Créée il y a une quinzaine d’années par Aude Géva, Bouduprod est une entreprise de communication audiovisuelle s’adressant autant aux PME de la grande région toulousaine qu’au tissu associatif et aux structures fédératives. Attirée par le formidable potentiel créatif de l’univers circassien, Aude Géva a décidé de s’engager dans ce monde en complète mutation.
Rencontre.
Quels sont vos moyens d’action ?
Dans un premier temps, j’ai une activité commerciale. Puis en tant que productrice et réalisatrice de contenus vidéo (films, motion design), je monte les équipes en fonction des commandes. Après avoir conçu et écrit mes projets, je m’entoure de professionnels les mieux à même de répondre aux besoins de mes clients. Journaliste de profession, je garde personnellement tout ce qui est lié aux interviews car j’aime ces moments privilégiés. Et un jour, avec une cliente qui souhaitait communiquer « autrement », nous avons décidé de créer une conférence-spectacle. C’est ainsi que j’ai rencontré La Grainerie.
Vous vous êtes engagée dans un cercle de mécènes : Le Collectif, qui œuvre en faveur de la Grainerie. Parlez-nous de cette structure et pourquoi vous êtes-vous regroupés dans ce Collectif ?
La Grainerie est une sorte de fabrique des arts du cirque qui accueille les artistes ayant fini leur parcours dans l’Ecole du cirque de Toulouse (Esacto’Lido). C’est plus qu’une résidence artistique, c’est un lieu de rencontre dans lequel se croisent des circassiens de toute l’Europe. L’idée d’un collectif de mécènes est née d’une discussion entre Nathalie Bacon, salariée de La Grainerie, et Jean-Julien Urbain (Ester/Ema). Le challenge était de créer un cercle de mécènes pour renforcer les moyens de La Grainerie et ainsi mieux soutenir les artistes.
Depuis quand faites-vous partie des mécènes de la Grainerie ?
Je suis arrivée dans cet environnement alors que Nathalie et Jean-Julien réfléchissaient à ce projet de Collectif. En mai 2021, j’animais ma première conférence-spectacle pour une cliente, avec des artistes circassiens de La Grainerie. C’était fantastique d’entrer dans cet univers. Et quand j’ai su que ce Collectif était en train de se créer, j’ai décidé de l’intégrer, ayant pu moi-même apprécier le lieu de la Grainerie, l’ambiance et les artistes.
Comment fonctionne ce Collectif ?
Aujourd’hui nous sommes six mécènes rattachés directement à La Grainerie, tout simplement. Il existe une convention de mécénat qui donne droit bien sûr à la déduction fiscale liée à cet engagement. Nous nous réunissons régulièrement autour d’un repas pour discuter des actions que nous pourrions mettre en place ensemble pour la Grainerie. Ambiance très sympa toujours !
Pourquoi vous êtes-vous engagée dans ce mécénat : image, communication, obligation RSE responsabilité sociétale des entreprises à laquelle vu votre taille vous n’êtes pas soumise, conviction personnelle. ?
L’acte de création m’intéresse par-dessus tout. De plus, le cirque est un univers que je ne connaissais pas vraiment. Mon engagement me permet de le découvrir, de l’explorer. J’ai vite réalisé que le cirque est un art qui utilise tous les champs des possibles. Il fait appel autant au corps, qu’à la tête et au cœur. J’ai une éthique personnelle qui me pousse inexorablement vers ceux qui ne sont pas spécialement soutenus. J’ai d’ailleurs bien d’autres engagements associatifs. C’est un peu mon ADN. Globalement je me dirige surtout vers ceux que l’on nomme les « invisibles ». Et le monde du cirque aujourd’hui mérite que l’on s’y intéresse. Donc, j’imagine que vous l’avez compris, mon action de mécénat n’est pas du tout une recherche d’image ou de communication pure. Ce que je souhaite ce sont des rencontres avec ces artistes. Elles me nourrissent énormément et j’espère que j’en fais de même un tant soit peu pour eux. Quand j’étais petite je ne supportais pas le cirque, les clowns en particulier, mais aussi tous ces numéros avec des animaux. Le « vrai » cirque d’aujourd’hui n’a plus rien à voir. Il pose des questions et sème des graines dans la tête du public et les incite à réfléchir. C’est un art militant en ce sens qu’il ose les interrogations fondamentales sur le monde que nous vivons, autour de la tolérance, l’engagement, la résistance… Et puis il y a cette lumière dans la recherche intérieure de ces artistes, une quête qui fait miroir, écho, comme vous voulez, avec notre société et chacun de nous aussi. Il faut les remercier de nous proposer un telle réflexion. Cet échange précieux est tout sauf élitiste. Je cherche dans mon action de mécénat à réunir deux mondes qu’en principe rien ne rapproche : le cirque et l’entreprise. Et je peux vous dire que c’est un univers rempli de découvertes, de surprises, de messages différents en fonction des disciplines déployées.
Quelles disciplines vous attirent plus particulièrement ?
Fin juin, nous montons une conférence-spectacle, nous les mécènes, en binôme avec des artistes. Nous allons inviter à cette occasion nos réseaux respectifs afin d’élargir ce cercle de mécènes. Pour l’instant je ne connais pas encore le contenu de ce spectacle. Mes affinités circassiennes, si je puis dire, m’attirent vers le funambulisme. D’ailleurs je pratique la slackline dès que je peux. Par ailleurs, j’ai rencontré dernièrement « Monsieur le Directeur », un artiste spécialiste de la corde (verticale) avec qui j’ai monté un numéro pour les 15 ans de Bouduprod cet automne. J’ai compris et senti que la corde, que j’avais toujours perçue comme un instrument de torture, était un accessoire fantastique pour créer et « s’élever »… Enfin, comme dit précédemment, enfant, je n’aimais pas les clowns, ils me faisaient peur. Mais, contre toute attente, lors d’une conférence-spectacle avec la Grainerie à Madrid, j’ai vu un clown qui m’a stupéfaite … Comme quoi, le cirque c’est toujours de l’inattendu !
Comment l’activité de La Grainerie croise-t-elle votre propre activité ?
Certes les membres du Collectif s’engagent à soutenir financièrement La Grainerie chaque année. Au-delà de ça, nous apprécions de nous retrouver régulièrement pour échanger avec des artistes, co-construire, et assister à des spectacles à la Grainerie. Tout ceci est bien sur très inspirant, tant personnellement que professionnellement.
Propos recueillis par Robert Pénavayre
> A La Grainerie, quand les arts du cirque inspirent les entreprises…