Un Triomphe, un film d’Emmanuel Courcol
Voilà certainement la pépite cinématographique de cette rentrée. Inspiré d’une histoire vraie, le film nous convie à un délicieux voyage en Absurdie porté par des comédiens exceptionnels et un Kad Merad sur ses sommets.
L’aventure est plus que vraie. C’est celle de cet acteur suédois, Jan Jönson, qui décide en 1985 de monter le chef-d’œuvre de Samuel Beckett, En attendant Godot (créé en 1953), avec une troupe improbable de…prisonniers d’un quartier de haute-sécurité. Ravi par ce challenge, le dramaturge irlandais (1906-1989) donne son feu vert et voilà la petite compagnie de bras cassés volant de succès en succès. Jusqu’à…
Le second long d’Emmanuel Courcol, après Cessez-le-feu en 2016, s’inspire très étroitement de cette incroyable odyssée théâtrale. Nous découvrons donc Etienne (Kad Merad à son meilleur), comédien en roue libre autant personnellement que professionnellement. Pour faire bouillir la marmite, il accepte d’animer un atelier- théâtre dans une prison. Les cinq détenus devant participer à l’expérience le reçoivent un peu fraîchement, souhaitant eux faire du stand up plutôt que de réciter les fables de la Fontaine. Mais le coup de génie d’Etienne, en discutant de leurs conditions de détentions, sans chercher à savoir pourquoi ils en étaient là, c’est de comprendre qu’en fait, ces hommes passent leur temps à attendre. Derechef il leur propose de les mettre en scène dans l’un des chefs-d’œuvre du XXème siècle, En attendant Godot. Pour rappel, c’est l’histoire de deux hommes, Vladimir et Estragon, qui, dans un lieu improbable peuplé d’un seul arbre, attendent l’arrivée d’un dénommé Godot. D’autres personnages viendront croiser ce no mans ’land, mais Godot ne viendra pas. Bien des thèses ont été échafaudées sur ce Godot. Qui est-il en fait ? Peu importe car ici ce n’est pas le sujet. Ce que fait le réalisateur, c’est un film sur la métaphysique du théâtre.
Au travers des tempéraments turbulents, pour le moins, des prisonniers, ce n’était pas gagné d’avance. Et pourtant nous nous laissons rapidement gagner par une empathie formidable envers ces fracturés de la vie et cet Etienne qui, tout en reconstruisant ses acteurs, va se reconstruire lui-même. Il faut tous les citer tant ils sont vertigineux de subtilité et juste de ton. Il en est ainsi de David Ayala, Lamine Cissokho, Sofian Khammes, Pierre Lottin, Wabinlé Nabié, Alexandre Medvedev et Saïd Benchnafa. Ils ont l’immense talent de nous faire croire à cette virtuose conjugaison s’opérant sous nous yeux entre leur vie réelle et toute l’absurdité contenue dans la pièce de théâtre. Brillant ! Epoustouflant ! Magistral ! Césars en vue !
A voir toutes affaires cessantes.
Kad Merad – Il est devenu incontournable
Chanteur et batteur de divers groupes de rock, le jeune Kad dévoile ses talents comiques au Club Med. Le théâtre le tente et il a la chance, élève comédien, de rencontrer Jacqueline Duc. Elle lui fera jouer les grands classiques français, de Molière à Feydeau. En 1991, il a 27 ans et devient animateur radio. Avec Olivier Baroux, il va former le duo comique Kad et Olivier. La télévision s’empare de ce talent. Simples apparitions, puis seconds plans, Kad se laisse saisir par le 7è art, de la comédie au drame. Le comédien fait un saut immense vers la célébrité en jouant dans Bienvenue chez les Ch’tis et ses vingt millions d’entrées. Abonnés aux séries télé dont Baron noir, Kad Merad trouve, dans le film sous rubrique, l’acmé, à ce jour, de sa carrière.