Les 8 et 9 juin prochains, la Halle aux Grains accueille l’une des œuvres sacrées les plus théâtrales de tout le répertoire. La Messe des morts, composée par Giuseppe Verdi afin d’honorer son compatriote le poète Alessandro Manzoni, place en effet au service de la liturgie toutes les caractéristiques dramatiques développées par le compositeur sur les scènes d’opéra. Tugan Sokhiev dirigera son Orchestre national du Capitole ainsi que la belle phalange chorale de l’Orféon Donostiarra et un quatuor prestigieux de solistes.
Après avoir connu un grand succès avec l’opéra Aida en 1871, Verdi se lança dans la composition de sa Messa da Requiem en mémoire du poète Alessandro Manzoni, mort en 1873 et qui s’était engagé comme lui pour l’unité italienne au sein du Risorgimento, dans un idéal de justice et d’humanité. Verdi fut si ébranlé par la mort de Manzoni qu’il ne put se joindre au cortège funèbre lors de ses obsèques.
L’histoire de la composition de cette œuvre monumentale débuta quelques années auparavant avec la commande passée à plusieurs compositeurs italiens pour écrire une messe de requiem à la mémoire de Gioacchino Rossini mort le 13 novembre 1868. Verdi composa à cet effet la treizième et dernière partie, le Libera me. La Messa per Rossini n’ayant jamais été exécutée, Verdi envisagea rapidement de composer un requiem entier à partir du Libera me. Ce projet ne prit forme qu’avec la mort de Manzoni. Verdi offrit à la municipalité de Milan la composition d’une messe en son honneur, d’où le titre originel de Requiem de Manzoni.
La création eut lieu le jour du premier anniversaire de la mort de Manzoni le 22 mai 1874 en l’église San Marco de Milan sous la direction du compositeur lui-même. La Messa da Requiem fut accueillie avec un grand enthousiasme et trois autres exécutions furent réalisées à la Scala. Verdi lui-même dirigea le Requiem huit jours après à Paris, à l’Opéra-Comique, puis en 1875 à Londres et à Vienne. En Allemagne, les premières ont eu lieu en décembre 1875 à Cologne et Munich.
Le texte et la structure de l’œuvre adoptent parfaitement la liturgie catholique romaine du service des morts, en dépit de l’athéisme affiché du compositeur. La distribution correspond à celle d’un orchestre d’opéra d’une centaine d’exécutants (similaire à celui de Don Carlos) avec quatre solistes et un chœur.
Pour l’exécution de cette œuvre magistrale, seront réunies à Toulouse la soprano libano-canadienne Joyce El-Khoury, qui interprétait il y a peu Musetta (La Bohème) au Teatro Real de Madrid, et la mezzo-soprano russe Anna Kiknadze, de retour à Toulouse après Iolanta en 2010 et Les Fiançailles au couvent en 2011 et 2015. À leurs côtés, le ténor Saimir Pirgu, qui interprétait le Requiem de Berlioz au Théâtre Bolchoï de Moscou avec l’ONCT en 2016, et la basse ukrainienne Vitalij Kowaljow. Internationalement célébré comme l’un des meilleurs chœurs actuels, l’Orféon Donostiarra s’associera à l’Orchestre national du Capitole pour une soirée mémorable placée sous la direction de Tugan Sokhiev.
Signalons qu’un nouveau DVD de l’ONCT et de son directeur musical paraîtra en 2018. Il s’agira de la captation au Théâtre Bolchoï de l’exécution d’un autre célèbre requiem, la Grande Messe des Morts de Berlioz enregistrée notamment avec le ténor Saimir Pirgu et le Chœur du Bolchoï.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Orchestre national du Capitole
Tugan Sokhiev, direction
vendredi 8 et samedi 9 juin 2018 • Halle aux Grains (20h00)