Le festival DIAM Des Images Aux Mots remet le couvert du 26 janvier au 4 février à Toulouse. Depuis 17 ans, cet événement met en avant la culture LGBTQIA+, ses questions d’orientations sexuelles et de genre à travers le cinéma sous toutes ses formes. Cette année, c’est une quarantaine d’œuvres projetées dans 8 lieux emblématiques de Toulouse qui vous attendent. Sa présidente Anne-Catherine Mezur s’est entretenue avec Culture 31 sur le lien entre cinéma et militantisme.
En quoi l’art est un moyen de limiter, d’ouvrir les esprits à la cause LGBT ?
C’est surtout le cinéma qui a ce pouvoir. Ça touche l’intime et dans l’intimité car il y a un accès plus facile qui le distingue d’autres arts. Contrairement à la peinture où il faut se rendre dans un musée, n’importe qui peut tomber dessus. C’est un média artistique populaire qui ne nécessite pas de culture cinéphile pour être touché.
Donc il y a plus de facilité pour sensibiliser ?
Le festival a avant tout été créé pour que les personnes LGBT se retrouvent dans le cinéma où ils sont peu représentés. On voulait un cinéma où on parlait enfin de nous. Je le compare un peu à la vidéo de la petite fille noire sur les réseaux sociaux qui était émerveillée de voir à la télé le film de la Petite Sirène où celle-ci est noire. Ça fait du bien de se reconnaître à l’écran.
Des œuvres à succès comme La Vie d’Adèle, Été 85, 120 BPM…ont-elles pu changer les mentalités?
Quelqu’un de profondément homophobe n’ira pas voir ce genre de films. Mais quand on se questionne sur son orientation sexuelle, le fait de voir un film peut provoquer un déclic. Concernant les œuvres du cinéma commercial, on ressent un contrôle sur ce qu’on a envie de montrer. Par exemple, La Vie d’Adèle a été réalisée par un homme et ça se ressent. Il y a un accent qui est mis sur la performance sexuelle, ce qu’on ne retrouve pas à mon sens dans des œuvres réalisées par des femmes, comme La Belle Saison de Catherine Corsini. Au festival DIAM on veut montrer des choses que personne ne veut montrer, et que les gens n’ont jamais vu.
Le cinéma est-il plus inclusif dans ses productions aujourd’hui ?
Le côté positif d’être dans une société de plus en plus individualiste, c’est qu’il y a une diversité des histoires, des formats dans le cinéma. Il n’y a plus de domination d’un modèle, hétéro en l’occurrence. Le cinéma est plus respectueux de la diversité. En revanche, le cinéma commercial se concentre surtout sur des films gays et les thématiques sont assez redondantes : comming-out, amour impossible, adolescence… et il laisse peu de place aux films lesbiens.
Au festival DIAM, les personnes non-LGBT sont-ils aussi attirés ?
En arrivant à la présidence de DIAM, je pensais arriver à faire venir un public hétéro grâce aux différents partenariats. Mais le public reste bel et bien majoritairement LGBT. Les hétéros ne représentent que 10% du public à Toulouse. Au niveau de l’édition en région Occitanie, c’est différent car c’est un milieu plus rural donc l’attraction culturelle prend le dessus.
Des coups de cœur cette année ?
Du côté des documentaires il y a Sirens qui parle d’un groupe de métaleuses, Queerying Nature qui observe des phénomènes homosexuels chez les animaux, ce qui brise l’argument du contre-nature souvent avancé. Il y a aussi Acsexybilidade sur le handicap et la sexualité, et tous ceux sur le thème du sport.
Cette édition a un goût particulier avec les JO, vous mettez l’accent sur les inégalités dans le sport. Est-ce un milieu particulièrement en retard ?
Le sport est à l’image de la société donc il a sa part d’évolutions. Il y a déjà beaucoup de lesbiennes dans le sport féminin. Récemment on a vu la couverture de l’opus du dernier jeu Fifa où Sam Kerr pose aux côtés de Mbappé. C’est la première footballeuse qui y figure. Dans le sport, l’homophobie reste vraiment le noyau dur à faire bouger aujourd’hui. L’inclusivité doit devenir un objet commercial malheureusement et heureusement, pour évoluer.
Propos recueillis par Chloé Morand-Bridet