La saison du Cycle Les Grands Interprètes démarre sa nouvelle saison à la Halle, à 20h, le jeudi 10 octobre avec un nouveau venu à la Halle, le China National Symphony Orchestra dirigé par le chef d’orchestre sino-américain Tan Dun qui nous donne en ouverture l’une de ses créations originales, le Secret Language of Wind and Birds. Suivra la Symphonie concertante pour violon et alto de Mozart avant L’Oiseau de feu de Stravinski. Le concert-événement est donné dans le cadre du 60è anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France.
Le concert débute par une œuvre de Tan Dun Passacaglia, (forme indubitablement occidentale) ou Secret Language of Wind and Birds (Mobil Symphony Poem). Son inspiration est résolument tournée vers la Chine et son imaginaire instrumental, pour imiter la nature à travers des sons diffusés par des téléphones portables, sans oublier l’orchestre.
Mozart
Pour suivre, de Wolfgang Amadeus Mozart, la Symphonie concertante pour violon et alto en mi bémol majeur, K. 364.
Elle est en trois mouvements : Allegro spiritoso – Andantino grazioso – Presto (tempo di Menuetto) et dure environ vingt-sept minutes. Le compositeur est alors de retour à Salzbourg en ce début de 1779. C’est le retour du fils prodigue dans une cité qu’il n’aime pas et qu’il a fui. Il a 23 ans et se retrouve sous la coupe d’un certain Colloredo qu’il exècre mais qui lui attribue une charge rétribuée dont hélas, le titre ni le montant ne sont guère à son goût. Toute sa correspondance d’alors retrace sa très mauvaise humeur.
1779 sera tout de même une année faste côté composition et ce, jusqu’à l’automne. Cette Symphonie représente d’ailleurs un sommet dans l’intensité expressive qui, longtemps, n’aura pas d’équivalent dans sa création, mises à part les œuvres tournées vers le théâtre. En tant que chef-d’œuvre, certains considèrent qu’elle ouvre la route à tous les concertos à venir de la pleine maturité, en même temps qu’aux dernières symphonies. Pour se faire, il est conseillé de s’intéresser aux éléments de dialogue entre les deux solistes, entre les solistes et l’orchestre, entre les différents groupes de l’orchestre (hautbois, cors, quatuor des cordes où les altos sont divisés), entre tel soliste et tel groupe orchestral, … dialogues multiples sans que l’unité de l’œuvre n’en soit affectée. Question thème, vous retiendrez la musique de l’Andante afin de noter sa parenté avec l’Andantino du Concerto pour piano n°9 “Jeunehomme“ si vous l’avez, dans l’oreille !
Igor Stravinski
L’oiseau de feu – The Firebird.
La version originale pour ballet de 1910 compte une introduction puis les 19 numéros sur 45 minutes environ. N’oublions pas que c’est une musique écrite pour un ballet ! Igor Stravinski a bien compris que le succès public pouvait facilement s’inscrire en choisissant quelques numéros réunis dans une Suite d’orchestre, comme celle-ci, dite de 1919.
On retrouve alors :
Introduction : L’Oiseau de feu et sa danse
Variations de l’Oiseau de feu
Ronde des treize princesses
Danse infernale du roi Kastcheï
Berceuse
Finale
« Au plus fort de l’orage, il y a toujours un oiseau pour nous rassurer : c’est l’oiseau inconnu. Il chante avant de s’envoler. » René Char
L’œuvre nécessite un grand orchestre avec de nombreuses percussions. Un certain Pierre Boulez la voit comme l’une des œuvres orchestrales les plus fouillées de Stravinski, déjà marquée par un style très personnel, en particulier par cette vigueur rythmique que l’on retrouvera deux ans plus tard dans Le Sacre du printemps et Petrouchka. Orchestration chatoyante, transparence des lignes, les couleurs orientalistes, certaines tournures mélodiques populaires mais aussi les violences disons, cataclysmiques et les contrastes dynamiques spectaculaires permettent à cette partition d’être parmi les plus immédiatement accessibles du XXè siècle. Il a été écrit : « Stravinski a fait une œuvre de couleurs, un festin de timbres. À 28 ans, il fait preuve d’une beauté mélodique et il est un génial créateur d’épices sonores, de plaisir des sens. Il sait caresser un orchestre pour rendre sa musique directement envoûtante. »
Ce ballet en un acte et deux tableaux s’inspire du télescopage de plusieurs contes russes avec pour résultat un récit typique de quête et de transgression, plus russe que russe. Le scénario est dû à moult collaborateurs mais surtout à Michael Fokine, premier danseur et principal chorégraphe de la compagnie, ainsi qu’à Léon Bakst, le responsable des costumes. En outre, la trame, “per aspera ad astra“ (vers les étoiles à travers les difficultés) marque le triomphe du Bien sur le Mal par l’intermédiaire de la pitié (l’acte fondamental de compassion qui pousse le héros, le Prince Ivan Tsarevitch, à relâcher l’Oiseau de feu qu’il avait capturé, oiseau merveilleux, fait d’or et de flammes) et ce, en échange simplement d’une plume pour recouvrer sa liberté, mais une plume magique. Ce présent va permettre au Prince d’une part, de se délivrer des griffes de son futur beau-père, Kastchei, un sorcier un brin hostile qui exécute une danse “infernale“ envoûtante, et d’autre part, de pouvoir épouser la princesse convoitée. Un Prélude sert d’Introduction qui sera suivi d’un découpage en 19 numéros dans le ballet complet.
L’œuvre qui marquera l’envol médiatique d’Igor Stravinski a été créée triomphalement le 25 juin 1910 à l’Opéra de Paris par les Ballets russes du magicien Sergeï Pavlovitch de Diaghilev, ce catalyseur inépuisable de l’art nouveau qui fit alors de Paris la capitale des arts, ce mégalomane passionné d’une remarquable fécondité artistique. Gabriel Pierné dirige. Elle propulsa sur le devant de la scène internationale le jeune compositeur de 27 ans, alors inconnu hors de la Russie natale. Ceci eut lieu presque par hasard : en effet, Diaghilev, alors au bord de la ruine et à court de répertoire original pour sa nouvelle saison de ballet à Paris ne fit qu’incidemment appel à Stravinski, les autres compositeurs sollicités n’étant pas intéressés pour des raisons diverses. Il avait seulement entendu sa musique avec le Scherzo fantastique et peut-être Feux d’artifice. Il n’avait pas idée alors qu’il commanditait le premier grand ballet symphonique du XXè siècle, prélude à une impressionnante série de chefs-d’œuvre. Diaghilev avait eu, comme on dit, du nez. La collaboration entre les deux hommes a permis de dresser une liste impressionnante d’œuvres majeures du XXè siècle dont Le Sacre sera, à coup sûr, le sommet et ce, sur une période d’écriture s’étendant sur à peine vingt ans. Ou, quand un génie rencontre un autre génie.
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Biographie de Tan Dun
Tan Dun est un compositeur chinois né le 18 août 1957 à Changsha (Chine) et chef d’orchestre, ayant dirigé nombre de phalanges prestigieuses. Initié aux instruments à cordes traditionnels chinois, Tan Dun joue de la viole et écrit des arrangements pour l’opéra de Pékin. Il étudie au Conservatoire de Pékin puis aux Etats-Unis, à l’Université de Columbia, où il découvre les compositeurs minimalistes et post-minimalistes. Pour en savoir plus, cliquez ici