Ils sont de retour ce 3 juin dans le cadre, à nouveau, du cycle Grands Interprètes. Leur précédent concert en octobre 2012, largement plébiscité par un public enthousiaste, ne pouvait que susciter des retrouvailles à la Halle dans le programme suivant :
Hector Berlioz
Carnaval romain, op. 9 Durée 8’
Tableau symphonique créé le 3 février 1844 à la Salle Herz à Paris. Le compositeur exigera pas moins de 56 cordes dans l’orchestre
Manuel de Falla
Le Tricorne, suite n°2
Les Voisins
Danse du meunier
Danse finale – La jota Durée 12’
Trois danses tirées de l’œuvre complète créée à l’Alhambra Theatre de Londres le 22 juillet 1919 par les Ballets russes de Serge Diaghilev sous le titre de El Sombrero de tres picos. Ernest Ansermet dirigeait l’œuvre, la chorégraphie était due à Léonide Massine, les décors et costumes de Pablo Picasso
entracte
Piotr Ilyitch Tchaïkovski
Symphonie n°5 en mi mineur, op. 64
1. Andante – Allegro con anima
2. Andante cantabile con alcuna licenza – Moderato con anima – Andante mosso – Allegro non troppo – Tempo
3. Allegro moderato – Valse
4. Finale – Andante maestoso – Allegro vivace – Molto vivace – Moderato assai e molto maestoso – Presto Durée 50’
Création le 17 novembre 1888 sous la direction du compositeur à Saint-Pétersbourg par l’Orchestre Philharmonique
Le Chef d’Orchestre vénézuélien, Christian Vásquez, très rapidement, internationalement reconnu, est l’un des talents les plus prometteurs du continent américain sur le plan direction orchestrale. Né en 1984 à Caracas, il rejoint l’Orchestre Symphonique de San Sebastian de los Reyes en tant que violoniste à l’âge de neuf ans. Il se produit régulièrement avec le Simón Bolívar Youth Orchestra of Venezuela avec lequel il part souvent en tournée en Europe, aux Etats-Unis, ou en Amérique du Sud.
En 2006, il commence ses études de chef d’orchestre auprès du Maestro J.A. Abreu, qui le soutient depuis le début de sa carrière. Peu de temps après, il est nommé Directeur Musical du Aragua Juvenile Symphony Orchestra Jose Felix Ribas. En 2008, il débute comme Chef d’Orchestre avec le Simón Bolívar Youth Orchestra of Venezuela à Caracas en dirigeant la Symphonie n°2 de Mahler. Il dirige déjà souvent le Teresa Carreño Youth Orchestra of Venezuela.
Puis, ce sera l’Orchestre Philharmonique de Radio France en mai 2008 à deux reprises dans le cadre de projets éducatifs, en juin 2009 pour la Fête de la Musique et en mars 2010. Il poursuit sa collaboration en mars 2011, lors d’un concert à la Salle Pleyel avec le violoniste Frank Peter Zimmermann.
Après ses débuts avec le Gävle Symfoniorkester en octobre 2009, dirigeant la Symphonie n°9 de Dvorak, il est nommé Chef d’Orchestre Invité Principal pour la période 2010-2014. (…..)
Il dirige aussi le Stavanger Symphony Orchestra à partir de la saison 2012/2013. Parmi ses autres débuts remarqués : le Philharmonia Orchestra, la Philharmonie de Monte Carlo, le Vienna Radio Symphony, le Deutsche Radio Philharmonie Saarbrücken Kaiserslautern, le State Symphony Orchestra of Russia, le Singapore Symphony et le Tokyo Philharmonic. Il a également collaboré avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France, l’Orchestre National du Capitole de Toulouse, le Israel Philharmonic, le National Arts Centre Orchestra d’Ottawa, le Los Angeles Philharmonic dans le cadre de leur programme de bourses « Young Artist ».
Parmi les moments les plus importants de la saison 2012/2013 on peut remarquer sa première collaboration avec l’Orchestre de la Suisse Romande, le Leipzig Gewandhausorchester, le Helsinki Philharmonic, le Camerata Salzburg, le Arnhem Philharmonic et le Netherlands Radio Philharmonic. Il revient aussi à Ottawa, Toulouse, Turku et la Haye (pour le Residentie Orkest) en plus de ses engagements réguliers à Stavanger et Gävle.
Le Teresa Carreño Youth Orchestra of Venezuela (TCYOV) est une formation musicale issue du programme académique orchestral de la Fundación Musical « Simón Bolívar » (Fundamusical Bolívar), plus connue sous le nom de « El Sistema ».
Fundamusical Bolívar inclut des groupements musicaux répartis dans 286 centres académiques et réunit 400 000 bénéficiaires répartis dans tout le Venezuela. 75% des enfants présents dans la fondation vivent en dessous du seuil de pauvreté. « Pour les enfants avec lesquels nous travaillons, la musique est pratiquement le seul moyen permettant d’obtenir un avenir social digne. La pauvreté signifie la solitude, la tristesse, l’anonymat. Un orchestre est synonyme de joie, motivation, travail en équipe, ambition » José Antonio Abreu.
En dépassant son rôle culturel, la Fundación Musical Bolívar emploie plus de 15 000 personnes dont les talents et les compétences s’étendent de la fabrication d’instruments à l’administration artistique, en passant par les technologies de l’information et de la communication. L’Orchestre est composé actuellement de 164 jeunes musiciens, membres du Conservatoire de musique Simón Bolívar, de l’Université Expérimentale des Arts (UNEARTE) et des différentes académies du « Sistema ». Chacun a reçu une formation artistique et technique spécialisée selon son instrument.
À travers sa formation et son organisation académique rigoureuse, ce jeune orchestre propose à ses musiciens un niveau de formation extraordinaire. Le TCYOV se produit régulièrement ……Il est fier de développer sa conception musicale et artistique, afin d’atteindre l’excellence et d’être une source d’inspiration incarnant les objectifs et la philosophie de Fundamusical.
En 2009, le TCYOV joue sous la direction de Gustavo Dudamel, lors de la cérémonie du “2009 TED Prize Award” diffusée en direct par satellite depuis Caracas. Cette même année, l’orchestre a rejoint Plácido Domingo dans un concert au Vénézuela dirigé par Eugene Kohn et accompagné par le pianiste Jean-Yves Thibaudet.
À la fin de 2010, l’orchestre a participé à sa première tournée en Europe, à Bonn (Festival Beethoven), à Berlin, sous la direction de maestro Simon Rattle, à Vienne, Amsterdam, Madrid et Londres.
En 2012, sous la direction de Christian Vásquez, l’orchestre a effectué une nouvelle tournée européenne et s’est produit à Vaduz, Hambourg, Toulouse, en octobre et Stavanger.
CARNAVAL ROMAIN
Une orchestration subtile et éclatante, magistrale, caractérise ce tableau symphonique Carnaval romain – 1844 – du compositeur Hector Berlioz, inséparable de son opéra Benvenuto Cellini – 1838. Conçu comme une seconde ouverture à son ouvrage malchanceux boudé à la création, ce tableau reprend quelques grands moments de l’opéra. C’est comme un best of instrumental, du bref Allegro con fuoco puis l’Andante sostenuto de départ jusqu’à l’Allegro vivace. Si l’on revient en 1838, le plus grave défaut de Benvenuto Cellini, hormis son livret boiteux, c’est son extrême qualité musicale, ses exigences encore inconnues des instrumentistes et chanteurs de théâtre, à savoir, la fougue virevoltante des rythmes, le galbe des courbes mélodiques, les teintes inusitées de l’orchestration, le tonus des nuances dynamiques. Autant de nouveautés qui vont bousculer le confort routinier des interprètes et du public d’alors.
Andalou par son père, catalan par sa mère, Manuel de Falla est un authentique représentant de la musique espagnole du XXè siècle dont la renaissance a pour maître Felipe Pedrell qui prêche un retour aux sources , à la tradition et à l’art national. Il trace la voie qu’Albeniz et Falla vont poursuivre. Manuel de Falla aura vécu pourtant sept ans à Paris de 1907 à 1914, subissant l’influence de ses amis, Debussy, véritable facteur catalytique auquel il ne manquera pas de rendre hommage, Dukas, Ravel. Concernant son écriture, le souci de la forme, la concision de l’expression, la clarté, la sobriété de l’instrumentation permettent d’attribuer le qualificatif de « classique » au compositeur et pianiste.
LE TRICORNE
Entre L’amour sorcier (1915) et Les Tréteaux de Maître Pierre (1923) s’inscrit Le Tricorne. Entre une œuvre dépouillée, qui exclut tout élément pittoresque et un drame frémissant d’amour et de sorcellerie, c’est une pantomime joyeuse, puissamment expressive, que le public va accueillir triomphalement. Opéra bouffe en forme de ballet, Le Tricorne tire son argument d’une nouvelle d’Antonio de Alarcon. C’est l’histoire des amours d’un meunier et de sa femme, un moment contrariées par les entreprises d’un galant suranné, le corregidor (magistrat) du lieu, l’homme au tricorne. Malgré sa cour empressée, ses beaux habits, et le dévouement de ses menaçants alguazils, il ne sera jamais que le dindon de la farce, celui qui, au final est lancé en l’air dans un drap, comme un pantin.
Du ballet intégral rarement donné, la Suite n°2 comprend trois danses de la deuxième partie, la Danse des voisins, la Danse du meunier et la Danse finale dite la Jota. La première est une seguedilla pleine de vitalité évoquant à merveille l’ivresse collective d’une soirée andalouse tandis que le meunier va danser sa trépidante farucca, plus violente et plus lourde, page typique du style flamenco, qui s’interrompt brutalement avec son arrestation par les alguazils. Le ballet s’achève avec une jota aragonaise qui réunit tout le village pour la déconfiture du prétentieux corregidor, un mouvement rapide à l’orchestration étincelante, la plus belle page de la partition complète, source d’une musique à la richesse admirable, tour à tour noble, ironique, joyeuse, d’une constante élégance, et toujours au service de la danse, Manuel de Falla soulignant le jeu de chaque personnage avec une force d’évocation extraordinaire.
SYMPHONIE N°5
C’est dans son domaine de Frolovskoïe, près de Moscou, qu’après avoir fait fortune, Tchaïkovski entreprend son travail sur la Cinquième, le 18 mai 1888. Le compositeur est, sur le plan psychologique, en proie à une profonde dépression écrivant : « Est-il possible que je ne sois entièrement dépeint ? je n’ai ni inspiration, ni goût. » Mais, dès le 30, il ajoute : « Je suis enfin arrivé à tirer de mon esprit rebelle, malgré toutes ces difficultés, une symphonie. » Le 26 août, il annonce la fin de son travail : « ma symphonie est terminée et il me semble que ce n’est pas un échec et qu’elle est bonne. » Depuis la Quatrième, onze ans se sont écoulés qui auront donné quatre opéras, quatre suites orchestrales, le fameux Concerto pour violon.
Mais, qu’en est-il de Piotr Ilytch Tchaïkovski ? L’homme semble un prédestiné de la douleur, qui sort d’une sphère de souffrances, séjourne sur la terre pour son martyr et retourne dans le néant. Attirants ou antipathiques, tous ses héros ou presque connaissent un destin tragique, accablant. Ceux de ses opéras comme ceux de ses poèmes symphoniques seront victimes du fatum. Dans la Dame de Pique, Hermann, c’est Piotr. Il est aussi Tatiana dans Eugène Onéguine. Puis, il est aussi, Romeo, Francesca de Rimini, Hamlet, Manfred, tous frères de malheur de Piotr qui déverse à travers eux sa propre angoisse existentielle. Même Jeanne d’Arc, la Pucelle d’Orléans, devient elle aussi une victime du fatum…
Sa correspondance montre constamment le lien entre les souffrances de sa vie privée et sa musique. Sa démesure et son lyrisme sont incompréhensibles si l’on ignore sa difficulté de vivre dans une société qu’il estimait hostile, son homosexualité, très mal vécue, ni assumée, étant ressentie comme une véritable entrave, une menace qu’il subira toute sa vie. Le personnage aura en même temps une fâcheuse tendance à s’immerger dans le malheur avec une complaisance plutôt morbide.
Michel Grialou
Les Grands Interprètes
Teresa Carreño Youth Orchestra of Venezuela
Christian Vásquez (direction)
mardi 3 juin à 20h00 – Halle aux Grains
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