Réflexions futiles, choses vues et souvenirs inspirés par la ville et ceux que l’on y croise.
À Paris, comme à Toulouse voici quelques mois (voir notre chronique du 7 avril), des habitants se sont mobilisés ces derniers jours contre un projet municipal visant à remplacer d’ici 2019 les 360 kiosques à journaux Art Nouveau, datant d’Haussmann et jugés « obsolètes », par de nouvelles structures. Une pétition lancée sur Internet a rapidement rassemblé plus de 40 000 signatures et la mairie de Paris a alors annoncé sa volonté de préserver un certain nombre de ces kiosques. L’intention affichée par les éradicateurs était de « moderniser » au prix d’une opération chiffrée par ailleurs à 50 millions d’euros. Il faut se méfier de cette injonction à la modernisation, de prime abord imparable (qui serait pour la ringardisation ?), qui sert souvent à remplacer un objet ou un service simple, peu coûteux, efficace et auquel les gens sont attachés par une nouveauté complexe, onéreuse et inefficace. Parmi tant d’autres, on peut citer l’exemple de la suppression des renseignements téléphoniques, le « 12 », au profit de services payants.
À Toulouse, je regrette la disparition du Palais des Sports, ou plus exactement l’époque où il accueillait des concerts. Lui aussi fut jugé obsolète et remplacé dans le domaine des représentations musicales par un rutilant Zénith, avant qu’il ne soit rasé et reconstruit après la catastrophe d’AZF, mais dès lors cantonné à des rencontres sportives. Pour le coup, le Zénith offre incontestablement un confort d’écoute et de vision très largement supérieur à la cuvette d’antan. Pourtant, je suis nostalgique de celle-ci de façon inconsolable, sans doute en partie parce qu’elle accompagna ma jeunesse, mais surtout parce que j’y vis – en gros, du milieu des années 80 au milieu des années 90 – un nombre incalculables de concerts et d’artistes dont les équivalents n’honorent plus de leur présence notre ville et notre Zénith.
Au Palais des sports, durant la période que j’évoquais, on put voir pêle-mêle : Téléphone, Police, U2, James Brown, Yes, Depeche Mode, Simple Minds, The Cure, Dire Straits, Santana, Fela, Sting, Serge Gainsbourg, Michel Jonasz, Al Jarreau, Claude Nougaro, Tears for Fears, Peter Gabriel, Miles Davis, Phil Collins, Iggy Pop, Jacques Dutronc… J’en passe et j’en oublie. Une place coûtait entre 15 et 20 euros d’aujourd’hui.
Au Zénith, je ne suis allé qu’une fois depuis son ouverture en 1999 pour un concert de Toto, groupe vu naguère à quatre reprises au vieux Palais des Sports, dont deux fois avec le regretté Jeff Porcaro sur scène. J’avais acheté des places pour le Reality Tour de David Bowie dont la venue fut annulée à cause de problèmes de santé de l’artiste. J’aurais bien aimé voir aussi Placebo et je crois que c’est à peu près tout. Le Palais des Sports était sans doute obsolète, mais sa programmation reste inégalée.