Murmures des murs de Victoria Thierrée-Chaplin, avec Aurélia Thierrée
Les souvenirs, jamais ne disparaissent. Et pourtant ils sont constitués d’images elles-mêmes formées et figées grâce aux choses matérielles qui nous entourent. Seulement, ces choses-là meurent un jour, se craquèlent, se brisent, deviennent poussière et recouvrent de cette fine couche les visions du passé qu’un revers de main tente vainement d’épousseter. L’alchimie du songe a plongé les souvenirs dans le bain révélateur, et les images, qui jamais ne seront matière, voyageront dans l’âme de celui qui rêve.
Un voyage sens dessus dessous, au sein duquel sont enracinées sur le bas-côté de nos actions, comme des bornes kilométriques. La peinture est écaillée et le kilomètre censé nous renseigner sur notre position est un peu effacé. Faire marche arrière, c’est briser le cours du temps : c’est-à-dire retrouver des images déconnectées d’un instant, des images qui flottent dans la coupe d’un sorcier que notre inconscient abrite généreusement, alors que lui s’amuse à nous trahir en tissant des liens absurdes entre des époques révolues. Et il nous contraint même à garder en mémoire des petits objets, comme les chaussures par exemple. Comme si ces chaussures, qu’il faut ranger, était une partie de nous immortelle, qui jamais ne pourrait se loger dans un carton car elles ne prennent sens qu’à nos pieds. Ici, les chaussures à talons renvoient au ballet du film de Michael Powell et Emeric Pressburger, Les Chaussons rouges, séquence relatant le conte d’Andersen, Les Souliers rouges. Un conte dans lequel l’héroïne ne peut s’empêcher de danser dès qu’elle porte ces souliers-là.
John Lavoignat
un article de Ma Théière à mémoire
*À la recherche du temps perdu, (tome VII, Le Temps retrouvé).
>À lire également l’article de Pierre David sur le blog La Maison jaune.