et d’autres, Max Butting, Franz Schreker, Hanns Eisler sont dans une période où l’on se préoccupe de la création de conditions de retransmission les plus favorables à la sonorité d’un orchestre, et autres événements musicaux. On recherche les conditions les plus à même de reproduire la sonorité de différents instruments, de tel type de voix,…. Nous sommes dans les années 20, ne l’oublions pas ! La première retransmission depuis une salle d’opéra avait eu lieu en 1924, et l’effet stéréo était dû à la disposition de plusieurs micros.
Ainsi, sur l’impact de la radio, phénoménale découverte alors, Kurt Weill ne sera pas le dernier à s’émouvoir dans certains articles, des dizaines de milliers d’auditeurs tenus en haleine par des combats de championnats du monde de boxe ! Il va participer à l’élaboration des bases les meilleures possible d’un art radiophonique. Weill écrira deux œuvres expressément destinées aux stations radiophoniques, notre cantate et le tableau musical du Vol de Lindbergh, sur des textes de Bertolt Brecht. Il écrit donc de la musique pour la radio, et se préoccupe ferme des conditions acoustiques du studio, du micro, etc…tout en écrivant sous les contraintes des besoins de la radio d’alors, et même en tenant compte des besoins de ce public nouveau qui n’a rien à voir avec celui d’une salle de concert. Des impératifs qui sont à des années-lumière de la musique telle que nous la saisissons et fabriquons de nos jours.
Le contenu du Requiem berlinois correspond sans aucun doute aux sentiments et aux opinions des couches les plus larges de la population. Le compositeur a tenté d’exprimer ce que l’homme des grandes villes de son temps pensait du phénomène de la mort. La grande Guerre est terminée depuis quelques années seulement, et par dessus, la grippe espagnole a fait plus de morts encore. Il paraît que quelques censeurs radiophoniques ont crû devoir douter des intentions du compositeur.
L’ouvrage a été composé en novembre et décembre 1928 et créé le 22 mai 1929. Il célébrait donc le dixième anniversaire de la fin de la guerre, mais aussi la fin de la révolution du Mouvement Spartakus, ce mouvement d’extrême gauche marxiste fondé entre autres par Rosa Luxembourg en 1916 et étouffé en 19. On censurera d’ailleurs le texte de Brecht là où il évoquait l’égérie de ce mouvement. La diffusion de la cantate fut repoussée plusieurs fois jusqu’à sa création, tandis qu’aucun autre émetteur ne voudra retransmettre l’œuvre.
Les différentes parties de l’œuvre devraient comporter un type déterminé de compositions vocales avec petit orchestre soit, une ballade, La Mort dans la forêt (Vom Tod im Wald) pour voix de basse et dix instruments à vent, (deux clarinettes, basson, contrebasson, deux cors, deux trompettes, trombone ténor, trombone basse) puis un lied, On ne peut aider un homme mort, extrait du finale de l’opéra Mahagonny, suivi d’une ballade La Fille noyée (avec accords de guitare) et une Épitaphe (mélodie au saxophone) pour sa pierre tombale, deux Chants sur le soldat inconnu sous l’arc de triomphe, le premier pour plusieurs voix, le second pour baryton et orchestre et enfin pour terminer, un Grand choral d’actions de grâces pour chœurs d’hommes et orchestre.
Quelques mots sur les derniers instants de Wolfgang-Amadeus Mozart.
Au cours de l’été 1791, son dernier, Mozart reçut deux personnages dans son appartement de Vienne. Le premier vient lui commander un opéra pour les fêtes du couronnement de Léopold II qui devait avoir lieu à Prague. C’est en fait l’opéra : La Clémence de Titus, qui vous attend d’ailleurs au Théâtre du Capitole en juin de cette année ! Le deuxième lui annonce que son maître, soucieux de rester dans l’anonymat, souhaite lui commander un requiem. Grâce aux recherches menées depuis régulièrement sur tout ce qui se rapporte de près ou de loin au compositeur, on connait maintenant l’identité du commanditaire et ce, grâce au contrat signé. Il s’agit du comte Franz von Walsegg zu Stupach qui avait pour habitude de commander des œuvres à des compositeurs professionnels et de les faire passer pour siennes par la suite. Pratique non exceptionnelle ! Pour ce requiem, le comte demande à être livré courant 1792 ! Les émoluments proposés n’étaient pas, alors, à négliger et le marché fut conclu.
Mozart dut faire un choix. S’il esquissa très vite quelques éléments de « cette mort en musique », il commença par l’opéra dont la création eut lieu le 6 septembre 1791. En même temps, il termina un autre opéra auquel il tenait tant, La Flûte enchantée, cet “oratorio maçonnique“, son dernier, qui fut créé le 30 septembre 1791. Œuvre dans laquelle, le musicien mettra le meilleur de lui-même, les dernières réserves ou presque de ses forces créatrices. Ce n’est qu’au début du mois d’octobre , soit tout juste deux mois avant sa mort, que Mozart put enfin se consacrer à sa deuxième commande, complètement. Pour employer une expression actuelle, notre génie est, question travail “charrette“ et donc dans un état de “burn out“ total. De plus, il est seul à Vienne. Sa femme Constance suit une cure à Baden-Baden. Elle ne reviendra à Vienne que le 6 octobre. Mozart est déjà malade. L’automne sera terrible. Effrayé et superstitieux, Mozart, à bout, sent la fin prochaine et redoute l’inachèvement de la commande. Il meurt le 5 décembre avec un Requiem inachevé.
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Michel Grialou
Odyssud Blagnac
Les Éléments / Les Passions
lundi 12 et mardi 13 novembre 2018
Photos Requiem Mozart © Thomas Guillin