Asmaa travaille à l’Utopia de Toulouse. Si elle qui vous a accueilli en novembre dernier pour voir « INSIDE LLEWYN DAVIS », vous vous souvenez forcément d’elle : elle ne vous remettait le ticket que si vous réussissiez à prononcer distinctement le titre en entier. « le film, Inside-quelque-chose… » ne suffisait pas.
Je suis restée toute l’avant séance au niveau du guichet, tellement la scène était drôle. Une fois le niveau L2 en anglais des spectateurs validé, Asmaa m’a parlé de son projet de créer un festival autour du printemps arabe.
Je suis donc toute émue, car ce qui n’était qu’un projet il y a 5 mois s’est concrétisé. En effet, débute ce soir le « PRINTEMPS ET REVOLUTIONS ARABES » au cinéma Utopia Toulouse.
Peux-tu te présenter et nous expliquer ce qui t’a donné envie de créer ce « PRINTEMPS ET REVOLUTIONS ARABES » ? :
Je m’appelle Asmaa Alatawna, je suis franco-palestinienne. Après des études en Relations Internationales à Sciences Po Toulouse, j’ai été journaliste pour l’agence EFE (agence espagnole de presse internationale) et au syndicat palestinien des journalistes ; puis j’ai travaillé au sein de l’UNRWA, l’organisation des Nations Unis pour les réfugies palestiniens. Depuis un peu plus d’un an, j’ai rejoint l’équipe de l’Utopia. J’ai voulu relier mes deux cultures et mes différentes expériences, par le biais de films et de rencontres consacrés aux révolutions arabes.
Quelle programmation envisageais-tu ?
Avec le soutien du directeur de l’Utopia, Jeremy Breta, j’ai trouvé la liberté de créer cette manifestation comme je l’imaginais. À l’approche de leur troisième anniversaire, nous avions envie de revenir sur ces révolutions arabes, d’approfondir leurs conséquences, en donnant la parole à ceux qui les ont vécues. Nous avons surtout voulu que ces projections et ces débats soient de vrais témoignages, vus de l’intérieur, une sorte de lien entre ces pays et le nôtre, qui rompt avec la manière de les percevoir habituellement.
Mettre en avant des films en provenance de pays qui ont rarement la chance d’arriver jusqu’à nos écrans nous a paru aussi important. Nous avons donc choisi de mettre en parallèle trois pays, qui sont chacun aujourd’hui dans des situations très différentes : la Tunisie, l’Égypte et la Syrie, à travers 3 documentaires inédits en France. Enfin, la fiction syrienne « ROUND TRIP » clôturera le Festival avec un peu plus de légèreté et en musique.
As-tu rencontré des difficultés pour cette première édition ?
Trouver des films plus rares, moins conventionnels, plus risqués, qui ne sortiront peut-être jamais en France fut difficile. Il a fallu dénicher des films susceptibles de nous intéresser, avoir ensuite les moyens de les visionner pour confirmer nos choix, et trouver des contacts en France pour pouvoir connaître les possibilités et les conditions de diffusion. Nous ne pouvons pas nous permettre de les acheter au même prix que les festivals. Nous avons d’ailleurs plusieurs fois modifié notre programmation en raison de conditions financières exorbitantes pour un cinéma indépendant comme le nôtre.
Il a fallu ensuite trouver des invités et, là encore, les faire venir jusqu’à nous à moindre frais. Heureusement, nous avons eu la chance de discuter avec des intervenants très compréhensifs, désireux de participer à cette manifestation. Ensemble, nous avons trouvé des solutions pour qu’ils puissent être présents.
Je suis fière de pouvoir présenter ces films qui ne sont pas sortie en France « RETOUR A HOMS », prix du jury à Sundance 2014, « AU CAIRE DE LA REVOLUTION » en cours de production, et « ROUND TRIP », cette histoire d’amour qui présente aux spectateurs une petite lumière d’espoir sur la société avec cette histoire d’amour qui doit rester secrète. Le concert de musique arabe/occidentale avec le groupe Haneen me ravit.
Je suis très heureuse de pouvoir participer et soutenir ces révolutions, sans pouvoir malheureusement être sur le terrain. Ayant moi-même grandi dans des pays gouvernés par des dictateurs, ces films m’ont fait entendre la voix de ces peuples et représentent pour moi l’espoir et le rêve arabe. Aucune révolution ne peut aboutir du jour au lendemain. Je ne vivrai peut-être pas la fin des ces révolutions mais mes enfants probablement : le peuple ne se laissera plus manipuler, que soit par des islamistes ou des militaires
As-tu des futurs projets ?
C’est une première édition, mais nous espérons que ces projections seront l’occasion de rencontrer des gens, des associations, de créer des liens, de fédérer toutes celles et ceux que ces sujets intéressent pour les prochaines éditions. D’autre thèmes reliant le monde arabe à l’Occident pourront être abordés, loin de toutes manipulations médiatique et politique. Les débats seront piquants et refléteront les point de vue des invités : je leur laisserai la liberté de s’exprimer et de débattre avec un public curieux.
En mai, nous organisons aussi une manifestation pour l’anniversaire de la Nakba palestinienne pour relier les cultures arabe et occidentale.
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La programmation à l’UTOPIA TOULOUSE du PRINTEMPS ET RÉVOLUTIONS ARABES : TUNISIE, ÉGYPTE, SYRIE, du 3 au 6 avril.
Jeudi 3 avril à 20h30, « HOMS, CHRONIQUE D’UNE RÉVOLTE » (RETURN TO HOMS) Talal Derki – documentaire Syrie/Allemagne 2013, 1h28mn VOSTF – Grand Prix du Jury Festival de Sundance 2014.
Cette projection unique sera suivie d’une rencontre avec Samar Yazbek, écrivaine et journaliste syrienne, auteur notamment de « Feux croisés : journal de la révolution syrienne ». À cette occasion, la librairie Floury tiendra une table de livres dans le hall du ciné, avec bien-sûr les livres de Samar Yazbek.
Samedi 5 avril à 14h, « AU CAIRE DE LA RÉVOLUTION », Samir Abdallah, documentaire Égypte/France 2014, 1h.
Cette projection unique sera suivie d’une rencontre avec le réalisateur Samir Abdallah.
Dimanche 6 avril à 10h , « DÉMOCRATIE ANNÉE ZÉRO », Amira CHEBLI et Christophe COTTERET – documentaire Belgique/Tunisie 2012 1h54mn.
Cette projection unique sera suivie d’une rencontre avec Slim Lassoued, médecin franco-tunisien, président départemental de la Ligue des droits de l’homme à Cahors, candidat à l’Assemblée Constituante de Tunisie en 2012, et Lazhar Mendil, militant associatif actif pour l’instauration d’un état démocratique en Tunisie, membre de l’association Jasmin Tunisie Liberté et Démocratie de Toulouse. On vous offre le café avant la projection, amenez quelques viennoiseries à partager…
Dimanche 6 avril à 21h15, « ROUND TRIP », Meyar Al-Roumi – Syrie/France 2013 1h14mn VOSTF – avec Alexandra Kahwagi, Ammar Haj Ahmad
Cette projection unique sera précédée d’un concert de musiques arabes par le groupe HANEEN, fondé en 2009 en France par quatre musiciens venus de différentes villes de Palestine pour rejoindre le conservatoire de Toulouse et présenter leur musique, mélange entre la musique arabe et occidentale (pour cette séance, tarif unique : 8€).
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