Mes rendez-vous avec Leo, un film de Sophie Hyde
Sur des sujets plus que difficiles, voire tabous, la réalisatrice australienne Sophie Hyde tisse finalement une comédie d’une légèreté sidérante qui n’occulte en rien de fondamentales réflexions. Porté par deux comédiens en état de grâce, un film d’une incroyable élégance.
Vu de dos, il a tout l’air d’un coach sportif attablé dans un bistrot. Il consulte l’heure, se lève et se dirige vers un hôtel, genre 4 étoiles luxe. Changement de plan. Nous sommes dans l’une des suites de cet hôtel. Une femme, la soixantaine, semble nerveuse. Toc, toc, elle ouvre et se trouve face au coach sportif. En fait un escort boy, Leo. C’est la première fois de sa vie que Nancy, veuve depuis quelques années, fait appel à ce genre de service. Mariée pendant 31 ans à un homme qui lui a refusé tout plaisir personnel, elle est à jeun d’avoir connu le moindre orgasme. Ancienne prof d’éducation religieuse, le temps pour elle est venu de passer à autre chose. Ce temps-là, c’est maintenant. Vont alors se succéder quatre rendez-vous avec Leo, comme quatre saisons pour rattraper toute une vie au cours desquelles ces deux êtres vont se rencontrer, se découvrir, s’accorder une confiance réciproque, tenter de lâcher prise pour Nancy, éprouver de l’excitation l’un pour l’autre, enfin, tout de même, passer à l’acte. La déception viendra brouiller un temps cet univers fait de sensualité, le pardon ne sera pas loin et avec lui la réconciliation de chacun avec lui-même. Règneront alors une sorte de sérénité et d’impression d’avoir passé un cap d’une incroyable délicatesse.
Et tout cela sans la moindre fausse note dans un film bien sûr follement sexy mais dont les sujets, nombreux, ne sont jamais assénés trivialement. Parmi eux la prostitution masculine, le sexe après la cinquantaine, l’acceptation de son corps. Ce n’est pas rien et terriblement casse-g… vous en conviendrez. Dans le huis clos théâtral de cette chambre aseptisée dans son confort et sa modernité, deux êtres se découvrent avec une subtilité, une audace et une virtuosité de paroles d’une intelligence inouïe. Emma Thompson, pour qui le rôle est écrit, donne le vertige par un engagement personnel stupéfiant. Le plan final vous clouera sur votre fauteuil… Elle n’aurait pas atteint un tel degré de raffinement sans le Leo de Daryl McCormack. Caster un quasi inconnu pour un tel rôle tient du génie. D’autant qu’il fait, ce qui n’est pas rien, jeu égal avec l’immense actrice britannique. Solaire, foudroyant en silence, possédant son métier à la perfection, il va aider Nancy à parachever sa mue.
Inutile d’épiloguer sur la morale de cette histoire qui n’est après tout que celle de deux naufragés qui vont mutuellement se secourir. Finalement aussi pudiques l’un que l’autre, ils nous donnent une vraie leçon de vérité portée par une authentique ode au plaisir et à la liberté.
Daryl McCormack – Une star est née, assurément
Cet américano-irlandais fait ses études à Dublin. En 2014, il a 22 ans, il obtient un Bachelor of Arts en drame. Cela lui ouvre les grands rôles shakespeariens. Les séries vont vite s’emparer de ce jeune talent. Et à grande échelle ! Le grand écran lui offre un temps des rôles secondaires pour finalement lui confier un premier rôle, celui d’un escort boy. Finies les bastons à deux balles, place à la comédie dramatique. Et c’est une véritable révélation !