Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
West Side Story de Jerome Robbins et Robert Wise
Dans l’univers de la comédie musicale au cinéma, West Side Story a marqué l’histoire tant par nombre des thèmes de Leonard Bernstein devenus des classiques (Maria, America, Tonight, Somewhere…) que par son intrigue – libre transposition de Romeo et Juliette dans le New York de la fin des années 1950. Créé d’abord pour Broadway par Arthur Laurents, Stephen Sondheim, Bernstein donc pour la musique et Jerome Robbins pour la mise en scène, West Side Story a remarquablement franchi l’épreuve de l’adaptation sur le grand écran, l’inspiration de Robbins pour les chorégraphies se mariant parfaitement à la rigueur de Robert Wise qui s’était déjà illustré dans divers genres (du fantastique au film de boxe).
Le scénario (les affrontements entre deux gangs de jeunes – les Jets, des Américains d’origine polonaise, irlandaise et italienne d’une part ; les Sharks d’origine portoricaine – et les amours contrariées d’un couple issu des deux communautés) ancre le film dans des réalités sociales jusque-là largement absentes de la comédie musicale. Communautarisme, racisme, violence juvénile constituent ainsi l’arrière-plan d’un spectacle majestueux, lyrique, totalement cinématographique à l’instar des étonnants plans aériens du début ou des mouvements de caméra servant magnifiquement les chorégraphies.
Rêve américain
Mêlant jazz, classique, musique latino-américaine, les superbes compositions de Leonard Bernstein ne négligent pas l’humour, comme en témoignent les paroles de Gee, Officer Krupke. Sans basculer dans la lourdeur du film à thèse, West Side Story révèle au passage les failles du rêve américain et anticipe dès 1961 la remise en question d’une société travaillée par des tensions qui n’iraient qu’en s’exacerbant.
Cette dimension participe sans doute à la permanence d’une œuvre encensée en son temps (dix Oscars, succès public international) et qui a traversé les époques (un récent remake par Steven Spielberg n’a pas fait oublier le film original et l’a même fait plutôt regretter). Le charme des comédiens (Natalie Wood, George Chakiris, Rita Moreno…) ne compte pas non plus pour rien dans le plaisir intact que fait naître chaque vision de West Side Story, sorte de conte euphorisant et désenchanté sur la fin de l’innocence.
LES FILMS QU’IL FAUT AVOIR VUS