Le premier concert d’abonnement de l’Orchestre de Chambre de Toulouse revient en quelques sortes à ses fondamentaux. Les quatre soirées qu’il consacre à ces deux géants si proches que sont Haydn et Mozart remettent en perspective les deux piliers de ce que l’histoire a retenu comme étant la première Ecole de Vienne.
L’amitié profonde qui lia Joseph Haydn et Wolfgang Amadeus Mozart fait parfois oublier leur différence d’âge. Si Haydn naît 24 ans avant Mozart, il disparaît 18 ans après lui. Le maître et l’élève s’appréciaient avec une sincérité et une tendresse émouvantes. Mozart confie à propos de Haydn : « Lui seul a le secret de me faire sourire, de me toucher au plus profond de mon âme… ». Quant à Haydn, il déclare à Leopold, père de Wolfgang lorsqu’il reçoit la série des six quatuors à cordes que lui dédie en 1785 son jeune élève : « Je dois vous le dire devant Dieu, et comme un honnête homme, votre fils est le plus grand compositeur que je connaisse, en personne et de nom ».
Gilles Colliard à la tête de l’Orchestre de Chambre de Toulouse – Photo Classictoulouse –
Les deux hommes entrent en loge de franc-maçonnerie cette même année 1785. C’est d’ailleurs le lendemain de leur initiation qu’ils jouent ensemble, comme ils avaient dorénavant l’habitude de le faire lors de leurs soirées musicales, ces six quatuors dédiés à Haydn.
Néanmoins, leurs musiques présentent autant de similitudes que de différences. L’une des grandes difficultés pour interpréter la musique de Mozart, c’est qu’il faut toujours arbitrer entre les contraires. Juvénile et mature, élégante et féroce, retenue et emportée, simple et profonde, la musique de Mozart est tout cela à la fois. Le grand pianiste Artur Schnabel déclarait à ce propos : « Les sonates pour piano de Mozart sont trop faciles pour les enfants et trop difficiles pour les adultes. » L’interprète doit donc composer un personnage complexe, et jouer plusieurs rôles à lui seul. Rien de tel chez Haydn, dont la musique est plus sereine, bien qu’influencée, périodiquement, par le Sturm und Drang germanique.
Les 24 et 25 septembre à l’Escale de Tournefeuille, les 28 et 29 septembre à l’auditorium Saint-Pierre des Cuisines, l’Orchestre de Chambre de Toulouse et son directeur et violon solo Gilles Colliard ont choisi d’associer la plus populaire des symphonies de Mozart, la 40ème, et deux des concertos pour violon du bon « Papa Haydn ».
La symphonie n° 40 en sol mineur illustre à merveille les tourments contradictoires qui assaillent Mozart. Elle sera jouée dans la belle transcription pour cordes réalisée par Giambattista Cimador, compositeur contemporain de Mozart. Encore marqués par les phrasés du baroque, les deux concertos pour violon de Haydn, proposés par Gilles Colliard en soliste, sont des petits bijoux du classicisme triomphant.
Voici donc un programme sur mesure à la gloire de l’amitié musicale.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Orchestre de Chambre de Toulouse