Du grand concert symphonique en ce vendredi 2 février à 20h à la Halle. Les musiciens de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse sont placés sous la baguette de la chef Nathalie Stutzmann. En ouverture de concert, la Symphonie concertante pour violon et alto de Mozart avec comme solistes respectivement la violoniste allemande Veronica Eberle et l’altiste français Adrien La Marca. Pour suivre, la Symphonie n° 3 de Brahms et pour clore, de Wagner, l’Ouverture de Tannhäuser.
Symphonie concertante pour violon et alto en mi bémol majeur, K. 364
Elle est en trois mouvements : Allegro maestoso – Andante – Presto et dure environ 27 minutes. Wolfgang Amadeus Mozart est de retour à Salzbourg en ce début de 1779. C’est le retour du fils prodigue dans une cité qu’il n’aime pas et qu’il a fui. Il a 23 ans et se retrouve sous la coupe d’un certain Colloredo qu’il exècre mais qui lui attribue une charge rétribuée, mais dont le titre ni le montant ne sont guère à son goût. Toute sa correspondance d’alors relate sa très mauvaise humeur.
1779 sera tout de même une année faste côté composition et ce, jusqu’à l’automne. Cette Symphonie concertante représente d’ailleurs un sommet dans l’intensité expressive qui longtemps n’aura pas d’équivalent dans sa création, mises à part les œuvres tournées vers le théâtre. En tant que chef-d’œuvre, certains considèrent qu’elle ouvre la route à tous les Concertos à venir de la pleine maturité en même temps qu’aux dernières Symphonies. Pour se faire, il est conseillé de s’intéresser aux éléments de dialogues entre les deux solistes, entre les solistes et l’orchestre, entre les différents groupes de l’orchestre (hautbois, cors, quatuor des cordes où les altos sont divisés), entre tel soliste et tel groupe orchestral, …dialogues multiples sans que l’unité de l’œuvre n’en soit affectée. Question thème, vous retiendrez la musique de l’Andante afin de noter sa parenté avec l’Andantino du Concert pour piano n° 9 “ Jeunehomme“ qui vous attend le 6 mars sous les doigts d’Alexandre Tharaud ici même.
Pas de biographie pour Nathalie Stutzmann que tout amateur de musique et voix ne peut pas ne pas connaître. Lire impérativement dans le Vivace l’article la concernant. Reconnu par The Financial Times comme « un pur talent » et décrit par Le Monde comme « le nouveau héros de l’alto », encensé par Le Figaro et la presse spécialisée, encore un musicien en haut de l’affiche pour qui, « la valeur n’attend pas le nombre des années », tel est l’altiste Adrien La Marca dont le jeu est caractérisé par une profonde expression alliée à une maîtrise instrumentale survolant tous les répertoires. Sa richesse sonore unique combinée à une présence charismatique naturelle créent une connexion émotionnelle immédiate avec son public. Quant à Veronika Eberle, son parcours est tout aussi réjouissant et on ne pourrait que répéter les mêmes propos, jusqu’à l’âge auquel tous les deux, ils ont “attaqué“ leur travail sur le type d’instrument choisi : 6 ans.
Symphonie n°3, en fa majeur, op. 90
I. Allegro con brio
II. Andante
III. Poco allegretto
IV. Allegro Durée : 35’ environ
Elle fut écrite pendant l’été de 1883 à Wiesbaden dans des conditions particulièrement favorables. Sa première audition est donnée le 2 décembre 1883 par la Société Philharmonique de Vienne sous la baguette de Hans Richter qui la surnommera “Eroïca“ ; à tort ? Plus récemment, le chef d’orchestre Kurt Masur, fan de Johannes Brahms, dira : « La Troisième, est une “héroïque“ bis…Elle est passionnée, et chargée d’un message extrêmement personnel. Les mouvements internes sont merveilleusement simples, dans leur tendresse et leur chaleur, mais l’aspect le plus frappant reste peut-être le premier mouvement avec son thème bondissant…Enfin, le finale qui s’achève dans une conclusion heureuse, est très représentatif de Brahms : après le conflit et les suffocations intérieures, c’est une fin lumineuse, introvertie, méditative et transparente qui ne ressemble à aucune autre, dans son évanouissement pianissimo. »
Œuvre pour orchestre de son compositeur la plus énigmatique de toutes, elle “secoue“ l’entourage. Joachim, le grand ami violoniste, avoue que, pour une fois, il est tout disposé à accepter sans réticence de projeter des images visuelles dans une œuvre abstraite, et qu’il imagine volontiers, grâce au second thème en do majeur, Léandre traversant l’Hellespont à la nage, son amour le poussant à braver les éléments déchaînés… ! Il se serait exclamé : « Pauvre mortel !mais comme c’est beau et expiatoire cette apothéose, la rédemption de celui qui est détruit. » Joachim fait ainsi le grand écart entre classicisme habituel et romantisme ponctuel.
Quant à Clara Schumann, il y a bien longtemps (depuis 1853) qu’elle vogue sur un petit nuage pour tout ce qui touche Johannes Brahms, depuis la première apparition qu’elle eut de ces si longs cheveux blonds d’un jeune homme de vingt ans. Encore plus romantique dans son enthousiasme, elle déclare : « Quelle œuvre, quelle poésie ! Au travers de tout l’ouvrage, un souffle harmonieux ; chaque phrase est comme une source, un battement de cour, un trésor. Comme du commencement à la fin, on est envahi par le charme secret de la vie des bois et forêts !… » Ses commentaires pourraient presque donner à penser que Brahms a voulu écrire une “musique à programme“. En résumé, dit-elle, « je ne sais quelle phrase je préfère ». Et elle ne juge alors que sur une transcription pour piano !
De fait, l’œuvre entière tire une grande partie de son attrait voluptueux des changements constants dans la densité de sa texture. Une étude de la partie manuscrite utilisée par le compositeur lors des dernières répétitions de la symphonie montre qu’il avait effectué à ce stade de nombreuses modifications de détail dans l’orchestration. On remarquera qu’une considération si méticuleuse des plus légères subtilités de la coloration orchestrale ne peut servir qu’à démentir l’assertion sans fondement et répétée à l’envie que Brahms ne s’intéressait guère aux problèmes de l’instrumentation. Mais, il a son lot d’ennemis, les pro-Wagner, les pro-Bruckner, Hugo Wolf, les musiciens français comme Saint-Saëns, Lalo, Fauré, d’Indy, Dukas…Seul un Berlioz se révèle impressionné favorablement. Tout cela n’empêchera pas la Troisième de connaître un succès toujours croissant, sauf en France, alors !
Ouverture de l’opéra Tannhäuser.
Ce drame de la rédemption d’un chevalier et poète est le point de départ des révolutions esthétiques du compositeur allemand Richard Wagner. La trame dramatique en est la suivante : Un chevalier chrétien est déchiré entre les plaisirs de la chair offerts par Vénus, déesse de l’amour, et l’amour pur, finalement rédempteur, de la vertueuse Elizabeth. Telle est la trame du cinquième opéra de Wagner, son troisième ouvrage d’envergure après Rienzi et Le Vaisseau fantôme, qui érige les fondements de la révolution esthétique à venir. Grand opéra romantique en trois actes, il est créé le 19 octobre 1845 à Dresde. Il connaîtra six versions de 1845 à 1875.
Son Ouverture est parmi les plus célèbres du compositeur. Quelle page ! Elle est aussi la plus significative car elle appartient encore au premier romantisme contre lequel la lutte du compositeur a toujours été féroce. De cette lutte même, surgit la fascination étrange de cette partition pleine d’échos du passé et pourtant si moderne, encore enivrée des modèles européens, mais encore si indépendante, si solitaire, si innovatrice. À la manière des italiens et des français, Wagner utilise son Ouverture pour énoncer les thèmes conducteurs de l’ouvrage. Ces leitmotive qui deviendront la caractéristique première de l’inspiration wagnérienne sont exploités dans Tannhäuser de manière toujours identique. Ils servent en quelque sorte de citation pure et simple, de points de repère. L’Ouverture, ample, solennelle et imposante débute par le thème des Pèlerins. Le choix du thème sacré importait par rapport à cette lutte entre le sacré et le profane, peut-être l’essence la plus immédiate de l’œuvre. Une fois encore, le mysticisme motive profondément une création et le péché est symbole de destruction et de mort. Ce chœur des Pèlerins que l’on entendra à nouveau au cours de l’ouvrage est ici restitué par l’orchestre dans toute sa progression musicale.
Le passage aux obsessions de la chair, à l’érotisme lourd et dévorant, à la sensualité trouble et enveloppante de Vénus, s’opère sans transition, et une fois encore, le thème est développé dans sa totalité. Cette nouvelle parenthèse présente aussi bien la plainte voluptueuse de Vénus que le chant contestataire et enflammé de Tannhäuser. Moment sans doute le plus original de l’Ouverture, c’est à travers un usage saisissant des cordes que Wagner alterne avec un rare bonheur le désir de Vénus et la volonté de Tannhäuser.
Cet affrontement est celui du désir et de la raison, du vice et de la vertu, de la vie et de la mort dans un jeu de contrastes violents que le Romantisme va faire sien pendant tout un siècle. On notera le lyrismes des cordes et l’abandon extatique du tissu orchestral. Mais les moments d’accalmie durent peu chez Wagner et, de nouveaux accords rageurs, obsessionnels prennent vite le dessus. Le drame se révèle à nous comme une lutte aberrante et inutile contre une fatalité oppressante. Les thèmes se heurtent dans un dialogue serré qui prend la couleur d’une dispute sans issue. Le jeu des antithèses s’opère, entre autres, la volonté de rédemption et l’attrait de la damnation. L’Ouverture deviendra plus tard Prélude pour s’enchaîner directement sur le Vénusberg dont Wagner voudra souligner la corruption à travers une stupéfiante Bacchanale.
Orchestre national du Capitole