Adieu Monsieur Haffmann, un film de Fred Cavayé
En portant à l’écran le bestseller théâtral de Jean-Philippe Daguerre auréolé de 4 Molières en 2018, Fred Cavayé interpelle le public sur une question…sans réponse possible. Qu’aurions-nous fait sous l’Occupation : résistant, neutre, collabo ?
Paris, 1941, la France est en partie occupée par les Allemands. Un havre bien hypothétique de paix subsiste au sud de la Ligne de démarcation. C’est là que va se réfugier la famille Haffmann, du moins dans un premier temps la mère et ses trois enfants. Emportant juste une valise, ils attendront ensuite la venue du père, Joseph, qui reste dans sa bijouterie le temps de passer un étrange marché avec François, son employé. Anticipant de peu la rafle dont les Juifs vont être la cible, Joseph donne l’argent nécessaire à François pour qu’il achète la bijouterie, ce dernier s’engageant, à la fin du conflit, à restituer le magasin à son véritable propriétaire. Malheureusement, les contrôles sont devenus beaucoup plus fréquents et le passeur ne prend plus en charge Joseph. Celui-ci n’a d’autre solution que de revenir chez lui, dans son appartement aujourd’hui occupé par le nouveau « propriétaire ».
Des perquisitions ont lieu dans tout le quartier notoirement occupé par des familles juives et Joseph n’a d’autre remède que de s’enfermer dans la cave de l’immeuble. Les jours passent, nourri quotidiennement par Blanche, la femme de François, Joseph reprend clandestinement son métier de joailler. D’autant qu’un jeune officier allemand, le Commandant Jünger, fréquente la bijouterie et apprécie le travail de création de la maison. Tout irait « pour le mieux » lorsqu’un jour, joseph s’aperçoit que les bijoux que lui fait transformer François sont des pièces volées à des familles juives. L’atmosphère se tend entre les deux hommes… Si l’on excepte un chantage ignoble dont je vous laisse découvrir la triviale teneur et qui n’est pas forcément le meilleur de ce scénario, le fil rouge du film réside bien dans la lente transformation de François en ignoble salaud. Et tout cela sous couvert du bien de sa femme et de lui-même au passage. Devenu pire que les Allemands, il va transformer la joaillerie en porte donnant sur l’enfer. En creux bien sûr une question qui taraude toutes les générations nées après la Seconde Guerre mondiale : qu’aurions-nous fait alors : résistant, simple observateur ou collabo ? Se poser cette question n’est pas forcément y répondre mais s’abîmer dans des réflexions où se croisent intérêt personnel, patriotisme et surtout la peur. Neuf fois sur dix les questionnés répondent honnêtement ne pas savoir. C’est dire…
Porté par un trio d’acteurs au mieux de leur talent : Daniel Auteuil (Joseph), Gilles Lellouche (François) et Sara Giraudeau (Blanche), sans oublier Nikolai Kinski (le fils de…) composant ici un glacial Commandant Jünger, ce film apporte sa pierre à l’édifice du devoir de mémoire, afin que nul n’oublie les horreurs dont l’Homme est capable lorsque le monstre s’éveille.
Daniel Auteuil – Un pilier du cinéma hexagonal
Lui qui est né à Alger et a grandi dans cette bonne ville d’Avignon n’a rien moins que des chanteurs d’opéra comme parents ! Comment alors ne pas le retrouver au Cours Florent ? C’était évident ! C’est l’immense Georges Wilson qui lui offre son premier rôle. Il a 20 ans, nous sommes en 1970. C’est le début d’une gigantesque carrière avant tout cinématographique. Avec 100 films à son palmarès, Daniel Auteuil peut également avancer 2 Césars du Meilleur acteur (1987 Jean de Florette et 2000 La Fille sur le pont) ainsi que le Prix d’Interprétation masculine Cannes 1996 pour Le Huitième jour. Il a tourné avec et pour les plus grands, abordant avec le même bonheur comédie et drame. Assurément l’un des plus grands acteurs français de l’histoire du cinéma.