Margaret peint, depuis toujours. De drôles de portraits d’enfants, aux yeux démesurés, dans un style balançant entre le pur kitsh et quelque chose de plus étrange. Sa fille sous le bras, elle fuit un mari étouffant direction San Fransisco, où en cette veille des années 60 souffle un vent libérateur .
Elle va y faire la rencontre de Walter Keane, qui se réclame lui aussi de la grande tribu du pinceau et duquel elle va tomber sous le charme. Il faut dire que Walter est un sacré baratineur qui après lui avoir passé la bague au doigt, va mettre tout son talent à faire connaître leurs œuvres, quitte à s’approprier le travail de Margaret.
J’ai dans l’idée qu’il faut envisager Big Eyes comme un nouveau départ dans la carrière de Tim Burton (genre la fille qui sait tout mieux que tout le monde). Vous constaterez vous – même avec la vision de son dernier long – métrage, que le plus gothique de tous les réalisateurs encore de ce monde a gommé l’univers onirique qui le caractérise, tout comme les mondes imaginaires et les créatures fantastiques.
Ce n’est peut – être pas un mal aux vues des productions des 10 dernières années (Frankenweenie mis à part), tant ces dernières commençaient à souffrir de la marque de fabrique de leur créateur.
Si le Burton nouveau n’a pas encore totalement pris ses marques (visuellement parlant j’entends), Big Eyes reste un film attachant. Basé sur la trajectoire de la vraie Margaret Keane*, le long – métrage explore les arcanes du sacrifice de soi, du mensonge, du besoin à s’exprimer malgré tout, de la résilience.
Archi coloré (vive les fifties !), jouant sur le clair – obscur (autant sur la lumière que dans le parcours des personnages), le film retrace le parcours d’une femme qui se voua tout entière à sa peinture, dans l’ombre écrasante d’un mari mégalomane.
Amy Adams interprète Margaret, frêle mais décidée, Christoph Waltz assumant le rôle du roublard Walter (du Waltz dans toute sa splendeur, cabotin comme on l’aime).
L’über classe Terence Stamp vient compléter ce casting, dans la peau d’un critique d’art acerbe.
Bref, du beau monde à l’affiche, une jolie histoire sur l’écran, un réalisateur qui a fait ses preuves derrière la caméra, on a connu pire comme équation.
En vous remerciant.
Pierrette Tchernio
* : Tim Burton a la bonne idée de clôturer son film par un petit point photo “ que sont – ils devenus “ . Il est assez touchant de découvrir Margaret Keane, devenue vieille dame, posant aux côtés de celle qui l’interprète sur pellicule.