Réflexions futiles, choses vues et souvenirs inspirés par la ville et ceux que l’on y croise.
En 2017, est-ce que l’immeuble du Crédit agricole place Jeanne d’Arc affichera à nouveau l’heure et la température ?
25 décembre 2016, treize heures : bonheur d’emprunter une rue Alsace enfin vide de tout piéton ou presque.
Deux hommes liés à l’islamisme radical ont été arrêtés par le Raid à Toulouse dans la nuit du 26 au 27 décembre, nous apprend la presse. Ils étaient en possession d’armes factices et d’armes légères. Peut-être envisageaient-ils de commettre un attentat le 31 décembre. Ces arrestations sont une bonne nouvelle. Mauvaise nouvelle : chaque jour qui passe nous rapproche du moment où un attentat sera commis, à Toulouse ou ailleurs.
L’autre jour, rue des Filatiers, une jeune femme s’exclame dans son ordiphone : « Je lui ai dit, mais il ne veut pas comprendre. » Phrase qui peut s’appliquer à environ 90 % des relations humaines.
Retour dans les rues des mendiants avec des bébés ou des enfants en bas âge.
Je viens de me rendre compte que le site de La Dèche du Midi, hilarante parodie du quotidien local déjà assez drôle en lui-même, n’existe plus. Aucune trace sur la toile. Étrange…
Mercredi 28 décembre, dîner dans un néo-restaurant largement vanté dans les médias locaux. Le menu affiche comme plat principal un poisson, une viande (chapon) et… des légumes pour les végétariens. Notre table de cinq épargne au serveur la description du plat de légumes et opte unanimement pour le chapon. Celui-ci terminé, Éric lâche : « On aurait peut-être dû prendre les légumes… » De fait, une partie du repas a consisté à énumérer les restaurants où l’on aurait mieux mangé, mais certains étaient fermés.
Ce soir-là, nous avons bien sûr trinqué à la mémoire de Michel Déon dont la mort avait été annoncée quelques heures auparavant. Eric l’avait connu aussi. Un soir de mars 2012 où l’écrivain était de passage à Toulouse, nous l’avions emmené dîner aux P’tits Fayots d’Aziz Mokthari. À déjeuner, c’était La Rôtisserie des Carmes d’Alain Chabrier dont Michel avait pu déjà découvrir la cuisine quelques années plus tôt pour un dîner. Je me souviens que le déjeuner avait été notamment arrosé d’un magnum de Pic-Saint-Loup du Mas Foulaquier puis d’un Faugères du domaine Léon Barral. Après ces agapes, peu avant seize heures, le jeune homme vert âgé alors de 92 ans avait enchaîné par une interview puis par un long débat et une séance de dédicace organisés par Bertrand Le Digabel dans une bibliothèque de la ville. Vint le moment de repasser à table où des bouteilles du muscadet de Joseph Landron étanchèrent la soif naissante. Pour les rouges, ce furent des vins de Jean-Christophe Comor qui aurait aimé être là. Michel Déon – qui ne négligea aucun des vins présentés – fut une nouvelle fois étincelant d’intelligence et d’esprit. À l’occasion, il corrigeait gentiment les petites erreurs sur des dates ou des titres d’œuvres que ses commensaux, dont certains avaient un demi siècle de moins que lui, commettaient – fatigue et alcool aidant. Nous n’évoquerons pas ici l’immense écrivain qu’il fut, qu’il est et qu’il sera. Nous saluerons simplement l’homme, son élégance, son attention aux autres, sa générosité, son humour, sa pudeur, sa légèreté et sa profondeur, sa culture, son goût de la vie, son humilité – qualités rares chez les êtres humains en général et chez les écrivains en particulier.