Le jeu, un film de Fred Cavayé
Pour son sixième long, ce réalisateur, tout nouveau quinquagénaire, nous propose un huis clos formidablement tout à la fois anxiogène, hilarant et porteur en creux d’un regard sans complaisance sur nos modes de communication actuels, ici nos téléphones portables.
Une poignée d’amis se retrouvent pour un dîner chez l’un d’eux. Mariés, pacsés, célibataires, il y en a pour tous les goûts.
Ils se connaissent depuis longtemps et n’ont rien à se cacher. Aussi, est-ce tout naturellement que l’idée d’un jeu arrive dans la conversation. Mettons tous nos téléphones portables sur la table et lisons de concert tous les messages que nous y recevrons le temps du repas. Pour certains la démarche est plaisante, pour d’autres l’idée paraît bien saugrenue. Mais voilà, puisque nous ne nous cachons rien, où est le danger ? D’hésitations en rires plus ou moins jaunes, le jeu commence. Le massacre avec… Derrière ce qui peut sembler anecdotique, c’est toute la comédie humaine qui se joue et Fred Cavayé y excelle. Attentif à donner un sens cinématographique à ce qui ressemble à une pièce de théâtre, il donne à chacun de ses comédiens une scène qui en dit long sur nos contemporains. Avec en prime une séquence foudroyante via le téléphone entre un père et sa fille. L’acmé du film certainement. Anthologique ! Tous les comédiens sont à saluer largement : Bérénice Bejo, Suzanne Clément, Stéphane de Groodt (sur ses sommets), Vincent Elbaz, Grégory Gadebois (toujours juste), Doria Tillier (sensiblement en retrait), Roschdy Zem et Fleur Fitoussi. Avec un twist final inattendu qui redouble l’intérêt de cette comédie intelligente et parfaitement maîtrisée.
Robert Pénavayre