Chaque mercredi, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir un film américain passé inaperçu lors de sa sortie.
Rien de plus jouissif pour un cinéphile que de rentrer dans une salle de cinéma pour voir un film dont on n’attend rien de particulier et qui se révèle une excellente surprise. Ce fut ainsi le cas au début de l’année 2009 avec ce Yes Man de Peyton Reed que Le Monde, Libération et Le Figaro (pour ne citer qu’eux) avaient souverainement snobé. N’ayant alors rien vu du réalisateur Peyton Reed, c’est la présence de Jim Carrey et de Zooey Deschanel au générique qui nous avait convaincu d’aller jeter un œil sur la chose. Du premier (comme de la plupart des acteurs comiques), il convient de saluer les rôles « sérieux » – par exemple pour lui The Truman Show de Peter Weir et Man on the Moon de Milos Forman – mais il nous avait déjà enchanté dans Dumb et Dumber des frères Farrelly, Disjoncté de Ben Stiller, Fous d’Irène encore des Farrelly, Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry ou Braqueurs amateurs de Dean Parisot. Quant à la belle Zooey Deschanel, nous l’avions repéré dans le merveilleux Presque célèbre de Cameron Crowe, Big Trouble de Barry Sonnenfeld, All the Real Girls de David Gordon Green, Phénomènes de M. Night Shyamalan ou la série Weeds. Le délicieux groupe pop-indé-folk-jazzy-rétro, She & Him, qu’elle formait (et forme toujours) avec M. Ward ne nous laissait pas non plus indifférent. On la vit ensuite dans (500) jours ensemble de Marc Webb, Our Idiot Brother (inédit en France) de Jesse Peretz, l’hilarant Votre Majesté de David Gordon Green ou la série New Girl, toujours étincelante de grâce et de légèreté. Mais revenons à Yes Man.
Depuis son divorce, trois ans plus tôt, Carl Allen, employé de banque sans histoires de Los Angeles, cultive sa solitude et rejette la compagnie des humains. Jusqu’au jour où un ancien ami perdu de vue le convainc d’assister à une conférence de développement personnel animée par une sorte de gourou qui martèle un message simple : OUI. Là, au sein d’un public conquis, Carl est pris à partie par le maître qui scelle un pacte : désormais, Carl doit dire oui à toute demande, toute proposition. Cette nouvelle attitude va bouleverser sa vie. Pour le meilleur et pour le pire…
Sur une trame aussi simple que le slogan d’un politicien en campagne, Yes Man met en place une redoutable mécanique comique autour de Jim Carrey. La métamorphose, le yin et yang : le comédien connaît le registre et y excelle, à l’image de sa géniale composition de schizophrène dans Fous d’Irène. Ce n’est pas vers le ton résolument délirant de ce dernier film que tend Yes Man, mais plutôt vers les rivages plus de la comédie de mœurs et de la comédie sentimentale avec, toutefois, quelques audaces surprenantes. Notre héros apprend le coréen, la guitare, comment piloter un avion, ne refuse aucune sollicitation, pas même une soirée costumée Harry Potter chez un collègue niais ou le site de rencontre femme-perse.com… Tout cela aura son usage. C’est drôle, rythmé, habilement construit. Les seconds rôles sont excellents (mention à Terence Stamp et à Bradley Cooper alors inconnu), Jim Carrey ébouriffant et Zooey Deschanel illumine chaque scène, y compris naturellement celles où son personnage chante accompagné par le groupe Von Iva. De son côté, Carrey pousse lui aussi la chansonnette (notamment Jumper de Third Eye Blind) et s’en tire de manière très convaincante. Entre des séquences de pure comédie et quelques digressions bienvenues (dont une réjouissante virée au Nebraska), Yes Man dessine le visage d’une société infantile et régressive, traversée par des crises de paranoïa. On dit mille fois oui.