La Maison européenne de la photographie, à Paris, propose actuellement trois expositions, l’une consacrée à un maître, Edward Weston, déjà évoquée sur Culture 31, les autres à deux jeunes artistes jamais exposés en France : Tyler Mitchell et Felipe Romero Beltran.

« Untitled (Topanga II) ». Photo Tyler Mitchell
Tyler Mitchell a à peine 30 ans. Il s’est pourtant déjà fait un nom dans le monde de la mode et des magazines sur papier glacé. Un statut enviable qui ne le réduit en rien à la futilité, ce que démontre l’exposition que la Mep lui consacre sous le titre « Wish this was real » (Souhaitant que cela soit vrai). Venu du monde du skate, qu’il a longtemps pratiqué avant de le documenter, le natif d’Atlanta y a « fortement ressenti l’appartenance à une communauté ». Et c’est ce qu’il raconte quand il photographie ses amis en pleine insouciance ou qu’il met en scène, dans de grands formats couleur, une « pastorale postcoloniale » dans laquelle des Noirs rejouent des tableaux panthéistes dans lesquels ils ne figuraient jamais. Même préoccupation avec ses portraits de familles réalisés, tout près de chez lui, à Brooklyn, dans des maisons transmises de génération en génération, photos sépia et simples objets du quotidien rappelant le passage des aînés. Belle découverte que celle de l’univers de Tyler Mitchell, à la fois sophistiqué esthétiquement et puissant émotionnellement. Le catalogue de l’exposition est paru chez EXB.

« Dialect », 2022. Photo Felipe Romero Beltran
Originaire de Colombie, Felipe Romero Beltran, 33 ans, habite désormais à Paris. Sensible aux questions d’exil, il s’est attaché à décrire la tension physique, corporelle, qu’implique le fait d’être loin de chez soi, porté par un désir, un rêve de vie meilleure. Après un long travail d’approche, le photographe a sympathisé avec un groupe de jeunes Marocains hébergés dans un centre de migrants, à Séville. Ses modèles sont dans la force de l’âge. Il les captent dans une intimité fraternelle où ils révèlent pourtant une grande fragilité psychologique, ce que confirme une vidéo dans laquelle ils doivent lire un long texte en espagnol – langue qu’ils maîtrisent mal – pour escompter acquérir une nouvelle nationalité. Même s’il réunit peu d’images à la Mep, le projet « Dialect » de Felipe Romero Beltran est d’une grande force, redoublée par une mise en espace originale, sur des panneaux de placoplâtre, en partie ajourés. Cette exposition se terminant dans quelques jours, on peut se procurer deux ouvrages parus chez Loose Joints pour se familiariser avec l’oeuvre du photographe colombien : « Dialect » et « Bravo ».
A la Maison européenne de la photographie, Paris, expositions de Tyler Mitchell jusqu’au 25 janvier 2026 et Felipe Romero Beltran jusqu’au 7 décembre.

