« Dheepan », un film de Jacques Audiard
A la surprise générale, le dernier long de Jacques Audiard a remporté la récompense suprême du dernier Festival de Cannes. Pourquoi pas ?
Un peu d’Histoire, tout d’abord, pour essayer de tenter de comprendre la situation. Ceylan, île de rêve dans les dépliants touristiques du siècle dernier, aujourd’hui le Sri Lanka, est en fait le théâtre d’une épuration ethnique visant la population tamoule. Avec l’aide de la communauté internationale…. Une véritable guerre civile ravage cette île et c’est en dizaine de milliers de morts que l’on compte les victimes de la junte « démocratique » cingalaise. A la fin des années 70, une organisation armée tamoule, les Tigres, tente de rééquilibrer les droits de sa communauté. En vain. L’acteur, non professionnel, qui interprète le rôle de Dheepan, réfugié politique en France depuis plus de vingt ans, fut au début des années 80, enfant soldat chez les Tigres tamouls.
La scène liminaire de ce film nous met en présence des trois personnages principaux : Dheepan, une femme, Yalimi, et une petite adolescente, Illayaal. Ils sont tamouls et ne se connaissent pas, mais pour avoir une chance de fuir le Sri Lanka, ils doivent former une famille. Les voici arrivés à Paris. Dheepan trouve un travail de concierge dans une barre d’immeubles d’une de ces cités que l’on qualifie de sensibles. Yalimi est aide-ménagère du père grabataire de Brahim (toujours épatant Vincent Rottiers), un caïd local. Pendant qu’Illayaal essaie tant bien que mal de s’intégrer à l’école, la vie suit son cours. Les règlements de compte sanglants se succèdent entre bandes rivales. Les liens qui unissent Dheepan et Yalimi vont se distendre pour ensuite prendre une autre voie. Dans ces lieux de non droit, la vie est parsemée de dangers et l’espoir d’une existence meilleure est plus que réduit. Jusqu’au jour où ces dealers de banlieue s’en prennent à Yalimi. Le Tigre dormant va alors sortir ses griffes. La scène finale se passe quelques années après. Cette famille improbable s’est consolidée et mène une existence heureuse…en Angleterre. Et chacun d’en déduire la morale de cette histoire. Quant à la Palme d’or, même si le film est plus que maîtrisé, gageons qu’elle est venue récompenser les services rendus au 7ème art par le fils de.
Robert Pénavayre