La musique, cette étonnante langue universelle. Elle rythme nos vies dans la tristesse comme dans les jours heureux, elle nous aide à extérioriser ou à combler les silences, elle est aussi variée que passionnante; la musique est partout. Et on le lui rend bien ! En lui dédiant des boutiques entières : les disquaires. Indépendants ou de grandes enseignes, Culture 31 vous présente les temples du vinyle de Toulouse, la Ville rose.
La musique est partout. Les progrès technologiques jouent en sa faveur en permettant aux auditeurs de profiter d’un large choix de genres, accessibles n’importe où, n’importe quand. Mais qu’en est-il de ces soirées entre copains où, autour de la table, les convives débattent du prochain 45 tours qui passera sur les platines ? Figurez-vous que ces instants intimes ont le vent en poupe ! Et ce, plus précisément depuis l’arrivée du covid. Des véritables moments de partage à vivre à plusieurs car il ne faut pas l’oublier, il existe une langue commune à l’humanité : la musique.
Victime de son succès, le vinyle fait même face à une pénurie de matière première. Plus assez de cartons pour les pochettes d’albums. Dans les usines de pressage, les carnets de commandes s’accumulent, jusqu’à une attente de plus 1 an pour certaines productions. Et on comprend cet engouement derrière ces disques microsillons. Pour les audiophiles, rien de mieux que le son d’un disque vinyle. Mais alors, où trouver ces pépites ?
Les disquaires de Toulouse
Croc Vinyl
Et on ouvre le bal avec l’institution toulousaine de la rue des Lois : Croc Vinyl. L’aventure musicale a commencé dans les années 80 pour Eugène Corona-Pinéda. Avant d’ouvrir sa propre boutique, il baladait ses caisses de disques de marchés en marchés toulousains : au Capitole et celui de Saint-Cyprien le dimanche. Son emplacement a toujours attiré. Le succès entraînant le succès, la suite logique a été d’ouvrir un établissement dédié à ses collections. Depuis 1987, Croc Vinyl ravit toutes les générations avec une pluralité de genres en bacs. Une volonté depuis l’ouverture du magasin, Eugène l’explique si bien : “La musique est faite pour tout le monde. C’est une règle qu’on s’est imposé pour satisfaire le plus grand nombre de personnes, sans porter de jugement”.
Sa pochette coup de coeur : King Crimson – In the Court of the Crimson King (1969)
La raison : Juste parce qu’elle est belle ! Le groupe la doit à Barry Godber, un artiste et programmeur informatique britannique. Il s’agit de la seule couverture d’album qu’il ait jamais peinte. Barry est décédé en février 1970 à l’âge de 24 ans.
Croc Vinyl – 7 Rue des Lois, Toulouse
Vicious Circle
Dans notre circuit, on traverse la place du Capitole et on se laisse entraîner par les sonorités rock, pop, hip-pop, expérimental, funk, hardcore, de cette veritable boîte à musique : Vicious Circle. Vous l’aurez compris, depuis 1997, ce disquaire fait trembler les murs de Toulouse. Et si jusqu’en 2017 c’était au 97 rue des Puits-clos qu’il fallait se rendre pour acheter son vinyle; aujourd’hui c’est Rue Gambetta que Grégoire, responsable du magasin, se rend quotidiennement. Il a vu la boutique évoluer, passant de bacs exclusivement garnis pour une clientèle rock et punk, à faire rentrer en boutique des styles plus accessibles, plus généralistes. Derrière ce changement d’ambiance, une explication convaincante de Grégoire : “Les goûts évoluent en vieillissant. Notre clientèle se rajeunit aussi. Et l’offre musicale est tellement riche et se renouvelle sans cesse. Si on n’écoute pas de tout, on est largué”.
Sa pochette coup de coeur : Ariana Grande – Dangerous Woman (2016)
La raison : « J’adore cet album ! ». Il s’agit du troisième album studio de la chanteuse américaine. Il comprend de nombreuses collaborations avec Nicki Minaj, Lil Wayne, Macy Gray, ainsi que le rappeur Future.
Vicious Circle – 56 Rue Léon Gambetta, Toulouse
Le Laboratoire
Rue Gambetta, on dérive rue Sainte-Ursule jusqu’à atterrir dans le quartier de la Bourse. Ici repose un grandiose temple de la musique, hébergeant, depuis maintenant 23 ans, des classiques de la mélodie. En 2000, quand Cédric a ouvert sa boutique, Le Laboratoire abritait des sonorités se rapprochant plus d’un passionné de rock indépendant des années 1960 et 1970, de soul, de funk, de reggae et de hip-hop. Aujourd’hui, la boutique s’est diversifiée en styles et genres; et c’est Alex, vendeur depuis dix ans dans l’établissement, qui prendra plaisir à vous conseiller. Car, comme il nous l’a confié : « Être disquaire, c’est par passion. C’est le meilleur métier du monde ». Et cette passion lui aura donné l’occasion de vivre des rencontres atypiques, comme celle avec un artiste qu’il adore par exemple. Le chanteur du groupe Sonic Youth a été surpris écoutant des heures de musique avec Alex dans la boutique, alors qu’il se baladait par hasard dans le coin. « Il se sentait bien, il est resté ». C’est donc ça la force et l’amour de la musique.
Ses pochettes coup de coeur : Sonic Youth – Daydrem Nation (1988) & Mort Garson – Mother Earth’s Plantasia (1976)
La raison : Il fallait bien montrer la pochette du groupe qui se cache derrière l’anecdote ! Et puis, pas la peine de raison particulière d’aimer la deuxième. Mais c’est une nécessité de préciser qu’il s’agit d’un album de musique électronique, conçu pour être écouté par des…plantes !
Le Laboratoire Vinyles – 9 Rue de la Bourse, Toulouse
InnerDisc
On traverse la rue de Metz en fredonnant la dernière chanson passée au Laboratoire, et on se perd dans les rues des Carmes. Jusqu’à se trouver nez à nez avec Vincent, co-gérant de la boutique InnerDisc, née en 2015, dans le quartier de Saint-Cyprien. À ses débuts, l’établissement se spécialisait dans la musique électronique. Il y a deux ans, Vincent et son associé, Frédéric, ont déménagé leurs caisses de musique jusqu’à la rue des Couteliers, et offrent maintenant un plus large choix de genres. Leur style s’adresse une clientèle curieuse de sonorités jazz, funk, saoul. Parmi les pépites se cachent même des imports direct du Japon. Des choix originaux que Vincent justifie par leur volonté de prendre le contre-pied de ce que l’on peur déjà trouvé dans les grandes enseignes. On pourrait discuter des heures de sa passion pour la musique, et d’art en général. Le disquaire organise des événements combinant différents univers artistiques dans sa boutique : vernissages, sets de DJ, brunch…
Sa pochette coup de coeur : Genji Sawai – Sowaka (2023, réédition)
La raison : « C’est un vinyle japonais. J’aime beaucoup cette pochette d’album, le personnage me fait penser à Grace Jones ».
InnerDisc – 18 Rue des Couteliers, Toulouse
O’CD
Après ce moment d’égarement, retour à la réalité dans une rue plus active de la Ville rose : la rue des Filatiers. Chaque toulousain est déjà passé au moins une fois devant les vitrines O’CD, et a déjà vu au beau milieu de toutes leurs pochettes de vinyles, CD ou encore DVD; Stéphane Fontan, responsable de la boutique Toulouse depuis deux ans. Parce que oui, O’CD est en réalité une grande enseigne; et le passionné a d’ailleurs commencé sa carrière en tant que disquaire à Paris. La force de la structure réside dans son large choix de genres que ce soit en format 33 tours, 45 tours ou CD ! « Je n’ai jamais les mêmes articles qui passent en caisse », nous a-t’il-confié. Avec 600 arrivées par jour pour les plus grosses commandes, on imagine que la diversité n’est pas ce qu’il manque… Et puis vous pouvez compter sur Stéphane pour mettre en lumière des artistes peu connus du grand public, c’est d’ailleurs le cas de sa pochette coup de coeur…
Sa pochette coup de coeur : King Crimson – Discipline (1981)
La raison : Il s’agit de l’un des dernière entrées du magasin. Un groupe anglais des années 70, qui a réveillé le monde du rock avec leur style progressif.
O’CD – 17 Rue des Filatiers, Toulouse
Armadillo
Une fois la Place des Carmes traversée, on vous propose un voyage dans le temps. Rue Pharaon, repose le temple du rock. Armadillo, le repaire des esprits rebelles à Toulouse. Derrière le comptoir, Antoine Madrigal, disquaire co-fondateur de la boutique avec Benoît Binet, depuis 1988. Il est une véritable encyclopédie vivante du rock, et c’est avec le plus grand des plaisirs qu’il partage ses connaissances et son histoire ! Parce que des anecdotes, il en a à foison, surtout dans sa boutique. Il semblerait qu’à chaque fois que vous rentriez dans la boutique, vous passiez sur les pas du guitariste d’Iggy Pop… Alors qu’il attendait que la super star atterrisse à l’aéroport de Blagnac pour se rendre à leur concert le soir-même à Carcassonne, le guitariste d’Iggy Pop dans leur groupe The Stooges, se baladaient dans les rues de Toulouse, jusqu’à arriver devant l’entrée d’Armadillo. “Je ne l’ai pas reconnu de suite. On discutait, il a pris une pochette des Stooges et, en désignant un des mecs en photo sur la pochette avec son doigt, il m’a sorti : c’est moi là”, nous a confié Antoine, des étoiles encore plein les yeux. Une époque révolue mais qu’on prend plaisir à écouter, surtout quand c’est raconté avec passion.
Sa pochette coup de coeur : The Kinks – Face to Face (1966)
La raison : « On pose souvent la question : Tu es plutôt Stones ou Beatles? Moi, je suis Kinks. »
Armadillo – 32 Rue Pharaon, Toulouse
JIM’S Prophecy
On finit le tour de la ville avec une dernière danse chez un disquaire pas comme les autres, vue qu’il s’agit d’un…bus ! Une boîte à musique ambulante qui a pris place derrière la Médiathèque José Cabanis, depuis 2019 : JIM’S Prophecy. Aux commandes, Thierry Genibre, ancien commercial et DJ de passion depuis 20 ans. Il a tout arrêté pour vivre de sa passion, et s’est donné les moyens qu’on se souvienne de lui. Le quarantenaire a acheté un bus et l’a transformé en bus store spécialisé dans la musique électronique. Électro, house, techno et disco, autant de pochettes que de kilomètres parcourus.
Sa pochette coup de coeur : Grauzone – Limited Edition 40 Years Anniversary Box Set (2021)
La raison : Si vous ne le saviez pas, il s’agit du groupe dans lequel a débuté l’auteur-compositeur-interprète suisse Stéphane Eicher ! Leur titre le plus connu : Eisbär.