La Promesse de l’aube, un film d’Éric Barbier
Adapter à l’écran le roman autobiographique de Romain Gary est un pari fou, déjà tenté en 1970 par Jules Dassin. Fou pourquoi ? Fou parce que cet homme exceptionnel traversa une existence en elle-même follement romanesque. Comment tracer le portrait d’un homme qui fut tour à tour cinéaste, écrivain, ambassadeur, héros de l’aviation militaire, résistant ? Un homme qui voua sa vie entière à satisfaire les désirs d’une mère qui ne pouvait voir en son fils unique que la statue d’une célébrité.
Pierre Niney (Romain Gary) et Charlotte Gainsbourg (Nina)
Le livre est foisonnant, Eric Barbier ne va en retenir ici que les deux tiers, ceux évoquant Romain Gary de sa prime jeunesse à la disparition de sa mère Nina. C’est largement suffisant pour appréhender le pouvoir hors norme que cette dernière détenait sur son fils. Celui-ci, contre vents et marées, lui a consacré son existence. Mégalomane, mythomane, Nina fut un peu de tout cela à l’égard de Romain, quitte à se trouver hors la loi. Mais sans cette folle ambition qu’elle nourrissait vis-à-vis de son petit, Romain aurait-il été Gary ? La relation fusionnelle qui les unissait relevait-elle de sa faiblesse, de son incapacité à conduire sa vie, ou bien d’un amour aussi passionnel que filial ? Dans tous les cas, ce héros de guerre (Commandeur de la Légion d’Honneur), cet écrivain deux fois primé par le Goncourt, chose impossible statutairement pour ce prix prestigieux (la seconde fois il se présenta sous le pseudo d’Emile Ajar), le voici dans toute sa flamboyance. Pierre Niney l’incarne avec un lyrisme sans retenue aucune, comme hypnotisé, happé par l’ampleur du challenge. Il s’y abandonne totalement.
Avant lui, nous découvrons le tout jeune Romain (8/10 ans) et la révélation d’un comédien époustouflant : Pawel Puchalski. A sa suite, Nemo Schiffman ne lui cède en rien pour la période de l’adolescence. Et puis il y a Nina, une mère juive polonaise, exclusive au-delà de l’entendement, émouvante et volcanique à la fois, ne craignant ni Dieu ni Diable, une véritable tour de contrôle allumée en permanence. C’est Charlotte Gainsbourg qui se lance dans cette aventure sulfureuse avec un dynamisme redoutable. Elle est Nina avec une puissance de feu dont franchement elle paraissait jusque-là assez éloignée. Didier Bourdon et Jean-Pierre Darroussin font aussi partie de ce biopic certes partiel mais qui en dit assez long déjà sur le destin d’un homme d’exception.
Robert Pénavayre
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La Promesse de l’aube
Réalisateur : Eric Barbier
Avec : Pierre Niney, Charlotte Gainsbourg…
Durée : 2 h 10
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Eric Barbier – La promesse d’un véritable succès ?
Le jeune Eric est à peine majeur lorsqu’il intègre, en 1979, le prestigieux IDHEC, la Mecque des études cinématographiques. Il lui faudra cependant attendre plus de dix ans avant de réaliser son premier long : Le brasier (1991). Malgré un prix Jean Vigo, ce film est un échec. Quatre autres opus vont suivre. Aucun ne rencontrera un franc succès. Le film sous rubrique le fera-t-il entrer dans la cour des grands ? Rendez-vous très vite pour un verdict qui devrait être plus que clément.